Il semble assez surprenant, pour une oeuvre qui se veut "érotique" (c'est léger) et "féministe (mais qui ne l'est pas) de commencer le récit de la relation entre les deux personnages par... Un viol ! Rien que ça ! Étrange également, au vu des autres critiques publiées, que personne ne le mentionne...

Le pitch : Béatrice travaille dans une grande entreprise, son patron est riche, son collègue au poste équivalent est un homme et, par toute logique (!), c'est lui qui obtiendra la prochaine promotion et le salaire qui en découle. SAUF QUE, Béatrice est révoltée de ce traitement sexiste. Son patron lui propose de passer la soirée avec lui puis de coucher avec lui ("chez elle parce qu'il est un homme marié") en échange de cette promotion qu'il n'a pourtant pas l'intention de lui offrir. SAUF QUE, Béatrice se révèle ne pas être ce qu'elle paraissait et son patron est pris au piège. Elle est en réalité une femme qui n'a pas complètement transitionné (nous passerons sur le traitement très grossier) et souhaite faire subir la même chose à son patron qu'elle transforme en femme et qui deviendra sa femme de ménage, à son service.

Là où ça devient problématique : Jusque là, le scénario pouvait se tenir, et libre à ceux qui le souhaitent d'apprécier ou non l'histoire. Se pose pourtant un vrai problème : sous prétexte de vouloir "intervertir" les rôles (la femme devient homme et l'homme devient la femme), sous prétexte de vouloir "faire prendre conscience à l'homme les difficultés d'être une femme", l'auteur nous figure un viol d'entrée de jeu et ne le présente jamais comme tel. Il en sera suivi d'autres au cours de l'histoire...

p.13-15 : l'homme transitionne et devient une femme. Il est couché sur le lit, on lui écarte les jambes, son regard et terrifié. Le viol se déroule tranquillement p.15 et, p.16, son visage est de nouveau terrifié.
p.62-67 (je passe plusieurs rapports qui ont eu lieu entre temps) : Gisèle (le-patron-devenu-femme) affirme à plusieurs reprises son refus "Non ! Je pas aimer ça ! Je forcée", "Non !", "Je rien sentir !", "Tu savoir je détester..." (à savoir, faire une fellation), "...Non..", "Noooon !". Béatrice lui répète de cases en cases qu'elle aime ça, qu'elle fait semblant de se débattre et qu'en réalité elle prend du plaisir (quel argument !) : "Ose encore prétendre que tu n'aime pas ça" auquel Gisèle répond : "Je simuler".
p.76 : Gisèle donne sa version des faits : "Béatrice utiliser moi comme jouet érotique, tous les jours, depuis début !", "Et moi toujours résister... Je dire non... je bagarre... je protester... Mais..." Plusieurs autres "non" suivent.

À propos du dénouement

Étrangement (non), la victime s'amourache de son bourreau, du violeur, et souhaite faire sa vie avec... Pourtant, alors qu'il redevient un homme, il n'hésite pas à quitter Béatrice, en douce, à un moment où elle ne pourra pas le retenir, et reprendre sa vie d'homme.

Alors, j'ai bien conscience que c'est une histoire, inventée, qui se veut "érotique"... Mais pourquoi retenir en otage une femme qui ne le souhaite pas ? Qui tente de s'échapper à plusieurs reprises ? Qui est sous surveillance constante ? Pourquoi la faire "tomber amoureuse" de son bourreau parce que les autres personnes étrangères sont pire les unes que les autres ? Pourquoi nier son consentement et la forcer à avoir des rapports sexuels ? Pourquoi nier son consentement et la forcer à avoir des rapports sexuels réguliers en voulant lui "faire aimer ça" ?

Sur l'idée de base "un homme devient une femme pour le plaisir sexuel d'une autre", un tas de scénarios auraient pu exister et rester crédibles... Dommage de se servir de viols constants comme exemple. Je m'interroge également sur le fait que personne d'autre n'ait soulevé le problème jusque là.

Pour finir et pour rappel, du moment qu'il y a refus du consentement (les "non" très fréquents prononcés à chaque fois suffisent), il s'agit bien d'un viol.

Activité sur Gisèle & Béatrice