Turbulence
Turbulence

Album de Broken Hands (2015)

Mesdames, Messieurs, bonjour, je suis votre chef de cabine. Le commandant de bord M. Dalgety et l’ensemble de l’équipage ont le plaisir de vous recevoir à bord de ce premier album de Broken Hands. Nous nous assurerons de votre confort d’écoute durant ce vol à destination de Canterbury, Kent. Quelques turbulences sont à prévoir ; en cas de dépressurisation de la cabine, des casques stéréo tomberont automatiquement devant vous. Appuyez sur lecture pour libérer la musique et écoutez normalement. PNC aux portes, armement des toboggans, vérification de la porte opposée.


Ah, encore un album produit par l’orfèvre britannique Tom Dalgety. J’ai l’impression de parler de lui dans la moitié de mes critiques, mais ce fieffé foutriquet est partout : après avoir orchestré l’éclosion de Royal Blood, et confirmé celle de Turbowolf et Dinosaur Pile-Up entre autres, le voilà dans le cockpit pour le très attendu debut album de Broken Hands, porte-étendard du rock alternatif du Kent aux côtés des immanquables Slaves. Dalgety a de son propre aveu l’habitude de produire les albums de façon à pouvoir les écouter chez lui ; et comme visiblement Monsieur a bon goût, j’étais très avide d’embarquer pour cet album se voulant conceptuellement aérien…


Aucun doute : le son est là. Le groupe semble avoir misé sur le bon cheval, et la patte Dalgety colle parfaitement à l’identité sonore de Broken Hands. Dès l’embarquement, Spectrum impose une atmosphère à la fois sombre et planante qui perdurera sur tout l’album. La chanson s’articule sur un riff lourd à l’octave fuzz, pour finalement entamer un décollage malheureusement un peu timide. Le pilote remet un coup de gaz sur le single Meteor, et son riff mono-note déménageur aux accents de QOTSA. D’une manière générale, Turbulence est produit à la perfection et bardé de bonnes idées : on retiendra particulièrement les coups de butoir saignants à la Royal Blood sur Should I, le délire 8-bit de Death Grip évoquant des horizons électro très intéressants, ou encore les licks de Whammy absolument jouissifs sur le titre éponyme.


Mais étonnamment la mayonnaise tarde à prendre. Aussi cohérent qu’il soit dans sa construction, Turbulence donne parfois l’impression de trop vouloir imposer son côté concept album, pour en délaisser l’essentiel : le contenu. Les titres s’enchaînent bien, liés par une atmosphère rendue convaincante par des titres évocateurs comme la psychédélique 747. Hélas comme le prédisent les paroles de cette dernière : « Slowly this flight is crashing ». Faute d’une bonne gestion des temps forts, l’album se contente trop souvent de planer quand il faudrait fendre les cieux (Impact, Collide). Le closing track WTLL (When They Last Landed) cristallise parfaitement ce constat, avec un morceau de 6:30 qui ne décolle jamais, et repose tristement l’aéronef plutôt que d’enfin nous bousculer après un vol décidément trop calme.


Turbulence est un bon album, sans aucun doute, et témoigne du potentiel de ce groupe émergent qu’est Broken Hands. Les bonnes idées fourmillent à vue d’œil, encore faudra-t-il mieux les organiser sur la prochaine galette pour rendre les temps forts moins sporadiques. J’ai trop souvent eu la sensation que la batterie était soit à la traîne (Spectrum), soit complètement esseulée au milieu d’un morne ensemble (WTLL). Autre déception, la voix techniquement impeccable mais qui reste trop en surface dans les compositions, la vraie curiosité venant systématiquement des mélodies instrumentales – le meilleur exemple en serait Who Sent You. Je ressors donc indemne de ce vol de reconnaissance, moi qui m’attendais à être bien plus secoué. Mais je note le nom de la compagnie, et surtout j’espère qu’ils garderont le même pilote.

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le 10 avr. 2016

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Jambond

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