Artistiquement irréprochable, Jusant déploie une fable solitaire où la narration se construit au contact d’un environnement vertical. Tout est ordonné autour d’un but simple : grimper au sommet. Hormis une sorte de blob, on ne rencontrera personne sur notre route, si ce n’est des notes laissées çà et là (écrites dans une typographie horrible, on dirait du Calibri lorsqu’on ouvre Word). Toute la force du jeu réside dans son univers unique et ses six biomes, chacun doté d’une forte personnalité. Rien à redire sur sa beauté formelle.

Bien que Jusant cite Ico et même Shadow of the Colossus (notamment le moment d’escalade sur la baleine), le jeu m’a laissé une impression plus proche de Journey ou Stray : un jeu narratif court, conçu pour un large public. Même si j’ai adoré les six heures passées sur Jusant, je dois admettre qu’à l’instar des deux jeux précités, je reste sur ma faim. En termes de gameplay, l’expérience est très dirigiste, avec très peu de liberté. J’ai souvent eu l’impression de traverser trop rapidement ces décors sans réellement pouvoir en profiter. Jusant semble avoir la taille d’un open world d’il y a 20 ans, pourtant on le parcourt en mode « go-go-go ». Hormis quelques zones secrètes, il y a peu d’incitations à explorer. Une fois de plus, les jeux courts me laissent une impression de gâchis de moyens.

Je trouve également que les mécaniques d’escalade sont intéressantes, mais sous-exploitées. Il est clair que Jusant ne souhaite pas être une simulation d’escalade, mais je trouve dommage qu’il faille attendre le tout dernier niveau pour se rendre compte qu’il est nécessaire de gérer le déploiement de la corde, car elle a une longueur maximale. Peut-être que je pinaille, mais je trouve regrettable que le jeu ne m’ait globalement pas plus challengé. On oublie malheureusement plus facilement un jeu trop facile qu’un jeu qui nous met à l’épreuve. La découverte des nouveaux mondes aurait été encore plus marquante si j’avais rencontré plus de difficultés. Il y avait vraiment matière à créer un mode plus difficile pour les joueurs expérimentés. C’est dommage, car j’ai réellement ressenti une forme d’apaisement lorsque le personnage touche à nouveau une surface plane. Cette sensation de sécurité retrouvée aurait été incroyable si j’avais galéré plus de 10 minutes sur une section. Peut-être que je relancerai le jeu un jour avec un « no-jump challenge », ou que je me tournerai plutôt vers Cairn quand il sortira.

Ce qui suit ajoute un bémol à l’histoire et contient un spoiler sur la fin du jeu.

On comprend rapidement que Jusant est une fable écologique qui aborde la question du manque de pluie. Cependant, la fin pose problème. Certes, c’est réjouissant de voir qu’il pleut à nouveau, mais sachez que des pluies en haute montagne sont généralement très mauvais signe et annonciatrices de catastrophes naturelles.

Activité sur Jusant