La passion est-elle plus importante que la promesse donnée? Faut-il tout y sacrifier comme une héroïne romantique ou faut-il l'éteindre au nom des valeurs de la famille et de la fidélité ?

Telle est la question que se pose Meryl Streep dans ce très beau film de Clint Eastwood, justement récompensé en 1996.

Meryl Streep joue Francesca, une Italienne romantique jadis tombée amoureuse d'un G.I.. Quelques décennies plus tard, elle vit sans perspective de changement dans un coin un peu perdu de l'Iowa, le comté de Madison, et a deux enfants. L'eau a coulé sous les ponts et l'amour s'en est allé avec, comme un bouquet de fleurs emporté par le flot des habitudes. L'arrivée de Robert, un photographe du National Geographic venu pour photographier un pont, va réveiller ses rêves et lui faire retrouver brièvement ses rêves d'amour, « comme on rejoint des phalènes à l'aube » près d'un pont.

Robert, quant à lui, est un homme libre, sans attaches et sans contrainte, seul mais en même temps avec beaucoup d'amis voire d'amies, un voyageur qui connaît les quatre coins du monde, qui exerce un métier qui le passionne et chacun voudra s'identifier à ce bourlingueur, à cet Indiana Jones de la photographie à la recherche de la liberté perdue.

On ne peut s'empêcher d'aimer ce couple aux personnalités et aux histoires diamétralement opposées bien que complémentaires. Les femmes, surtout celles qui sont mariées et loin de leur pays d'origine ne pourront que s'identifier à cette femme romantique à deux doigts de tout laisser tomber, de même qu'elles auront discerné dans l'évocation du mari « correct » une certaine ressemblance avec l'homme qui partage leur vie, et dans les enfants de plus en plus distants une similitude avec leur propre progéniture.

L'interprétation de Meryl Streep et de Clint Eastwood est absolument merveilleuse. Les deux interprètes apportent à la fois la passion et la finesse que nécessite leur rôle. Ils réussissent par leurs gestes et leurs regards à suggérer la profondeur de leurs sentiments. Meryl Streep s'affirme comme l'une des plus grandes actrices et sa complicité avec Clint Eastwood ne laisse pas de surprendre, comme est tout aussi inattendue la composition d'un Clint Eastwood tout en finesse, bien loin de Dirty Harry ou des westerns spaghetti.

Le metteur en scène a eu aussi l'idée géniale d'une composition en flash-back qui permet de faire terminer sur une touche d'émotion au moment où les enfants découvrent que la passion dans une vie rend les parents que l'on croyait connaître plus beaux que ce que l'on pouvait imaginer.

Sur la route de Madison, au sujet simple et commun mais traité avec sobriété et subtilité, est parvenu, grâce à une interprétation hors pair et à l'universalité du thème traité, à séduire un plus large public que le public habituel de Clint Eastwood. Et c'est amplement mérité.

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