Les Croix de bois par dodie
Roland Dorgelès s'engagea volontairement dès 1914. En 1919 il publia ce roman: le témoignage poignant d'un combattant de la grande guerre.
Roland Dorgelès ne nous raconte pas sa guerre du début à la fin. C'est un récit par petites touches de l'enfer qu'il connut sur les champs de bataille, l'horreur des tranchées, les nombreuses pertes inutiles pour conquérir quelques mètres. Il n'est pas tendre avec le commandement dans son ensemble qui n'hésite pas à envoyer les hommes à une mort certaine et à fusiller celui qui, abruti de fatigue, refuse d'obéir.
Mais ce sont aussi les temps de repos en arrière des lignes: moments de répit que tous les hommes savourent en ce disant que c'est peut-être le dernier....Ici les plaisanteries et les bouffonneries vont bon train pour masquer la peur et le découragement.
L'écriture de Dorgelès est magnifique ni grandiloquente, ni empesée. Le récit est émaillé de dialogues où l'auteur a su faire ressortir toute la "gouaille" de ces hommes issus de tous les milieux.
Un passage, parmi tant d'autres, pour illustrer ce roman:
"Il me semble que ma vie entière sera éclaboussée de ces mornes horreurs, que ma mémoire salie ne pourra jamais oublier. Je ne pourrai plus jamais regarder un bel arbre sans supputer le poids du rondin, un coteau sans imaginer la tranchée à contre-pente, un champ inculte sans chercher les cadavres. Quand le rouge d'un cigare luira au jardin je crierai peut-être: "Eh! Le ballot qui va nous faire repérer!..."Non ce que je serai embêtant, avec mes histoires de guerre, quand je serai vieux! Mais serai-je jamais vieux ? On ne sait pas...