Andrew Cyrille, William Parker, Enrico Rava - 2 Blues for Cecil (2021)
Retour à l’actualité de 2021 avec cet album sorti en hommage à un autre grand du free, Cecil Taylor. Ce sont trois musiciens qui le côtoyèrent à un moment ou à un autre qui sont ici réunis, le bugliste Enrico Rava, le contrebassiste William Parker et le batteur Andrew Cyrille. L’album se nomme « 2 Blues For Cecil », il est sorti sur « Tum Records » un label finlandais. Il a été enregistré il y a environ un an, en février 2021, à la suite du festival « Sons d’Hiver ».
On y trouve des improvisations, des titres signés par chacun des musiciens, ainsi qu’une reprise de « My Funny Valentine », en fin d’album. Encore un Cd bien plein, il dépasse les soixante-dix minutes. Il contient un livret intérieur assez complet qui reprend la bio des musiciens ainsi que différents renseignements et quelques photos.
Celui qu’on n’attendait peut-être pas dans ce trio c’est Enrico Rava qui joue du bugle ici. C’est sans doute lui qui joua le moins longtemps aux côtés de Cecil Taylor parmi les trois, mais j’ai bien écouté l’album qu’il enregistra en 1988 en compagnie du « Cecil Taylor European Orchestra », et c’est bien l’un des meilleurs du pianiste. J’imagine sans peine que chaque membre qui participa à ce chef d’œuvre fut marqué par cet enregistrement, et envié par ses pairs qui auraient sans doute aimé prendre part à ce grand orchestre phénoménal.
William Parker a fait partie du Cecil Taylor Unit entre 1980 et 1991 et Andrew Cyrille participa aux légendaires « Unit Structures » et « Conquistador ! » ainsi qu’à un grand nombre d’albums. Ce sont des proches qui connaissaient intimement l’intègre musicien.
On sent à la fois le respect et l’admiration qu’ils avaient pour le géant en écoutant ce magnifique album. On pourrait hâtivement le classer dans le free mais ce serait une erreur, il y a également beaucoup de blues ici, la musique bleue de la peine et de la tristesse que l’on ressent parfois…
Ce que je voudrais dire c’est qu’ici on a probablement un des meilleurs albums d’Enrico Rava, sans jamais tomber dans l’esbroufe ou la vélocité gratuite, nous sommes, bien au contraire, face à un album où le feeling et la simplicité transpirent dans son jeu. Mais il faudrait ajouter aussitôt que c’est aussi probablement un des meilleurs de William Parker, c’est lui le grand timonier celui qui donne le cap et l’assise à ses deux compères.
Mais, ce serait encore aller un peu vite, si on oubliait de souligner qu’il se pourrait bien que ce soit également un des meilleurs enregistrements de Cyrille qui, ici, donne du tambour et des cymbales tel un décorateur- ornementiste des grands espaces, marquant le tempo comme sans y prendre garde, y compris à l’aide de trous d’air, de vides, tel un grand magicien des rythmes.