Ça fait 20 ans que je fais ce métier moi, tu crois que tu sais tout, mais tu sais rien. Tu ne sais pas ce qu'on a vécu là-bas ! Tu ne sais rien des quartiers Nord ! On a failli crever là-bas !

Petite mise au point avant de commencer

Avant d'attaquer la critique n'oubliez pas qu'il ne s'agit que d'un film, c'est pourquoi on va commencer par rigoler un bon coup tous ensemble afin d'exorciser toutes les tensions véhiculées par des stupidités qui ont été dites autour de cette œuvre : film de droite, d'extrême droite, pamphlet pro-flics, oeuvre qui fait le jeu du FN/RN juste avant les élections présidentielles, long-métrage raciste envers les étrangers... '' J'en pleure de rire. " Ce genre de démago à deux balles est encore pire que les éléments proférés. On nous prend vraiment pour des guignols incapables de la moindre réflexion. C'est sûr que des flics qui s'en prennent à des trafiquants étrangers c'est forcément des vendus, corrompus et racistes. Pauvres racailles qui ne faisaient que dealer leur came tout en s'en prenant à des innocents et qui ont été stoppé par des flics : " méchant policier, ce n'est pas gentil, vous êtes des racistes, des fachos. "

Un film qui parle des flics à Marseille contre une forte délinquance, obligée c'est forcément un sujet pro front national (rassemblement national), ou de droite, car en vrai tout ceci n'existe pas du tout pour ces messieurs dames de la gauche (percevez mon ironie). Les zones de non-droit c'est faux. De même qu'une population qui se fait maltraiter par ces crapules, au même titre que les flics qui sont livrés à eux-mêmes à cause d'un gouvernement poltron : tout ceci est illusoire, ce n'est que dans notre imagination collective, voyons. Ah là là, cette vision fantasmée et moralisatrice me fait toujours aussi doucement sourire.

Bien entendu on peut totalement ne pas adhérer à ce film et le détester pour x raisons, ce n'est absolument pas cela que je remets en cause ici et maintenant, non. C'est cette propension à vouloir à chaque fois tout justifier par la politique, le racisme, la haine, chaque fois qu'il est question d'une police qui fait simplement son travail m'agace. Oui, il peut y avoir des flics ripoux mais le sens inverse existe également, heureusement la majorité ne le sont pas. Et puis un moment donné pouvons-nous tout simplement profiter d'un film policier sans qu'on vienne nous casser les oreilles avec ça. Ce film ne se présente à aucun moment comme une œuvre devant répondre à toutes les questions ambiguës autour d'un tel sujet, il se contente simplement de délivrer une histoire.

Voilà ! Maintenant que tout est dit et que la moitié des personnes me détestent on peut commencer, sachant que moi de mon côté : '' Je vous aime mes amours ! Que la paix soit avec vous. ''

Il y a plus aucune règle. Il y a plus de flics. Il y a plus de politiques. Il y a plus personne.

En avant pour mon avis

BAC NORD est un tour de force réalisé par Cédric Jiménez qui présente un film qui n'attise pas la haine contre l'autre mais qui montre simplement la haine de ce monde en abordant un thème régulièrement sujet à beaucoup de controverses et d’amalgames. Le cinéaste s’évertue à montrer sans concessions le quotidien des flics de la BAC en écorchant vif le spectateur par le biais d'un cri d'alarme sur les conditions désastreuses d'une police totalement abandonnée par le gouvernement et livrée à elle-même face à des quartiers de non-droit où le temps est figé de tous éléments extérieurs. Jimenez prend une véritable prise de risque en adaptant librement une histoire vraie particulièrement sensible autour d'une brigade anticriminalité des quartiers nord de Marseille qui se retrouve plongée dans une affaire de corruption. À bien des égards, en plus du spectacle proposé, BAC NORD est un éveilleur de conscience permettant au spectateur pas du tout au courant de comprendre certains éléments des aspects compliqués et difficiles auxquels les représentants de l'ordre sont confrontés. Pour autant, le film n'est pas complètement nihiliste ni pessimiste puisque l'on explore également la tolérance au même titre que l'intolérance, l'amour au même titre que la haine. En gros, c'est criant de vérité et c'est ce qui fait la force de cette œuvre au sujet intemporel.

La réalisation est habilement gérée faisant appel a une excellente distribution technique qui parvient à créer une atmosphère suffocante, intense et incontournable comme lors de la séquence où toutes les brigades de la BAC prennent d'assaut un des fameux quartiers de non-droit. Une scène haletante d'une efficacité monstrueuse qui nous cloue littéralement à notre fauteuil de par son intensité et sa brutalité. Plusieurs séquences de ce type se présentent à nous, nous faisant passer par une pléthore de sentiments comprenant : l'incompréhension, l'injustice et la colère, notamment lors du dernier acte. Car BAC NORD est un film policier implacable qui se scinde en deux parties, la première qui se déroule tel un film d'action brutal, alors que la seconde, se pose tel un drame éprouvant et injuste. Mais dans les deux cas, l'hyperréalisme reste constant avec des répliques percutantes et abondantes. Même la bande-son de Guillaume Roussel est au top, venant de parfaitement alimenter les différentes étapes du film avec une bande-son finale particulièrement adapté au spectacle.

Le récit est habilement construit sur le cheminement psychologique des personnages qui vont connaître des moments terribles les amenant à douter de tout. Les personnages sont riches et montrent diverses facettes plus ou moins subtiles et nuancées. Pour offrir de telles incarnations il faut d'excellents comédiens, ce que le film a parfaitement su proposer. Les performances des comédiens sont exceptionnelles ! Commençons par Gilles Lellouche en tant que Greg qui m'a collé une véritable baffe tant il est possédé par son personnage charismatique. Certainement sa meilleure performance. Karim Leklou pour Yass que je découvre pour la première fois m'a laissé une remarquable bonne impression. François Civil alias Antoine qui clairement nous fait penser à un Antoine Griezmann un peu plus baraqué amène lui aussi une belle performance en offrant une jolie dualité amoureuse avec son indic incarné par Kenza Fortas qui s'en sort également très bien. Cyril Lecomte avec son accent offre un rôle à la hauteur de son talent qui va venir considérablement changer la donne des choses : en bien, ou en mal, ça c'est à vous de le découvrir. Je terminerai par Adèle Exarchopoulos qui offre un petit rôle très sympathique amenant un peu de douceur dans ce monde de brutes.

CONCLUSION :

BAC NORD de Cédric Jiménez est un grand film qui présente une réalisation digne des plus grands cinémas du genre avec des acteurs d'une incroyable authenticité qui détruisent tout sur leurs passages par le biais d'un drame social au sujet chaotique voué a de nombreux débats houleux mais certainement nécessaires, bien que l'intention de cette œuvre soit autre part.

Un film coup de poing spectaculaire, intense, brutal, puissant et émouvant, à couper le souffle. Préparez-vous au choc.

Tu sais quoi ? On sert à rien. On sert plus à rien. Les habitants du quartier ils n'ont même plus espoir qu'ont viennent les aider, c'est fini. Depuis que je fais ce métier, moi je le fais, moi je comprends pas. Je comprends pas comment on en est arrivé là, en fait.

Activité sur BAC Nord