Dätcha Mandala, c'est ce groupe originaire du bordelais qui a décidé que, malgré leur jeune âge, le trio pouvait jouer du rock comme les plus grands. Écumant caves de bar et salles de concert depuis 2009, le groupe a petit à petit acquis une "street cred" qui leur permet de réaliser des premières parties prestigieuses. Et il est vrai que ces jeunes (à peine rentré au lycée lors de leur création) savent forcer le respect. Ils pratiquent le rock comme s'ils étaient tombé dedans étant petits, et procèdent à des prestations scéniques de haute volées quelque soit le type de scène. Mais, car il y a un "mais", en 2011, ils rentrent en studio pour accoucher de leur premier album (aujourd'hui désigné par leur site officiel comme une "démo") intitulé Eden Sensuality. Je ne vais pas faire la critique de ce dernier ici, on attendra que la page soit disponible sur SensCritique. Sachez tout simplement que je trouve honteux de vendre ça 13€ sur iTunes tant la performance et surtout la qualité sonore manquent à l'appel. Pourtant côté composition, Eden Sensuality en a sous le pied et certains titres auraient pu tout à fait se voir remaniés pour figurer sur la galette qui nous intéresse. Mais le groupe ne se laissera pas prendre à fournir du prémâché : ici, que de l'inédit mesdames et messieurs.
Car enfin, cinq ans après la fondation du groupe, Dätcha Mandala rentre définitivement dans la cours des grands avec cet EP. Disposant d'une qualité sonore digne (mais inégale, j'y reviendrais) et de compositions relativement bonnes, Dätcha Mandala mérite sans aucun doute qu'on lui tende une oreille. La performance offerte est honorable (notamment le jeu de guitare ainsi que la basse au poil), l'esprit "live" et spontané est là, et la variété est une fois de plus surprenante. Hard rock, blues rock, rock psychédélique, folk, rock progressif... En seulement 22 minutes, le groupe a le temps d'explorer ces styles, en les mélangeant même parfois, tout en conservant une certaine cohérence. Après la puissance brute du hard rock de Totem, on sera tout de même décontenancé par la très orientale Human Free pourtant dotée de suffisamment d'arguments pour subsister au milieu de ce torrent de blues rock moderne. En effet, Human Free, bien qu'un peu caricaturale, est une belle démonstration du savoir faire du groupe niveau arrangement. Entre les effets en tout genre, les chœurs, le sitar, les percussions et les guitares, ce morceau relève le défi de l'exercice de style sans accrocs. C'est sans doute mon titre préféré avec la partie "Move Over" du Medley (ce dernier liant en effet Move Over de Janis Joplin et Helter Skelter de The Beatles).
On passera sur Salamander Jive qui, malgré un bon riff de guitare acoustique en introduction, se révèle tout simplement plate et niaise (à l'instar de son homologue folk sur Eden Sensuality, la très dispensable Misery). Un titre qu'ils auraient pu vendre à Olivia Ruiz sans problème. Mais peut-être était-ce une vile tentative pour nous endormir avant la vraie surprise de l'album : Eht Bup. En mixant presque tous les styles précédemment entendu et en lui rajoutant le rock progressif moderne, il s'agit là de la piste la plus intéressante de l'EP. Le chant, le refrain, les variations progressives, la présence opportune de la guitare acoustique, le retour d'éléments psychédéliques le tout sur fond de riff presque heavy metal, tout ça aurait pu donner un mélange parfait. Mais, même si le groupe s'acharne avec un travail de composition et d'arrangement évident, la filiation avec Muse est inévitable et confère à ce morceau un aspect "arena rock progressif pour minette" qu'on ne peut que déplorer. Le groupe aurait sans doute préféré lorgner plutôt du côté de Queen of the Stone Age, mais il semble que les intentions ne rejoignent pas le résultat. Un constat malheureusement applicable à l'ensemble de cet EP.
En effet, un certain nombre de points viennent entacher le résultat. Outre les errements de composition exposés plus haut, la production ne semble pas avoir fait subir le même traitement à chaque morceau. Le mix de Totem par exemple, avec sa guitare trop orientée dans les basses et sa caisse claire trop en retrait, déséquilibrent le morceau. Un choix étonnant surtout que les autres titres rock, Medley et Eht Bup, sont globalement mieux agencées. De façon générale je mettrai un bémol au son de la batterie qui a encore une marge de progression avant de rivaliser avec les ténors du genre. La basse quant à elle, toujours bien présente, est irréprochable, de même pour les guitares acoustiques et les chœurs. Je suis plus partagé sur le chant principal que je trouve un peu trop criard. Heureusement, le chanteur/bassiste livre ici une performance qui reste agréable la plupart du temps. Son approche "live" est très plaisante, mais elle agit parfois au détriment de la justesse. Et s'il est assez impressionnant les parties vocales de Human Free, il manque quelques peu d'assise sur Helter Skelter.
Avec un son pas toujours au poil et des titres pas toujours irréprochable, ce premier EP peut apparaître comme une petite déception tant le groupe laisse d'habitude son audience sur le cul après un concert. iais on serai très ingrat de bouder entièrement son plaisir d'entendre enfin une performance digne de ce nom de la part d'un groupe si prometteur. Et même s'il n'est pas parfait, cet EP porte les espoirs d'un album complet qu'on attendra de pied ferme.