Pour ceux qui ont redécouvert la légende arthurienne via Kaamelot d’Astier, vous allez découvrir de nouveau chevalier de la Table ronde, mais aussi des éléments narratifs qui servent de socle comme l’amour de Lancelot pour la reine Guenièvre, une des demi-sœurs d’Arthur qui a des désirs adultérins, Merlin qui aide Arthur et la Dame du Lac qui est l’amante de Merlin.
N’ayant pas (encore) lu les livres de Chrétien de Troyes, je ne pourrais comparer les histoires. Bien entendu, la légende arthurienne faisant partie de la matière de Bretagne, chaque auteur peut la reprendre à son compte pour dépeindre ce qu’il souhaite.
Le côté intéressant c’est que la construction du roman porte certains archaïsmes, les chapitres sont généralement très courts. Les éléments fantastiques sont introduits sans présentation réelle, on s’attend à ce que le lecteur soit incrédule ou du moins qu’il ne se soucie pas de certaines cohérences, par exemple :
Perceval tombe amoureux d’une femme, celle-ci meurt. Quand Lancelot arrive devant sa tombe, la mère de la jeune femme le regarde et ce dernier joue un air. La morte lui répond et Lancelot nous annonce qu’elle n’est pas morte, puis plus tard Perceval retrouve la jeune femme dans un château de verre au sommet du monde. Si on s’attend à des suites logiques et au fait que le narrateur nous prenne par la main, ce roman ne va pas vous plaire.
Ici, on reste dans la tradition médiévale, ce que j’ai pu en lire du moins, on met les personnages là où ils ont besoin d’être et pas plus, pas besoin d’écrire de chapitre de transition. Je pense que cela va en dérouter plus d’un, on a vraiment l’impression que Barjavel a voulu rester dans l’esprit médiéval. D’ailleurs, j’ai été étonné de lire une bibliographie à la fin de ce roman, cela nous montre bien que l’auteur a effectué ses recherches et qu’il a voulu respecter la tradition. Rien de très étonnant venant de Barjavel.
Tout tourne autour de Merlin, on apprend bien qu’il est le fils d’une vierge et du Diable lui-même, et que sans cesse il luttera contre son vilain de père pour faire le bien au nom de Dieu, le père. Dans cette histoire, Arthur ne nous intéresse pas forcément, seulement pour le début et la fin de l’histoire, ensuite cela tourne autour des plus grands chevaliers de la Table Ronde, mais également autour de Viviane une des demi-sœurs du roi légendaire. Excalibur est aussi présente, mais ce n’est pas l’épée légendaire.
Les chevaliers de la Table Ronde reste humains, ils sont tentés et ne sont pas purs. Seul un chevalier, élevé par Merlin et par la Nature elle-même réussira à trouver le Graal et à s’en emparer. On peut donc retrouver l’idée du fait que la société corrompt les hommes et que les hommes élevés par la nature sont purs. C’est un penchant très rousseauiste de Barjavel, mais on pouvait déjà le voir dans Ravage. Ces histoires m’ont plu, j’aime la construction archaïque de ce récit et découvrir ces personnages, ces retournements donne un bon aperçu de la puissance de la plume de Barjavel. Si vous avez aimé la chanson de Roland, si vous aimez être déconcertés par certains ressorts littéraires dont nous n’avons plus l’habitude alors n’hésitez pas. Cela m’a beaucoup fait penser au film Le Chevalier Vert dans sa construction, film que je vous conseille également.