Kan Digor – A New Gathering (1979)
Sorti un mois plus tard il aurait ouvert les années quatre-vingts, au lieu de quoi il termine les glorieuses années soixante-dix qui firent beaucoup vibrer les amateurs de bonne zique. Justement, la formation « Kan Digor », qui signifie « Chant Ouvert » en breton, apporte un son nouveau, une personnalité peu présente dans le champ des possibles.
Il faut tout de même évoquer un album dont on a déjà parlé dans le coin, « Après La Marée Noire - Vers Une Musique Bretonne Nouvelle » de François Tusques, sorti cette même année, car, vous l’avez deviné, la caractéristique principale de la formation Kan Digor c’est de promouvoir une sorte de mélange entre jazz et musique traditionnelle bretonne.
L’histoire a débuté en soixante-quatorze quand le sonneur Pierre Gallais et le batteur Bertrand Le brun se sont rencontrés. Ce dernier est journaliste, il écrit sur des quotidiens régionaux et intervient également lors de chroniques radiophoniques. Par ailleurs il a joué avec François Tusques et son « Intercommunal free Dance Music Orchestra », la boucle est ainsi bouclée.
Kan Digor va donc naître principalement autour de l’idée d’improvisation, le groupe va beaucoup répéter et chercher sa marque, et là, pas de problème, il possède une véritable et profonde identité dont les racines plongent à la fois dans le jazz et dans la musique traditionnelle bretonne, chaque musicien se situe sur ces deux bords, pour le meilleur.
Vincent Guérin est à la contrebasse et Daniel Pabœuf joue des saxophones, ces quatre-là réunis forment ce quartet atypique en soixante-dix-huit et répètent beaucoup avant de se réunir en studio à Melesse. Il se font accompagner par un invité, Philippe Herpin qui joue de la clarinette basse et des saxophones et qui formera bientôt le duo « Anches Doo Too Cool » avec Daniel Pabœuf.
L’album sort en février quatre-vingts sur le label breton « Nevenoe ». La musique est souvent lyrique, improvisée à partir de thèmes, dont deux traditionnels, « Highland’s Dance » qui ouvre l’album et « Affreux Plin ». Deux titres sont signés de la formation, « De Houat à Houedic » et « A New Gathering » qui ferme l’album. Les deux autres compositions sont de Bertrand Le Brun.
On ne reconnait pas les rythmes entraînants et dansants de la musique bretonne, ni son côté ritournelle, répétitif, mais nous sommes au centre d’une musique nouvelle qui prend au jazz son goût des impros et sa liberté. En ce sens on peut parler de free, mais il faut plutôt souligner le côté très lyrique, échappant à la terre et à ses rythmes anciens, pour rêver et imaginer, s’inscrire dans une autre temporalité. La musique devient ainsi quelque chose d’étrange, peuplé de personnages mythiques nés dans la forêt de Brocéliande, enfin j’imagine…