Essai qui examine de façon pertinente et originale un vaste panel d'aspects du travail contemporain, du temps de travail et de l'ennui aux relations client-marchand et aux rapports hiérarchiques.
En opposant non plus les travailleurs de bureaux (cols blancs) aux travailleurs manuels (cols bleus), mais les preneurs de décisions (artisans) et ceux qui suivent les processus (les employés et les cadres), il permet une nouvelle définition de ce qu'est un travail agréable - dans le sens où l'opinion largement partagée est aujourd'hui qu'un travail plaisant est un travail plein de sens -. Il se permet aussi de questionner l'aversion à la responsabilité qui caractérise maintenant beaucoup de postes : le suivi des méthodes définis par d'autre et l'absence de critères objectifs d'évaluation du travail rendent la justification plus important peut-être que la tâche elle-même. Et si il y en a encore qui doutent des liens entre notre façon de travailler et notre société, il connecte intelligemment cette déresponsabilisation à notre désengagement moral et politique.
Ce ne sont ici que des exemples grossièrement résumés des pensées contenues dans l'ouvrage. Et il en regorge. Néanmoins, je n'irai pas jusqu'à dire que l'ouvrage est dense : le fait que l'auteur s'appuie sur son expérience personnelle (de mécanicien moto, surtout mais pas seulement) pour appuyer ses théories est certes pittoresque mais induit des longueurs un peu dommageables, en particulier au milieu de l'ouvrage. Ça a au moins le mérite de reposer le lecteur peu habitué à ce genre littéraire.
Et si il fallait un dernier argument pour vous convaincre de lire ce livre, sachez qu'il se paye le luxe d'expliquer rapidement et efficacement Marx et Taylor (entre autres). Il peut après tout en constituer une bonne introduction.