En direct de RCA
— Si nous sommes réunis aujourd’hui messieurs, c’est pour répondre à une question, non moins cruciale, tout du moins déterminante quant à la crédibilité de notre établissement: comment va -t-on...
le 7 mai 2014
20 j'aime
8
Le jazz et le metal, drôle de mélange n'est-ce pas? Surtout quand le dit metal s'acoquine avec des vocaux écorchés ou gutturaux et des guitares sous-accordées. Pourtant, à l'orée des 90's, quelques groupes ont tenté une drôle de chimère, synthétiser la fureur du death metal, avec la virtuosité et un touché proche du jazz-rock. Une démarche en somme qui pourrait faire penser de prime abord avec celle de certains groupes de rock progressif des 70's. Hormis le fait d’être un mariage contre nature, et d’intéresser très peu d'auditeurs, les groupes Cynic, Pestilence et Atheist pour les citer ont/avaient au moins un mérite, celui de ne pas verser dans les travers de leurs aînés des 70's (tout du moins à des niveaux largement inférieurs), à savoir une musique ampoulée au maximum, où le grotesque et la prétention musicale étaient d'usage.
Des chevelus métalleux qui s'intéressent dès lors au jazz peut paraitre étrange... mais que des jazzmen de formation aient la démarche inverse, que dire?
Comme je l'avais écrit lors d'un précédent post, le premier terroriste sonore venant du jazz à avoir eu cette démarche n'est autre que John Zorn avec ses deux fameux projets: Naked City et surtout Painkiller avec au poste de batteur Mick Harris, le premier cogneur de la formation culte de grindcore Napalm Death. Bref qu'un musicien, sideman pour l'Electric Masada du sieur Zorn, décide à son tour de se jeter dans le grand bain du metal extrême... y'a des surprises qui n'en sont plus. Encore que... surprise tout de même car point de trace d'une once de jazz en fait, contrairement à Naked City ou via les improvisations cataclysmiques de Painkiller. Oui mais alors qu'est-ce que ça implique? Roh rien de bien méchant ma bonne dame, juste du metal extrême.
Jamie Saft, multi-instrumentiste, se chargeant à la fois des claviers, de la guitare, de la basse et de quelques vocaux s'est adjoint les services pour l'occasion d'un autre musicien connu pour jouer aux côtés de John Zorn mais aussi pour avoir fait parti d'un des groupes les plus novateurs des 90's, Mr Bungle, à savoir le bassiste Trevor Dunn. Il faut tout de suite avant d'aller plus loin qu'avec un tel duo, on aurait voulu, souhaiter plus de folie... ce ne sera pas le cas, de là à bouder son plaisir? Pas tant que ça, Black Shabbis à travers son Jewish metal nous propose un florilège suffisamment intéressant allant du thrash, au sludge en passant par le doom jusqu'au drone... à défaut de révolution musicale.
En guise d'introduction, dans la grande tradition des albums de metal des 80's, Metallica en tête, Jamie Saft & co nous convient ainsi à une intro à mille lieux des futures ambiances sombres de la dite galette, soit un Black Shabbis-The Trail of Libels tout droit sorti d'un album de... Calexico. Transition toute trouvée s'il en est puisque le morceau suivant Blood nous plonge directement dans un thrash des familles, Slayer en tête pour la rythmique, des vocaux caverneux proches du grec Spiros et des arrangements rappelant les débuts de son groupe Septic Flesh. Serpent Seed, quant à lui ébauche tout de suite l'évolution de Black Shabbis, un disque pied au plancher au démarrage pour ralentir son tempo dès le troisième titre. Serpent Seed ou le mix entre un sludge poisseux, marque de fabrique des rednecks from Louisiana, des arrangements orientaux digne des israéliens d'Orphaned Land et une conclusion chaotique au bon souvenir d'un Zorn.
En citant précédemment un ralentissement de la rythmique, je minimisais à peine l'étendu des dégâts, Der Judenstein (The Jewry Stone) nous plonge directement dans un doom massif de 9 minutes tandis que Kielce et The Ballad of Leo Frank suivent le sillage d'un Earth première époque ou d'un Sunn O))). Et bien que Black Shabbis soit avant tout un album instrumental, où tout du moins les vocaux ont une place mineure, on n'oubliera pas l'un des plats de résistance de l'album, Army Girl morceau digne d'une collaboration avec Mike Patton.
Black Shabbis est un drôle d'album au final. Celui qui ne devrait satisfaire ni les fans de jazz, ni les amateurs de décibels extrêmes, ces derniers risquant de trouver la galette trop dispersée... encore que pour la première catégorie, les habitués aux productions Tzadik ne devraient pas être si déstabilisés que cela (après avoir passé l'épreuve Merzbow, on est en partie vacciné...). Un album qui manque d'originalité mais qui a le mérite de synthétiser agréablement tout un pan de la musique extrême de manière efficace.
http://www.therockyhorrorcriticshow.com/2009/03/jazz-yiddish-vs-metal-extreme.html
Créée
le 10 mars 2014
Critique lue 112 fois
1 j'aime
Du même critique
— Si nous sommes réunis aujourd’hui messieurs, c’est pour répondre à une question, non moins cruciale, tout du moins déterminante quant à la crédibilité de notre établissement: comment va -t-on...
le 7 mai 2014
20 j'aime
8
La règle générale voudrait qu'un artiste nouvellement signé sur un label, une major qui plus est, n'enregistre pas en guise de premier disque contractuel son album le plus expérimental. C'est...
le 28 juil. 2014
18 j'aime
Prix Louis Delluc 1996, le premier film de Sandrine Veysset, Y'aura t'il de la neige à Noël ?, fit figure d'OFNI lors de sa sortie en décembre de la même année. Produit par Humbert Balsan, ce long...
le 19 déc. 2015
16 j'aime
1