Emilia Pérez est une comédie musicale qui raconte l'histoire d'un impitoyable chef de gang mexicain, Manitas del Monte, désireux de laisser sa vie criminelle derrière lui. Pour cela, il demande l'aide de Rita, une avocate compétente mais pas assez considérée, afin de disparaître et de devenir la personne qu'il a toujours rêvé d'être : une femme, Emilia Pérez.

Après plusieurs années, il/elle sollicite à nouveau l'aide de Rita pour l'aider à se rapprocher de son ancienne famille. La "veuve" de Manitas, Jessi, et leurs deux enfants vont ainsi être amenés à vivre avec Emilia, sans connaître sa véritable identité. Sans trop dévoiler l'intrigue, le film présente trois magnifiques portraits de femmes, aussi complexes qu'attachantes. Pas besoin de féminisme forcé pour transmettre des valeurs progressistes : il suffit de soigner l'écriture des personnages.

Rita cherche la justice. Dans un pays rongé par le banditisme et la corruption, frustrée par son impuissance, elle est touchée par l'histoire de Manitas et voit en lui l'occasion d'aider vraiment quelqu'un.

Jessi cherche la liberté. Elle peut sembler égoïste, mais son désir d'indépendance est en réalité légitime face aux choix imposés par son mari, même post mortem.

Enfin, Emilia cherche le bonheur. Tout ce qui motive ce personnage fascinant est sa volonté d'être heureuse, que ce soit en vivant la vie qu'elle a toujours rêvée, en retrouvant son ancienne famille ou en essayant de réparer ses erreurs passées.

Le récit de ces trois femmes évolue et ne cesse de susciter notre empathie, à travers des chansons qui finissent forcément par faire mouche.

À la fin, chacune obtient non pas ce qu'elle veut, mais ce dont elle a réellement besoin. Jessi comprend qu'Emilia est Manitas et retombe instantanément amoureuse du mari dont elle essayait tant de s'émanciper. Emilia perd la vie, mais devient un symbole d'espoir pour tout le pays. Elle aura peut-être finalement réussi à faire plus de bien que de mal. Rita, elle, pleure la mort de sa chère amie mais se retrouve responsable des enfants de Jessi et Manitas, obtenant ainsi ce qu'elle n'a jamais pu avoir : une famille.

Ca raconte vraiment quelque chose, c'est le genre d'histoire à laquelle on pense encore même plusieurs jours après le visionnage. Pas de détours inutiles, pas de prévisibilité excessive, tout est nuancé. Que demander de plus ?

Concernant la partie comédie musicale, je ne déteste pas ce genre mais j'ai trouvé les parties chantées un peu trop fréquentes au début et plus diffuses et impactantes dans la seconde moitié. C'est sans doute une préférence personnelle, mais j'ai préféré les chansons marquant un climax dans l'histoire plutôt que celles d'exposition.

Plus que les chorégraphies ou la réalisation, c'est bien le message de certaines scènes qui m'a touché. On se laisse facilement emporter émotionnellement par l'histoire.

Au-delà du chant, le film possède un tempo intradiégétique très satisfaisant. Je pense par exemple à une scène où des gangsters se préparent pour une mission : le montage des armes et le cliquetis des chargeurs créent une cadence rythmique qui colle parfaitement à l'ambiance tendue du moment. C'est génial !

Si vous n'êtes pas trop allergiques aux comédies musicales, je vous invite vivement à vous y intéresser. Si Le Comte de Monte-Cristo est sans conteste le film de l'année 2024, je pense qu'Emilia Pérez peut aisément prétendre au titre de second.

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