Chronique également dispo sur le site : www.universsale.com
Décidément, la Belgique est à l’honneur en cette fin d’année 2017.
Après l’excellente tape d’Hamza « 1994 » (chronique à retrouver sur le site), l’explosion d’Angèle avec son titre « La loi de Murphy », et le film « Tueurs » accompagné de sa BO de qualité, c’est donc au tour de Slim Lessio de nous livrer son premier projet : « Fruit de Paix »
Encore inconnu du grand public, un petit rappel est donc nécessaire avant de se plonger dans la mixtape :
Agé de 20 ans et originaire de Spa, petite ville thermale de Wallonie connue pour sa fameuse « Eau de Spa », dont le rappeur vante les mérites plus d’une fois, Slim Lessio se lance réellement dans le rap en 2012, sous le nom de « Slim D », avec son groupe « La Confrérie » (LC ou « ElleSait » pour les intimes) qu’il forme avec son pote « Ricky Lacoste » (blaze incroyable). Après plusieurs morceaux et une tape (« Sale Type »), il décide de continuer sa carrière en solo, toujours entouré et appuyé par ses gars-sûrs.
Proposant au départ un rap plus « classique », il trouve peu à peu son propre style et c’est en mars 2016, avec le titre « Million » qu’il va être repéré par les producteurs Street Fabulous (via Emanuel Ricci, DA de Street Fab). Il signe donc sur leur label « Trez Recordz » et rencontre dans la foulée Dj Kore (écurie A.W.A), qui deviendra son co-producteur.
C’est à ce moment-là que la véritable carrière de Slim Lessio commence.
Il sort d’abord en Juin 2016 l’incontournable « Chui Bien » (à écouter absolument), un son trap à la couleur festive bien particulière, qui va devenir sa marque de fabrique et qui démontre que le garçon sort du lot. Il commence ensuite à distiller petit à petit ce qui sera donc les 6 extraits clipés de la mixtape.
Très clairement influencé par Young Thug et par ce qui se fait à Atlanta, entre les Migos et 21 Savage, le Belge nous propose à travers son opus, un univers trap très coloré, divertissant, rempli d’égotrip, de gimmicks, et d’ad-libs.
Le tout mis en image par Harry Pirnay, son clipeur de toujours, et par Romain Garcin, photographe et graphiste, qui a réalisé la cover et plusieurs visuels pour les 6 extraits de la promo, tous très colorés, démontrant un attrait pour l’art et les belles images (en témoigne son compte Insta)
Nous sommes donc le 24 novembre 2017, et c’est l’heure de débarquer sur le devant de la scène avec la sortie de « Fruit de Paix ».
Une sortie accompagnée du clip « T R A P », titre phare de la tape, dans lequel Lessio joue les directeurs du « Trap Asylum », où il a envoyé toute la concurrence. Un morceau qui sonne donc comme une hymne à ce courant musical, et sur lequel se dégage une totale maitrise, via une interprétation nonchalante à la limite de l’insolence et un égotrip à son paroxysme. Proclamé « Roi » de ce mouvement malgrè lui, Lessio « vit la Trap, t’apprend la Trap, et ne fais que la Trap ».
Un titre produit par le phénoménal Ponko (également signé chez Trez), déjà à la prod sur « 1994 », qui revient ici pour délivrer des passes décisives d’une grande précision au Spadois, et ce tout le long du projet (13 instrus sur 16). Des instrumentales toutes plus folles les unes que les autres, faites sur-mesure, qui vont permettre à Lessio de s’épanouir de la meilleure des manières afin nous faire découvrir son univers musical et toutes les idées qu’il a en tête.
Un univers très diversifié, dans lequel il se passe énormément de choses, où l’on retrouve des morceaux festifs comme « Pina Colada », « M’évader », « Pouffiasse » et sa prod très originale, ou encore le très étonnant « L’argent ou le sang » (coup de cœur personnel). Ses sonorités hispaniques, à la frontière avec le Flamenco, sur lesquelles raisonnent des trompettes, ainsi qu’un flow et une interprétation totalement imprévisible permettent à ce titre de se démarquer.
L’interprétation étant un des points forts du projet, le rappeur n’a aucun mal à jouer avec les vocales et à changer de voix quand bon lui semble. Des variantes qui trouvent leur apogée sur le titre « Dans ma tête ».
« Le soleil rappelle les gosses qu'on était, arrêtons d'cogiter »
On retrouve également des morceaux plus noirs, comme « Assumer », « Des miens » ou « Vampire » qui nous plonge immédiatement dans une atmosphère ténébreuse et anxiogène, digne des Comte des Carpates. On imagine très facilement le Belge roder dans les rues sombres de Spa, esquivant la « Wouwou », à la recherche de proies à qui ôter la vie, telle une créature de l’ombre.
A travers ces différentes ambiances, « le plus mauvais des gentils garçons » se livre sur son quotidien, celui d’une jeune qui tourne en rond dans sa petite ville Wallone, égayant ses journées, et surtout ses nuits, à coup de « soirée de pouffiasse ». Accompagné de son entourage indissociable, sa bande de « patrons de commerces » ambitieux, déjouant la monotonie de toutes les façons possibles, on remarque que ce groupe a de grands projets et visent de grandes choses .
« La Mierda » à la mélodie nostalgique et envoutante, « Tu piges » ou « Rien à faire ici » (produit par San Hucci), titre vraiment puissant et surement le plus personnel de l’opus, en sont les meilleurs exemples.
« C’est la merde chez moi, chez toi c’est la même
C’est la merde tous les jours c’est la même »
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« Ma mère est heureuse son fils il va percé
Pour ce que la vie m’a donné je dis mercé »
Mais toute cette banalité du quotidien qui forme le fond du propos contraste totalement avec la forme. En effet, elle nous ambiance de la première à la dernière piste, entre des flows toujours plus improbables et des ad-libs à tout-va.
A travers l’écoute du projet, on constate également que la consommation de stupéfiants et de liquide peu orthodoxe est un thème assez récurrent. La piste « Au clair de la Lean », et son fameux gimmick « Au clair de la lean, mon ami Ponko » l’illustre parfaitement.
Mais à contrario de certains rappeurs, ici aucune glorification. On ressent une fois de plus un certain cafard, un ennui de ce qui n’est devenu au final qu’une mauvaise habitude. Une habitude qui influence toutefois son art, et qui prend forme à travers des sons comme « Sur la route », « Ca me plait » (produit par Wizard Beats), ou le si bon « Hennessy » ; doté d’une vibe ensorcelante, le Slim nous plonge au milieu d’un nuage de fumée, verre de Hennessy en main, et nous abreuve d’un flow tranchant sur les couplets, d’un refrain mélodieux aux airs de « Nate Dogg » et d’une interprétation, une nouvelle fois, impeccable.
« J’aime pas la beuh c’est une habitude »
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« Sans lean je peux pas me calmer »
C’est donc de manière très sérieuse que Slim Lessio pointe le bout de son nez sur le devant de la scène ; une mixtape dont se dégage une étonnante sérénité pour un premier projet. La qualité de la production est également à souligner, et l’alchimie avec Ponko est indéniable. L’univers musical est incroyablement riche et complet, formant un rendu final très coloré et nous ambiançant morceau après morceau .
Nul doute qu’il faudra compter sur le Spadois pour les années à venir.
Bref, « Fruit de Paix » est un fruit du démon dans lequel il va falloir croquer sans attendre, si ce n’est déjà fait.
Chronique également dispo sur le site : www.universsale.com (ainsi que Booba - Trône / Kekra -
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