Les meilleurs films de 2022 selon Edelwice

Annotation :

Annotation : https://www.senscritique.com/activity/773291/43820861

Vu 2 fois

Annotation :

Vu 2 fois

Annotation :

C'était selon moi un des trois films, avec Interdit aux chiens et aux Italiens (qui a eu le prix du jury) et Unicorn Wars, susceptibles d'emporter le Cristal, je ne me suis pas trompé. Récompense méritée pour ce film plein de tendresse sur l'acte de création et le rapport des créateurs à leur oeuvre.

Annotation :

Sublime et bouleversant. Laura Samani signe avec Piccolo corpo un premier long-métrage remarquable en tout point. En s'inscrivant dans l'Italie très pieuse du début du XXème siècle, la cinéaste accouche dans la beauté d'un film qui tient presque du conte, aux accents aussi bien naturalistes que mystiques, voire même fantasmagoriques. J'ai d'ailleurs fait le rapprochement, après coup, avec The Green Knight de David Lowery où il est aussi question d'une quête un peu fantastique et de drôles de rencontres sur le chemin. Les paysages sont magnifiques, la réalisatrice compose de superbes plans-tableaux. J'ai encore en tête les scènes en clair-obscur, comme celle où un des personnages allume un feu, avec son visage à peine éclairé par la faible lueur de la flamme naissante, ou celle dans la montagne où la lumière décline jusqu'à l'écran noir. Piccolo corpo est un voyage sensoriel et contemplatif mais jamais lénifiant, sans doute austère mais jamais froid pour autant, au dénouement ô combien grandiose. La fin, en particulier, m'a en effet profondément marqué et ému. J'étais proche des larmes, chose qui m'arrive pourtant très rarement au cinéma lorsqu'il y a du monde autour de moi.

Annotation :

Qui mieux que Mikhaël Hers pour filmer la sensibilité même ? A part Sofia Coppola, je ne vois pas. Après Ce sentiment de l’été et Amanda, le cinéaste délaisse le deuil traditionnel (qui a trait à la mort) pour s’intéresser à ses émanations et notamment le deuil amoureux, sans doute le mieux illustré ici par la relation entre Talulah (Noée Abita qui joue à merveille la carte de la juvénilité et de la fragilité) et Matthias. Mikhaël Hers dépeint les errances sentimentales de ses personnages tous très humains en rendant la pleine mélancolie poétique de leurs chassés-croisés. Cette tristesse poétique, c’est celle que l’on connaîtra tous un jour ou l'autre, celle d’avoir croisé et aimé (pas forcément romantiquement) une personne à un moment donné de notre vie pour finalement la perdre de vue et/ou ne plus jamais la revoir. C’est beau et déchirant à la fois, car ça a compté mais ça appartient au passé. Les passagers de la nuit célèbre bien sûr la nuit, ce temps un peu à part d’errements et de flottement avant l’aube et le jour nouveau. Il célèbre aussi les rencontres, la compassion, l’amour, bref la vie. C’est un poème languide d’une époque et d’un temps suspendus auquel se mêlent des images d’archive et la magnifique bande originale du film qu'elle vient sublimer comme lorsque Talulah se lève dans la nuit après avoir déliré et erre dans l'appartement. Mon seul reproche concernerait peut-être la prégnance du regard masculin (le fameux male gaze) du réalisateur, pourtant absent de ses deux derniers films. C’est par petites touches par-ci par-là, mais l’extrait de film avec Fabrice Luchini montre bien en quoi cette vision masculine de la femme (vue comme une sorte d’objet virginal dont on ne supporte pas l’idée qu’elle soit touchée, et dire que c'est censé être romantique...) et des rapports hommes-femmes est problématique, d’autant plus que ce n’est pas cet extrait qui est critiqué et moqué par les personnages de Hers mais celui le précédant avec la femme en question.

Annotation :

Le cinéma comme révélateur de ce qui est caché, de la poésie du réel, du beau.

Sous le ciel de Koutaïssi est un poème à ciel ouvert, une douce flânerie, une balade empruntant de nombreux chemins de traverse... Par l'acte cinématographique et notamment un sens du cadrage virtuose avec des angles de vue toujours intéressants dans ce qu'ils montrent et travaillés, le réalisateur saisit au vol la poésie du quotidien, d'une ville filmée aussi bien le jour et la nuit et de ses habitants, bref de la vie et des petits riens qui la font. Les plans sont composés avec brio et sensibilité. Le cinéaste joue avec les codes du cinéma (les séquences muettes) et avec le spectateur. Il ose les longueurs, les détours, il n'y a d'ailleurs pas vraiment d'histoire à proprement parler. Il prend le temps de faire durer les choses, pose sa caméra et laisse les miracles et la poésie opérer sous nos yeux enchantés. Il nous réapprend ainsi à savourer le temps qui passe et ce délicieux sentiment d'attente sans objet. C'est une ode à la vie, et plus précisément à la ville de Koutaïssi et ainsi à la vie, toutes les vies et la magie qu'elle recèle. Un film apaisé et apaisant qui nous laisse avec une impression de grande sérénité.

C'est toutefois clairement un film que j'aurais bien du mal à conseiller et à ne pas mettre devant tous les yeux, un film aussi qui aurait tout à fait pu me laisser indifférent et m'ennuyer mortellement dans d'autres circonstances (par exemple une humeur différente). Ça tient d'ailleurs presque du miracle que je ne me sois jamais ennuyé malgré la durée conséquente (2h30) et des longueurs bien présentes mais jamais éprouvantes.

Annotation :

Un autre monde est le portrait, sombre, d'un monde qui court inexorablement à sa perte. Ce monde, c'est bien sûr le nôtre, et Stéphane Brizé de nous dire ou plutôt de nous montrer que ça ne peut pas continuer comme ça éternellement, qu'un tel monde ne peut pas être viable. Il nous donne à voir une impitoyable machine à broyer les hommes où règnent en maîtres la loi du marché et ses funestes artisans mortifères, les actionnaires-rois.

"J'aime les gens qui doutent, les gens qui trop écoutent leur coeur se balancer. J'aime les gens qui disent et qui se contredisent, et sans se dénoncer."

Un autre monde est avant tout le portrait d'un homme, d'un homme comme un autre avant d'être un chef d'entreprise, d'un homme qui doute. Sauf que le doute n'a pas voix au chapitre, dans un autre monde peut-être mais pas ici. La situation professionnelle de Philippe, magistralement habité par un Vincent Lindon tout en intensité et en profondeur, fonctionne en tandem de celle personnelle du mari et père. Le monde du travail et ses problèmes, quel euphémisme, viennent contaminer la sphère familiale et toute idée de bonheur. Sa femme vit un enfer, leur fils est inadapté à ce monde de la performance. Tout va pour le mieux.

Surtout, Stéphane Brizé fait montre d'une sensibilité cinématographique remarquable, d'ailleurs assez rare dans le genre du drame social, et ce dès le début de son film avec ce contraste saisissant entre les photos de famille que la caméra prend le soin d'observer et la scène qui suit. Comment ne pas citer aussi la séquence où le couple fait visiter leur maison ? Les acheteurs potentiels ne figurent même pas à l'écran, seuls existent les personnages de Vincent Lindon et de Sandrine Kiberlain et le drame qui se joue dans leur vie respective. La certaine longueur de cette scène lui confère toute son importance, il se joue là indéniablement quelque chose de très fort. La séparation actée d'un couple qui s'aime pourtant mais qui se quitte quand même. Enfin, les simples mouvements d'une marionnette qui avance péniblement, associés au monologue de Philippe à un moment charnière du récit, achève de nous bouleverser.
Un grand film qui me donne très envie de découvrir les autres du cinéaste.

Annotation :

Annotation : https://www.senscritique.com/activity/251827110

Annotation :

Annotation : https://www.senscritique.com/activity/249147174

Annotation :

Superbe portrait d'un looser attachant. On le sait, Sean Baker s'attache à filmer les déclassés, les petites gens qui vivent en marge de la société et qui tentent de s'y faire une place tant bien que mal. Mais là où j'avais détesté The Florida Project de par son misérabilisme insupportable, j'ai adoré Red Rocket car cette fois-ci le cinéaste est dans la moquerie, toujours bienveillante, et ça change tout. Il ne juge pas, ne nous dit pas ce qu'on est censé ressentir à l'égard des personnages, il observe simplement, non sans amusement. Dommage pour la fin que je n'ai pas du tout aimée, avec un changement de registre assez déstabilisant, car c'était sinon pour moi un sans faute.

Annotation :

Annotation : https://www.senscritique.com/activity/251809150

Annotation :

Le film s'éparpille parfois (même si ça reflète justement la relation flottante et erratique tout en "je t'aime, moi non plus" des deux personnages), traîne un peu en longueur (globalement les scènes avec les gens qui sont dans le milieu du cinéma), mais Licorice Pizza est surtout cette douce rêverie d'un autre temps, un peu celui de tous les possibles, qui séduit immanquablement par la prestation habitée de ses deux acteurs principaux, sa mise en scène pétillante et ses nombreux plans-séquences (beaucoup aimé celui de Life on Mars) et son dénouement tout en simplicité, car pourquoi se compliquer la vie (le parallèle avec la situation du personnage de Benny Safdie est très pertinent) quand elle peut être simple et belle ?

Annotation :

Franchement ? Peu m'importe que le film ne soit pas subtil pour un sou et qu'il n'y aille pas avec le dos de la cuillère en matière de drame. Certes, la construction et l'escalade dramatiques peuvent sembler exagérées et artificielles, voire même parfois frôler la surenchère (les problèmes d'argent du chef), c'est vrai. Mais seul importe pour moi l'effet produit, et force est de reconnaître que Boiling Point est un film terriblement efficace. J'étais sous tension du début à la fin, et le point d'ébullition / de rupture ne guette pas seulement les personnages mais aussi le spectateur, le réalisateur jouant d'ailleurs très clairement avec ça, à nous faire "bouillir". Dès lors, le tournage en une seule prise se justifie totalement et permet de passer avec fluidité d'un personnage à l'autre, montrant la diversité des métiers de la restauration, du chef au commis en passant par les serveurs et la réceptionniste (une vraie "cours des miracles"), chacun a droit à son moment. La fin est un peu abrupte et déçoit quelque peu, même si le film pouvait difficilement finir autrement quand on pense à la raison d'être du plan-séquence : une soirée infernale et interminable à laquelle on ne peut pas échapper. Une indéniable réussite malgré tout, j'aime ce cinéma puissant et percutant.

Par contre, les bruits ambiants du restaurant au début du film c'est juste pas possible, on jurerait entendre des spectateurs qui parlent dans la salle, ça m'a complètement sorti du truc, heureusement que ça s'estompe ensuite.

Annotation :

Bruno Reidal de Vincent Le Port est une exploration remarquable de maîtrise, mémorable et fort intéressante de la psyché d'un adolescent de 17 ans qui a commis un meurtre. Par le biais d'une voix off très présente, le film s'attache à relater toute la vie de Bruno jusqu'à ce jour, ce moment funèbres. De ses premières masturbations, intimement liées à ses pulsions de meurtre (l'idée de la mort, de la provoquer, est pour lui source de jouissance), à son attirance trouble et souterraine pour les garçons mais jamais reconnue comme telle et encore moins comme la cause de ses pulsions en passant par son rapport à Dieu et aux péchés, aux pensées impures qui l'accablent et contre lesquelles il tente de lutter, et qui font de lui un malheureux digne selon lui de compassion. Jamais complaisant ni condamnatoire dans sa démarche, le film observe, scrute et cherche ainsi à comprendre et à sonder un esprit anormal, déviant et pervers, d'ailleurs jugé malade par la commission qui l'a chargé de rédiger ses mémoires. Les acteurs sont tous excellent, ceux qui jouent Bruno à 6 et à 10 ans m'ont particulièrement marqué tant leur jeune âge rend leur jeu glaçant d'autant plus incroyable. Mais Dimitri Doré ne démérite en rien pour autant ! Un film saisissant dans ses images, qui n'épargnent rien de l'horreur du meurtre (entre autres).

Annotation :

Pour peu que l'on prenne un peu de recul (et on lui doit bien ça), Junk Head est un film absolument fascinant, un ovni d'ailleurs distribué par UFO Distribution en France, merci à eux. Presque l'oeuvre d'un seul homme (c'est autant ce qui fait sa force et sa singularité que sa limite ; comme Shinkai avant lui avec The voices of a distant star, c'est parfois judicieux d'avoir un avis et un regard extérieurs et donc du recul quand on a le nez dans le guidon sur son propre travail), Takahide Hori a en effet travaillé seul sur ce projet pendant 4 ans (sur 7 au total) avant d'être rejoint par une petite équipe pour la fin de la production. Ce film est donc totalement sien, c'est lui qui s'est chargé de la musique, qui a prêté sa voix à la plupart des personnages... Takahide Hori a donné vie à un univers, souterrain et aux multiples dédales, et à des personnages faits de bric et de broc. Le résultat est bluffant et force l'admiration. Si on peut regretter un côté quelque peu répétitif dans la trame scénaristique (le personnage principal tombe et rencontre les habitants du niveau où il a atterri, et ce à plusieurs reprises), la fascination que le film a exercé sur moi n'a jamais faibli. L'univers qu'il met en scène est foisonnant, peuplé de créatures et de monstres en tout genre. J'ai par exemple beaucoup aimé la rencontre du héros avec le "gardien" du feu qui semble tout droit sorti du Petit Prince (l'allumeur de réverbères). Il maintient le feu allumé mais il ne sait pas pourquoi il le fait ni ce qui arrivera s'il venait à s'éteindre. Un monde dépourvu de sens en fait. Nous, on a allumé un feu qu'on sait éteindre, on a les moyens pour, mais qu'on préfère laisser brûler jusqu'à tout consumer, ce n'est pas tellement mieux. Le film est drôle également, il s'amuse notamment des codes du shonen (l'inaptitude du protagoniste au combat) et de la science-fiction (la forme phallique censée détenir les secrets de la reproduction). Dommage que le film se termine en queue de poisson, d'autant plus que la trame narrative se précisait sur la fin (les arbres de vie) et qu'il y avait pas mal d'éléments de foreshadowing (la petite fille). Mais rassuré de savoir que Junk Head a été pensé comme le premier film d'une trilogie, composée d'une suite et d'un préquel si j'ai bien suivi. C'est en tout cas un univers que je suivrai avec grand intérêt et beaucoup de plaisir, même s'il faut attendre 7 ans avant le prochain film.

Annotation :

La Maison est un écrin magnifique dans lequel se déploie toute la beauté macabre et poétique de l'animation en stop motion. Anthologie oblige, les courts-métrages ne sont pas tous égaux et j'ai ainsi moins aimé le deuxième même si sa fin, dans sa vision d'horreur des hôtes de la maison devenus les nuisibles / insectes initialement chassés, est particulièrement saisissante d'effroi. J'ai davantage apprécié le premier en mode conte horrifique où la maison de poupée de la petite fille (premier plan du film) devient un jeu funeste à échelle humaine, avec une ambiance glauque à souhait, croissante et très travaillée, et le dernier pour son côté plus apaisé, contemplatif et surtout plus optimiste, c'est d'ailleurs le plus touchant des trois. Car un foyer c'est plus qu'une maison (faite prison pour tous les personnages du film), c'est ce que l'on en fait et avec qui on le partage. Ça peut être n'importe où, à condition de dépasser sa peur d'aller de l'avant, de l'inconnu.

Annotation :

Séance avec la meilleure ambiance, entre rires jamais réprimés, exclamations tonitruantes et applaudissements enthousiastes. L'impression de voir le réalisateur de Patéma et le Monde inversé et de Time of Eve faire la même chose que Shinkai avec Your Name qui a marqué un tournant dans sa carrière, un certain lissage de ce qui faisait la beauté et la singularité de son style, mais pour un résultat largement concluant et un film galvanisant.

Annotation :

Michel Ocelot fait du Michel Ocelot. Le plaisir est toujours au rendez-vous, le charme suranné et la magie opèrent toujours, mais avec le temps, cela devient peut-être plus sa limite que sa force.

Annotation :

La Légende du Roi Crabe est un sublime écrin, esthétiquement grandiose. Et ce dès la première scène qui en met plein la vue. C'est le genre de film où l'esthétisme importe plus que le récit, évanescent. Et comme il est souvent coutume dans ce cas là (du moins pour moi), c'est ce qui fait sa force autant que sa faiblesse, sa limite, ce qui empêche le film de se transcender. Légendes, contes, histoires, chants et tradition orale se mêlent dans ce film d'un autre siècle. Scindé en deux chapitres, j'ai été davantage happé par le deuxième en mode western et ruée vers l'or aux confins du monde dans un finistère argentin frappé de la majesté de la nature sauvage et inexplorée dans laquelle l'humanité se dilue face à la fièvre de l'or. Si mes yeux et ma sensibilité esthétique ont été indéniablement et grandement ravis, il m'a néanmoins manqué l'émotion et c'est pour ça que dans une veine assez proche, celle du conte naturaliste, j'ai préféré Piccolo Corpo sorti un peu plus tôt dans l'année.