Sylvie Courvoisier Trio – Double Windsor (2014)
Voici, pour l’instant, le dernier album de la série des « Spectrum » que je passe en revue. Je vous avais déjà parlé de la pianiste Sylvie Courvoisier à l’occasion de « Free Hoops » sorti en 2020, il se trouve que cet album de 2014 la trouve avec exactement le même trio, c’est-à-dire Drew Gress à la basse et Kenny Wollesen à la batterie. C’est d’ailleurs ici son premier album sous la forme piano, basse, batterie, devenue un classique du répertoire « jazz ».
Cet album donne l’impression d’une grande maîtrise, elle n’est pas feinte, dûe en partie à l’impressionnante technique des instrumentistes, mais aussi au travail d’écriture et de répétition que l’on devine. Nous voici curieusement placés dans une architecture très structurée, en même temps que dans un espace ouvert et free, cet équilibre est constant tout au long de l’album, comme une contradiction intérieure qui ne montre jamais sa faiblesse, mais, au contraire, une force qui rend la construction inébranlable, sans fragilité.
D’ailleurs toutes les pièces sont signées de la suissesse, neuf créations distinctes, chacune obéissant à ses propres règles, parfois bancales, fragiles, ouvertes et libres, souvent complexes, avec des interruptions, des avancées, des retours et des escapades sans fin. Le monde qui s’écrit entre nos oreilles est d’une immense richesse, grouillant et fourmillant avec pleins d’idées et de surprises inattendues, mais ça fonctionne à chaque fois, laissant l’auditeur souvent pantois.
Chaque membre du trio tient un rôle prépondérant où chacun doit être à l’écoute des autres en suivant précisément la structure établie, au niveau des solos Sylvie Courvoisier est la mieux servie, mais souvent les progressions dans les pièces laissent à chaque musicien suffisamment de liberté pour que chacun se sente à l’aise, avec des espaces pour s’exprimer.
Sans surprise un très bel album, exigeant et abouti, fruit d’un énorme travail de composition.