Yusef Lateef - The Blue Yusef Lateef (1968)
Voici « The Blue Yusef Lateef » un album RCA enregistré en 1968 par le grand multi-instrumentiste. Ici le projet est simple, tenter de retrouver le blues sous différentes formes, tel qu’il a pu exister ici ou là, parfois même, on le verra, dans des cultures assez éloignées.
Pour y arriver Yusef s’est bien entouré, Sonny Red à l’alto, Blue Mitchell à la trompette, Buddy Lucas à l’harmonica, Kenny Burrell à la guitare, Hugh Lawson au piano, Cecil McBee à la basse, Bob Cranshaw à la basse électrique et Roy Brooks à la batterie. Yusef joue du ténor, des flûtes, du koto de Taïwan, des tambours et des percussions diverses.
L’album s’ouvre avec « Juba Juba » inspiré par les « Negro Prison Songs » en provenance des pénitenciers du Mississipi, un titre dédicacé à « Juba » aka William Henry Lane, le plus grand musicien-danseur de cette époque, la pièce est très émouvante, on entend à l’arrière des chœurs qui renvoient aux origines.
« Like it is » est également très réussie, le thème est à la fois simple et mélodique, de ceux dont Yussef possède le secret, un magnifique passage à la flûte suivi par un très beau solo de ténor puis de piano. Un quartet à cordes fait une apparition judicieuse sur cette pièce, lui donnant un aspect mystérieux. L’album commence très fort.
Après « Othelia » et son blues certifié douze mesures arrive « Moon Cup » avec son chant provenant d’un dialecte Philippin, c’est Yussef lui-même qui assure la partie vocale, il joue également du koto, c’est la pièce la plus étonnante ici.
Avec « Back Home » on retrouve une forme plus ancienne car le livret signale qu’il prend racine dans la musique baroque, même si, à l’écoute ça n’apparaît pas évident. La pièce est superbe et les chœurs magnifiques, chantés par « The Sweet inspirations », on remarque le solo à l’harmonica et celui au shehnai.
« Get Over, Get Off and Get On » et sa structure modale manifestent à nouveau un nouvel aspect du blues, alors que les deux dernières pièces retrouvent un aspect plus traditionnel. Cet album est souvent rangé parmi les plus passionnants du musicien, il s’y montre en effet curieux de ses racines, chercheur invétéré, ouvert au monde et aux musiques venues de partout, tout comme Don Cherry qui trouvera sans doute un modèle dans cette démarche initiée il y a bien longtemps par le vénérable Yussef Lateef.