Je ne déteste pas les livres de Ben Bova, j'ai juste toujours l'impression qu'ils auraient pu aller encore plus loin. J'ai passé un agréable moment à lire ce Vénus...
Ce livre a des qualités, à commencer par avoir anticipé des éléments de notre époque, comme la montée d'une oligarchie capitaliste effrénée et l'impuissance face au réchauffement climatique. On se situe à un moment après 2050. La lune a été colonisée, les astéroïdes sont minés. Les agences spatiales reculent face à la toute-puissance de magnats comme Martin Humphries. Ce dernier lance un défi extravagant : il offrira 10 milliards de dollars à qui ira sur Vénus retrouver le cadavre de son fils Alex, envoyé trois ans plus tôt lors d'une expédition pionnière qui a mal tourné. Deux personnes relèvent ce défi : son second fils Van, un être maladif, sorte de dandy gâté, peu concerné, qui veut vérifier la véracité d'un message anonyme suggérant qu'Alex avait été tué sur ordre de son père ; et un ancien concurrent déchu de son père, Lars Fuchs, devenu gratteur d'astéroïdes sur Mars. La course est lancée.
C'est au fonds un peu une reprise de 20 000 lieues sous les mers ou d'Abyss, tant le milieu de Vénus est notoirement hostile : des tempêtes d'acide, une pression comparable à celle des grands fonds et une chaleur de plus de 400 degrés.
Le roman tisse plusieurs fils ensemble. Le centre de la structure est celle de l'arrivée de Van à l'âge adulte, et sa confrontation avec un père écrasant et mégalomane. Et le mystère de Vénus vient seulement dans un deuxième temps, ce que je trouve dommage, mais c'est le même reproche que je fais toujours à Bova : faire primer les drames intérieurs des personnages sur les environnements qu'ils traversent.
Ho bien sûr, Vénus est à l'honneur, mais elle donne parfois l'impression de n'être là que pour fournir des péripéties (c'est peut-être juste une impression de ma part). De belles péripéties, à commencer par ces bactéries présentes dans la haute atmosphère qui dévorent la coque en céramique car elles se nourrissent de carbone ; cette éruption massive que la planète commence à connaître car ses plaques soudées ont subi trop de pression ; et enfin ce mystérieux organisme géant doté de tentacules avides de métal qui essaie de capturer le vaisseau de sauvetage.
Cependant ces péripéties passent trop souvent à l'arrière-plan face aux relations interpersonnelles. La deuxième partie est plus intéressante, éclairée par la figure de Lars Fuchs, commandant autoritaire qui rappelle le capitaine Némo ou Achab. Mais les figures féminines sont un peu nulles, la principale question que chacune suscite est : est-ce qu'elle couche ? J'ai un peu d'indulgence car on est au début des années 2000, mais tout de même, elles méritent mieux. Le dénouement face à Martin Humphries est également un peu décevant.
Vénus est une histoire d'exploration spatiale riche en péripéties mais un peu trop centrée sur la psychologie des personnages et pas assez sur l'action : le livre aurait peut-être gagné à être un peu resserré. Il ménage de bons moments, et je pense qu'il serait parfait adapté en bande dessinée.