Dans Rakka, Vladislav Delay peint un paysage sonore froid et grandiose, inspiré par l'île finlandaise Hailuoto où il vit depuis 12 ans.
De languissants "drones" (de longues notes plutôt statiques) coulent, s'étalent et s'installent dans le temps. À ces derniers se superposent de manière plus imprévisible torrents percussifs, grondements de basses sourdes, crissements dissonants et crépitements abrasifs. De ce tout émerge une puissance titanesque et impressionnante, plus envoutante que menaçante. Le débridement des sons, comme obéissant à des lois naturelles, semble retenu en deçà d'un seuil invisible ; une force de gravité vient contenir ce chaos. Cet équilibre énigmatique est continuellement défié, et sa capacité à perdurer tient l'auditeur en haleine.
On peut reprocher à Rakka un léger manque de variations entre ses morceaux et donc une absence de grande surprise. Néanmoins, sa cohérence, ses textures minutieusement sculptées et son pouvoir de submersion en font un album abouti.