Quand on réchappe à un infarctus alors qu’on n’a que 48 ans, qu’il va falloir réapprendre à vivre, apprendre à vivre « avec », et qu’on est auteur de BD, que fait-on ? On crée un « roman graphique », autobiographique, pour raconter son expérience, bien entendu ! Pour partager sa « sagesse », ou tout du moins ce qu’on a pu apprendre au fil de cette épreuve (qui n’a pas de fin, car il faut ensuite éviter d’en avoir un second !). Ou bien, si on est drôle et peu porté sur les ouvrages d’auto-assistance et de développement personnel, comme Bourhis, on sort un truc plein d’auto-dérision, histoire de rire de ses malheurs. Non ? Et bien pas Bourhis, qui est beaucoup plus « fin » que ça, et qui nous propose avec son Mon infractus (fôte d’orthographe voulue, lisez le livre pour comprendre…), un superbe bouquin sur son expérience de… DJ !

Oh, bien sûr, ce cœur défaillant est là, inévitable dans les premières pages, et puis ensuite, en filigrane, rappelé régulièrement par des titres de chansons, au long des 96 pages réjouissantes qui constituent ce bien bon et beau livre ! Mais, comme on dit, ce qui est important, c’est bien sûr que… la vie continue. Et quand on aime la musique autant que Bourhis (dessinateur ou scénariste, ou les deux, du Stéréo Club, et de bouquins sur les Ramones, sur le Heavy Metal, etc.), on parle de musique, et particulièrement de son expérience personnelle de DJ : car de l’amour du Forever Changes de Love et du Figure 8 d’Elliott Smith, écoutés seul dans sa chambre, Bourhis est passé à la passion – et à l’utilisation massive – de LCD Soundsystem, Fantom, Parvati Khan, The Lemon Pipers ou Ely Camaro pour mettre le feu aux dance-floors provinciaux.

Alors Mon infractus parle plutôt de ça, de cet amour de la musique, du partage, de la communion avec des inconnus (parfois envahissants et pénibles) au cours de soirées explosives (ou ratées, bien sûr). Et aussi, et c’est sans doute là qu’il est le plus touchant, de l’amitié, de l’admiration, du respect, du partage. De tout ce qui fait que la VIE vaut la peine d’être vécue, même si elle est forcément brève. Et même si, un jour, la musique s’arrêtera.

Mais, en attendant ce jour funeste, réjouissons-nous en lisant Mon infractus, et rappelons-nous que, tous les soirs, il y a quelque part un DJ au cœur fragile qui peut nous sauver la vie.

[Critique écrite en 2024]

https://www.benzinemag.net/2024/05/16/mon-infractus-de-herve-bourhis-last-night-a-dj-saved-my-life/

EricDebarnot
8
Écrit par

Créée

le 16 mai 2024

Critique lue 12 fois

1 j'aime

Eric BBYoda

Écrit par

Critique lue 12 fois

1

Du même critique

Les Misérables
EricDebarnot
7

Lâcheté et mensonges

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...

le 29 nov. 2019

204 j'aime

152

1917
EricDebarnot
5

Le travelling de Kapo (slight return), et autres considérations...

Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...

le 15 janv. 2020

190 j'aime

105

Je veux juste en finir
EricDebarnot
9

Scènes de la Vie Familiale

Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...

le 15 sept. 2020

187 j'aime

25