"Mon père était un ordinateur, ma mère une machine à écrire. Moi, j'étais un cahier vide et maintenant je suis un livre." Le chilien Alejandro Zambra, dont a apprécié les trois premiers romans, livre avec Mes documents un ouvrage qui tient aussi bien de l'inventaire de la mémoire du Chili des dernières années de Pinochet que de l'autofiction dans de courts récits qui semblent comme des fragments échappés d'un roman. L'ordinateur, des années 80 à aujourd'hui, pourrait servir de fil conducteur aux 11 nouvelles (si tant est qu'on puisse les appeler ainsi) mais ce n'est qu'un élément parmi d'autres tant Zambra s'y entend pour nous entraîner dans un no man's land entre réalité, fantasmes et fiction pure. L'écrivain chilien est passé maître dans l'art de la rupture de ton, sentimental, parfois, provocateur, souvent, voire même choquant à l'occasion mais toujours nostalgique (de quoi ? Désolé, il n'y a pas de réponse à cette question). Certains chapitres semblent vraiment constitués de bribes d'autobiographie (l'école, les premières amours, la poésie) mais avec Zambra rien n'est sûr. A l'opposé, quand il nous entraîne dans un récit qui semble inventé, il parvient à mettre le doute en s'immisçant à l'intérieur avec une conclusion telle que : "Je me dis que l'histoire ne peut se terminer sur Camilo pleurant son fils mort, son fils presque inconnu. Mais ça se termine comme ça." Ce bric-à-brac littéraire d'où ressortent certaines obsessions (l'enfance, l'écriture, le sexe, l'alcool, la solitude, la mélancolie) est certes inégal mais le plus souvent plaisant par la fluidité et l'humour noir de son style.

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le 4 janv. 2017

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