Écoutez... Vous semblez avoir des ennuis. Puis-je vous aider ? Mon nom est Ric Hochet , je suis journaliste et...

Un journaliste ?! Je vous en supplie, rien de tout ceci dans votre journal !

C'est promis, vous avez ma parole ! Mais pourquoi vous acharniez-vous à poursuivre cette voiture bleue ?

Mon... Mon fils Marc... Il a été enlevé par deux hommes masqués qui l'ont emmené dans cette auto, au moment où je rentrais chez moi...

Quoi ?!

Un peu d'histoire

Les débuts de Ric remontent à 1955 avec la première version du héros que l'on devait au scénariste André-Paul Duchâteau qui fit apparaitre Ric sous la forme de deux petites histoires dans le Journal de Tintin où celui-ci incarnait un vendeur de presse confronté à diverses énigmes. Le concept disparaît aussitôt avec le départ de Duchâteau, jusqu'en 1958 où Gilbert Gascard dit ''Tibet'' (surnom affectueux qu'il doit à son frère aîné Pierrot qui enfant déformait le prénom de Gilbert en prononçant '' Ti...bet '' et qu'il a maintenu depuis lors) qui en voyant le succès d'une émission télévisée policière : '' Les Cinq Dernières Minutes '', à l'idée de remettre au devant de la scène le projet '' Ric Hochet '' en surfant sur cette vague romanesque qui invite les spectateurs à résoudre eux-mêmes les énigmes. Une idée brillante qui marque le retour de Duchâteau qui devant le projet de Tibet accepte de faire équipe. Ainsi voit venir la rubrique '' Relevez le gant ! '', où le lecteur est plongé dans des petites énigmes accompagnées de Ric Hochet où ceux-ci doivent eux-mêmes élucider les enquêtes. Devant le succès de cette rubrique, le Journal de Tintin propose aux deux auteurs de développer plus largement leur personnage à travers une aventure qui lui serait propre. Dans un premier temps quelques nouvelles sont présentées à la direction qui finit d'être convaincu, c'est ainsi qu'en 1961 voit venir les deux premières aventures de Ric Hochet : '' Signé Caméléon '' et '' Traquenard au Havre. '' Deux histoires qui forment là les premières aventures du journaliste Ric Hochet qui seront en 1963 rassemblé dans un seul album afin de marquer le démarrage d'une vaste saga de 78 tomes.

Signé Caméléon, (6/10)

'' Signé Caméléon '' présente une intrigue policière où Ric se retrouve confronté à un obscur antagoniste voulant compromettre le commissaire Bourdon à travers une série d'événements mystérieux autour de trois cambriolages introduisant plusieurs personnages dont le fameux Caméléon qui signe ses crimes de son symbole. Dès la première page le lecteur se retrouve capté avec une tentative de meurtre sur Bourdon dans le centre de Paris devant les yeux stupéfaits de Ric Hochet qui prend l'affaire en main. Une intrigue classique qui avance vite par le biais d'une petite enquête à laquelle on se prend aisément avec un jeu de fausses pistes autour de plusieurs suspects qui sont soupçonnés tour à tour, le tout appuyé par de nombreux moments de tension. Des bagarres aux poings, des courses-poursuites et des pièges infernaux... Une petite entrée en la matière honnête bien qu'un peu simpliste malgré un bel effort Hitchcockien lors de la scène du magnétophone dans le bureau du patron de la PJ. Une première enquête qui n'échappe pas à certaines facilités narratives mais qui a le mérite de poser son concept avec une flopée de personnages ayant de vrais gueules comme l'inspecteur Ledru, l'inspecteur Manière, Otto Nader l'as des perceurs de coffres, ou encore Jo-le-colosse, sans oublier Bourdon et Ric Hochet. Une petite virée tendue dans Paris avec une grosse interrogation autour du spectre de Pierrot Volcan qui nous conduit à la découverte des bureaux de la police judiciaire dans lequel on rencontre le chef de la PJ, du Bowling-Palace, ou encore de l'entreprise Fourrures en gros Zadim, pour s'achever sur un final enflammé dans le bungalow de campagne du commissaire Bourdon à Chevreuse.

Classique mais efficace.

Traquenard au Havre, (7/10)

'' Traquenard au Havre '' pose son enjeu autour de l'enlèvement du jeune Marc, fils de Paul Chevalier, un armateur havrais que Ric rencontre lors d'un accident de voiture. Ric apprend alors le rapt de l'enfant et l'interdiction du père à prévenir la police. Il n'en faut pas plus au jeune journaliste pour se lancer dans une course-poursuite contre la montre où celui-ci devient le négociateur et la mule d'une rançon de 200 000 dollars (pourquoi Dollars et pas Francs ?). Une aventure qui avance à mille à l'heure imprégnée d'un bon suspense où l'action ne cesse de s'enchaîner avec de nombreuses confrontations au corps-à-corps laissant place à quelques fusillades dont une séquence d'infiltration et de fuite plutôt entraînante. On rencontre un commissaire Bourdon secondaire qui laisse pleinement la lumière à Ric qui brille de courage dans cette affaire comprenant en plus de Paul Chevalier, Monsieur Doyen, Boxeur et Carreau. Vu le peu de personnages mis en scène dans cette intrigue, on devine malheureusement très vite l'identité du kidnappeur. Les dessins sont ici plus soignés à travers un style beaucoup plus engagé dans son contraste avec des beaux décors du Havre pour un centre-ville bien illustré avec des lieux intelligemment représentés comme les quais d'un port inquiétant avec l'infiltration sur le bateau Marie Jeanne, ou encore les paysages du bocage normand avec la chasse à l'homme dans le village lugubre et menaçant des pêcheurs avec ses falaises et ses plages sinistres via une atmosphère nocturne ténébreuse saisissante.

Une amélioration visuelle appréciable !

Ric Hochet

Ric Hochet ayant commencé en tant que jeune enfant libraire dans ses premières aventures dans le Journal de Tintin, revient ici dans une forme très noble encore peu creusée sous la forme d'un boy-scout qui n'est pas sans rappeler ce cher Tintin mais aussi Dave O'Flynn, autre héros de Tibet sortie en 1950. Un journaliste téméraire à mèche blonde (qu'il n'a pas encore à ses débuts) possédant un esprit de déduction incroyable, une vaillance inébranlable, un profond sens de l'amitié, dont une chance qui ne cesse de l'accompagner. Malgré les ressemblances évidentes, Ric Hochet est un véritable plaisir à suivre car il incarne la figure moderne (pour l'époque) d'un Tintin plus mature résolument plongé dans un univers plus sombre et réel. Un personnage emblématique avec des failles que l'on découvrira à mesure avec sa bouille inspirée de l'acteur français : ''Gérard Blain.'' Parler de simple plagiat serait mal connaître l'ensemble des protagonistes de cette saga qui à travers les volumes nous offrirons quelques belles surprises.

CONCLUSION :

Que ce soit Signé Caméléon ou Traquenard au Havre, Gilbert Gascard dit ''Tibet'' en duo avec André-Paul Duchâteau propose deux enquêtes palpitantes malgré des facilités scénaristiques évidentes qui font de ce premier album officiel des aventures du journaliste Ric Hochet une œuvre avec du potentiel. Un premier tome qui laisse de belles promesses à venir avec une technicité détaillée déjà intuitive autour de dessins réalistes autant avec les visages que les décors, avec de belles illustrations d'automobiles comme la Citroën DS, la Traction Avant noire d'avant-guerre, la Corvette, la Berline américaine ou encore la fameuse Porsche jaune de Ric, le tout avec une efficacité évidente à mettre en scène les phases d'actions en mouvement. Deux intrigues policières dans lesquelles on se prend allègrement à résoudre les enquêtes par le biais d'une action généreuse appuyée par des personnages sympathiques et des dialogues particulièrement savoureux de par certains mots employés qui nous renvoient à une vieille France que j'aime beaucoup.

Un bon début avec un travail de surface soigné !

Bien dormi, commissaire ? Désolé de vous annoncer une mauvaise nouvelle, mais à six heures exactement, votre pavillon prendra feu !

Mais vous êtes fou ! Qu'est-ce qui vous prend ? Allons, déliez-moi !

Vous n'avez pas encore compris ?! Je suis Caméléon !

Ce n'est pas possible ! Pas vous !!!

Activité sur Traquenard au Havre - Ric Hochet, tome 1