De ses débuts en 1964 à 1972, David Bowie n'a connu qu'un seul succès, limité au Royaume-uni : "Space Oddity" en 1969. Ses albums suivants (David Bowie (1969), The Man who Sold the World (1970) et Hunky Dory (1971) ), pourtant de plus en plus réussis n'ont eu aucun succès, malgré une bonne presse. Pour le public anglais, Bowie était synonyme de "Space Oddity". Point final. Ailleurs, personne ne savait qui il était ; ou qu'il existait tout simplement.

L'idée répandue selon laquelle il est devenu célèbre grâce à "Space Oddity" qui a été utilisée pour illustrer les reportages de la mission Apollo en juillet 1969 ne concerne que la BBC et le Royaume-Uni.

Puis "Changes" (extrait de Hunky Dory) est paru en janvier 1972 et a commencé - timidement - à attirer l'oreille. Plus fort encore, trois mois plus tard, c'est "Starman" qui atteint les ondes et là, tout change radicalement. Bowie apparaît à Top of the Pops entouré des Spiders From Mars pour jouer le morceau à la TV. Fini le look de folkeux aux cheveux longs et les robes d'homme. Il apparaît en costume lamé vert émeraude et les cheveux courts, colorés en rouge. Avec Ronson, ils prennent des poses ouvertement suggestives et il n'en faut pas plus pour créer le choc attendu.

Deux mois plus tard sort THE RISE AND FALL OF ZIGGY STARDUST AND THE SPIDERS FROM MARS qui fera enfin de Bowie une star.

Enregistré principalement en novembre 1971, il devait à l'origine s'intituler ROUND AND ROUND d'après le titre d'une chanson de Chuck Berry qui était dessus, mais qui a été retirée pour céder sa place à "Starman" à la demande de RCA qui voulait un tube. "Velvet Goldmine", "Holy Holy" et "Amsterdam" ont également été retirées pour céder leurs places à "Suffragette City", "Rock 'n' Roll Suicide" enregistrées en janvier 1972 (avec "Starman") et "It Ain't Easy".

Ce qui permet d'ailleurs de montrer que le prétendu concept de ZIGGY STARDUST est un enfumage digne de celui de SGT. PEPPER. Si on peut effectivement trouver des thématiques qui vont dans le sens dudit concept dans certaines chansons, pour le reste, l'argument du "concept-album" est surtout un outil marketing. "Moonage Daydream" et "Hang onto Yourself" avaient déjà été enregistrées pour Arnold Corns (obscur groupe prête-nom de Bowie) au début 1971, "It Ain't Easy" est une reprise de Biff Rose récupérée des sessions de Hunky Dory. Quant à "Starman", elle a été écrite/enregistrée vite-fait, puis ajoutée au dernier moment pour faire plaisir à RCA qui n'était pas convaincu par la version de l'album présenté en décembre '71. Elle ne parle pas du tout de Ziggy.

"There’s always been this whole thing about Ziggy being a concept album, but it really wasn’t. There are only two rock albums that I would 100% consider concept albums : Tommy and Quadrophenia by The Who, and that’s because they were written as a complete piece, whereas Ziggy was just a patchwork of songs. Yes, they fit together very well and one can weave a story from some of them, but when you consider that ‘Round and Round’ was originally there in place of ‘Starman’, it doesn’t make much sense as a concept. How does ‘Round and Round’ ever fit into the Ziggy story ? It’s a classic Chuck Berry song. How does ‘It Ain’t Easy’ [reprise de Biff Rose] fit in with the Ziggy concept ? That was taken from the Hunky Dory sessions. All this about Ziggy being ‘Starman’ is bullshit. It was a song that was just put in as a single at the last minute at the record label’s insistence. So while it’s true that there were a few songs that fitted the ‘concept’, the rest were just songs that all worked well together as they would in any good album." (Ken Scott, co-producteur)

Mais ce qui compte avant tout est que ce disque va enfin permettre à Bowie de déployer ses ailes et pouvoir par la suite exprimer au mieux son talent dans des œuvres mieux conçues que celui-ci (excellent au demeurant) mais qui ne fait finalement que ressusciter le bon vieux rock'n'roll des fifties à la sauce glam de Marc Bolan.

L'enchaînement d'ouverture ("Five Years"/"Soul Love"/Moonage Daydream") est énorme. Les couplets de "Starman" m'ont toujours énormément plu (c'est ce qui m'a fait "tomber" dans la musique Bowie quand j'étais ado), mais les refrains m'ennuient deux fois sur trois. "It Ain't Easy"... Sérieux ? Pourquoi être allé récupérer ça et ne pas avoir gardé cette merveille de "Velvet Goldmine" ou "Looking for a Friend" ? Je ne comprendrai jamais ; ou "Sweet Head" (qui, pour le coup, servait le concept). Mais bon, là les paroles étaient trop choquantes pour l'époque.

"Lady Stardust", dédiée à Marc Bolan et retitrée ainsi pour coller à l'illusion du concept (elle s'appelait en fait "He Was Alright" à l'origine) est une ballade trop maniérée et boursouflée, genre "sirop pour adolescents qui veulent emballer en boums". Là aussi, c'est dommage de ne pas avoir gardé la splendide "Shadow Man".

Ensuite, on revient au rock'n roll ("Star"/"Hang on to Yourself") pour terminer avec les classiques "Ziggy Stardust"/"Suffragette City" et "Rock 'n Roll Suicide".

Un très grand disque donc, malgré deux faiblesses qui aurait pourtant pu être évitées et donner un vrai chef-d’œuvre.

"Round and Round" est finalement parue en face B de "Drive-in Saturday" en avril 1973, "(Port of) Amsterdam" en face B de "Sorrow" en septembre 1973, "Holy Holy" en face B de "Diamond Dogs" en juin 1974 et "Velvet Goldmine" en face B de la réédition en maxi de "Space Oddity" en septembre 1975, contre l'avis de Bowie.

Muffinman
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le 14 avr. 2024

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