Bien avant que de commencer La Comédie Humaine, j'ai lu quelques Zola.
En particulier, esprit de contradiction persistant oblige, j'avais depuis longtemps envie de lire L'Assommoir. Depuis que ma mère le lisait tout haut à mon frère pour l'aider, il préparait à l'époque son bac de français. Et elle était restée avec cette opinion simple et évidente : C'est dégueulasse. Du coup, il m'avait irrémédiablement attirée, je savais bien que je voulais m'en faire ma propre opinion.
Comme pour L'éducation sentimentale que j'avais bien aimé. Mais je crois que je suis bon public.
Pour L'Assommoir, c'est malgré tout une vraie opinion tranchée. J'ai bien aimé ce livre. Et il n'est pas dégueulasse, non.
L'Assommoir décrit l'ascension sociale puis la descente aux enfers de Gervaise Macquart.
Au début simple et honnête femme, elle se faire abandonner à Paris avec ses deux gosses par son amant Lantier, qui aime trop la boisson et les femmes.
Sorte de vision prémonitoire, Gervaise voit les pauvres hommes à l'Assommoir du Père Colombe et a des la pitié pour les hommes broyés par cette boisson poison.
Alors elle se ressaisit, trouve un travail, un homme non buveur, Coupeau, et monte même sa petite entreprise. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, alors elle se laisse un peu aller à se reposer sur ses lauriers.
Coupeau a un accident et profite de son long arrêt maladie pour sombrer dans la boisson à L'Assommoir du père Colombe. Gervaise dépense tout son argent en nourriture et en boisson, non sans en profiter pour s'entretenir la bedaine. Mais tout est toujours possible, jusque là, tout va bien.
C'est le fabuleux repas orgiaque décrit avec force détails par Emile Zola, point d'orgue du roman, véritable tournant de l'histoire. L'anéantissement du petit magot amassé à la force du poignet par Gervaise, sous prétexte que si les autres abusent, autant en profiter, et bien encore.
A partir de là, dépense d'argent, y compris celui des autres. Lantier revient, s'installe et se fait entretenir, un beau tour de passe-passe. Perte de la boutique, incapacité de travailler, Gervaise se retrouve sans le sou tandis que Coupeau fait des crises de Delirium tremens. Il se coupe donc du monde, en pure souffrance certes, tandis que Gervaise reste pleinement consciente jusqu'au bout de son enfer. Jusqu'à sa mort dans une chambre de bonne pitoyable, comme la pitoyable chose qu'elle est devenue.
L'Assommoir nous rappelle que l'on a beau monter très haut, on peut toujours retomber. Cette folle pensée qui la perd est de se dire que les autres s'amusent bien, alors pourquoi pas elle. Elle qui évitait l'Assommoir du Père Colombe comme la peste, y sombre également, sans un bruit, sans finalement de résistance, comme les autres.
Ce qui nous sépare d'eux ? La force qui nous reste.
L'Assommoir, c'est la vie, cette chienne.