Le siècle de vie est là mais difficile d'en dégager de quelconques leçons. C'est plutôt la fascination qui nous gagne, fascination pour l'écrivain centenaire, de se dire qu'il était adolescent sous le front populaire, qu'il avait déjà presque cinquante ans pendant mai 68 et presque soixante-dix ans à la chute du mur de Berlin. Les seules leçons notables sont ce qu'il appelle ses erreurs, de son pacifisme pré-seconde guerre mondiale à son communisme postérieur à celle-ci. Les erreurs habituelles , les classiques du camp du bien, de ceux qui confondent penser et projection d'un soi-même sublime aux yeux de l'époque.
Je ne dis pas qu'Edgar Morin n'est pas un type intéressant mais ce qui s'annonçait comme la décortication d'une vie pour déduire quelques vérités n'est en réalité qu'une banale autobiographie entrecoupée de réflexion que j'imagine excavée de son œuvre antérieure. Car là est mon problème, je n'ai précédemment rien lu d'autre du sieur Morin, ce qui devant ce résumé et ces leçons me laisse froid. Je ne sais rien de la méthode ou de la pensée complexe si ce n'est les partielles initiations qui se trouvent dans le livre et ça entame sérieusement mon bonheur de lecteur.
Il me semble qu'Edgar Morin ne doit sa notoriété actuelle qu'à sa miraculeuse longévité et d'avoir osé frayer avec Tariq Ramadan et beaucoup moins à son œuvre dont je ne vois personne s'inspirer ni même citer. Et c'est cette notoriété, médiatiquement manipulable comme je le suis, qui m'a donné envie de découvrir ces Leçons d'un siècle de vie ; la porte d'entrée ne fut pas celle d'un palace mais d'une masure.
Pour conclure, l'identité est multiple, la pensée complexe et le destin personnel, chaque être est unique et même si l'expression du poncif nous ridiculise, il n'est pas scandaleux de le proposer, c'est toujours une bonne piqûre de rappel.
J'ai cette fois poussé ma gérontophilie littéraire jusqu'à ses derniers retranchements, au-delà il n'y a plus que les morts.
Samuel d'Halescourt