J’ai lu le livre du coup j’avais déjà mon idée du truc (j’avais déjà compris que ça se passait pas du tout en Jamaïque, ce qui n’est pas donné à tout le monde).

De base l’histoire est simple : Mary devient orpheline. Sa mère lui dit qu’à sa mort elle doit rejoindre sa tante qu’elle n’a pas vu depuis une dizaine d’années. À son arrivée elle trouve sa tante défraîchie et apeurée avec son mari brutal et inquiétant.

Spoil, c’est un naufrageur à la tête d’une bande de malfrats qui fait en sorte que des bateaux viennent s’échouer contre les falaises pour piller ce qu’ils transportaient tout en s’assurant que personne ne survive au naufrage.

L’histoire est simple donc qu’il y ait des changements/des ajouts ça peut être sympa mais ceux constatés n’apportent rien et brouillent même à mes yeux les motivations des personnages. Dans l’ensemble ça me paraissait pas crédible (et chiant).

Tante Patience (quel nom ignoble) : dans le livre c’est une femme qui n’a jamais cessé d’aimer son mari violent bien qu’elle devine ses méfaits. Elle se renferme dans sa chambre pour chialer, tente de sauver pitoyablement les apparences devant Mary pour la protéger tout en étant incapable d’agir à quelques niveaux que ce soit. C’est la passivité. Elle est tellement faible qu’elle n’inspire que de la pitié qui dérive souvent vers le dégoût qu’inspirent les larves. C’est elle qui tient Mary en place à l’auberge.

Du coup dans la mini-série j’ai plus l’impression qu’ils ont mis un peu plus de Serpentard en elle. Elle participe activement et de bon gré aux naufrages en récupérant les marchandises et se projetant allègrement avec des soieries pour se faire de nouvelles robes. Elle semble mesquine et vile. Donc je vois pas en quoi ça inciterait Mary à la protéger. Elle la connaît à peine et s’il s’avérait qu’elle était aussi pourrie de l’intérieur que son mari y aurait moins de cas de conscience à avoir.

Joss Merlyn, l’oncle : dans le livre on le voit comme ces ivrognes bruyants. Ceux qui ont l’alcool joyeux mais d’une joyeuseté inquiétante. Qui peuvent dire/faire les pires choses avec un sourire carnassier et en se nourrissant de voir la crainte qu’ils inspirent. Tellement sûr de lui qu’effectivement il ne craint pas Mary qui a tendance à aller au bout de sa curiosité alors que dès son arrivée il l’a prévenue qu’elle devait rester dans sa chambre le soir et ne pas regarder par la fenêtre quand elle entendrait des carrioles dans la cour. Tout en ayant parallèlement du respect pour l’aspect « famille » de Mary (puisqu’il ne fait pas trop de chichis à l’accueillir au final).

Dans la mini-série ils ont enlevé l’aspect dérangeant de la grande gueule charismatique. Ils ont trop misé sur le mystérieux torturé qui boit pour oublier. Je pense que c’est une de ses facettes mais c’est bon, personne lui a mis le couteau sous la gorge (malgré le commanditaire qui est le mystère dans l’histoire). L’acteur m’agaçait, ça faisait pas si naturel son froncement de sourcils permanent. « moi je suis ombrageux, moi j’ai vu des choses, moi je suis torturé, moi je suis un dur », je sais pas, pour moi c’était pas crédible et too much. Puis je vais même pas parler des scènes gênantes avec Mary dès le départ où il lui fait mordre sa main ou quand il se met à genoux pour pleurer dans ses jupons. J’avais plus l’impression qu’ils voulaient mettre de la tension quant à une éventuelle attirance mais c’était pas clair et ça ne menait sur rien. Le tout était pas complètement hors de propos mais ça le rendait moins imposant. Limite juste une victime alors que pour moi cet aspect de Joss devait vraiment venir sur le final lorsqu’il craint de se faire zigouiller par l’inconnu bien placé qui tire les ficelles. C’est à ce moment qu’on doit voir que ce n’était qu’un troufion et qu’il devait perdre de sa superbe.

Jem Merlyn, rien à dire. On peut pas dire qu’il était si transcendant dans le livre. Sa relation avec Mary n’est rythmée que par les non-dits pour faire durer l’histoire et avoir notre content d’intrigue amoureuse.

Mary Yellan… Hum, au final elle était pas SI mal mais décrédibilisée par ce qui a été fait des autres personnages. Dans le livre c’est un peu une fille lambda. Elle surpasse ses peurs en laissant cours à sa curiosité sur les activités de son oncle. Comme lorsqu’elle regarde par la fenêtre un soir alors qu’elle n’aurait pas dû. Tu te sentais dans ces situations où tu dois pas regarder mais c’est plus fort que toi et plus tu te dis que tu dois pas et plus tu restes regarder. Mais le livre était pas tombé dans la facilité de la mini-série, personne n’avait levé les yeux vers l’étage pour la voir espionner. Dans la mini-série Joss la surprend et au final osef puisque dedans il lui avait pas interdit de regarder. Pour autant ça ne prête pas tant à conséquences.

Et du coup Mary accède à toutes les réponses très rapidement et accepte tout tout aussi vite alors qu’elle voit que sa tante est corrompue, que Joss se cache pas de ses trafics et alors qu’elle pourrait le dénoncer. Elle participe même elle aussi à récupérer de la marchandise pour faire ensuite la sainte-nitouche dégoûtée par sa tante qui est contente d’avoir un tissu venant de Chine.

Donc elle a beau faire la mère-la-morale tout du long à mes yeux c’était déplacé et n’aidait pas à comprendre ses choix ou comment elle vivait avec ce qu’elle savait.

Maintenant les ajouts de personnages :

- la sœur du vicaire d’Altarnun : Aucun intérêt. En plus l’actrice a tellement une vibe de serpent que pour moi ça vend la mèche sur l’identité du grand méchant loup. Pas compris l’apport.

- le prétendant de Mary dans sa ville natale : deux scènes rajoutées pour prendre acte de son existence et faire genre que y a un choix à faire entre lui et Jem Merlyn. Je trouve ça nul. Ok l’aspect amoureux est simple dans le livre mais ça ne fait pas de mal. Ça m’horripile cette manière de vouloir créer une rivalité dans l’esprit de Mary entre deux prétendants. Dans la série à la fin elle s’apprête à partir avec l’amour de jeunesse mais choisit Jem quasi juste par esprit de contradiction parce qu’elle surprend une conversation dans laquelle des gens disent que Jem n’était pas assez bien pour elle et que jamais elle ne descendrait si bas. On dirait que c’était indispensable pour les scénaristes d’avoir un concurrent à écraser pour rendre son choix mignon ou profond. On le voit dans toutes les œuvres et c’est pas un mal mais pour une fois que ça change je ne vois pas pourquoi revenir sur un truc standard.

Dans le livre le choix qu’elle fait c’est + entre retourner dans sa ville natale parce qu’elle connaît des gens donc pourra être hébergée, c’est la sécurité ; ou suivre Jem qui est l’inconnu, qui n’a pas de grandes ambitions ni l’intention de se poser et juste le suivre parce qu’elle en a envie. C’est pas grandiose mais ça change. Il a vraiment rien de matériel à lui apporter.

Pour les points positifs (même en ayant lu le livre), on retrouve quand même bien les vibes de ce genre d’histoires d’époque adapté par la BBC. Le cadre, les paysages, les décors rustiques, le vent, la pluie, les chevaux (oh bah faut pas grand-chose vous savez). Comme les adaptations de Dickens ou Austen j’aime toujours un peu.

Activité sur Jamaica Inn