Puisque de part et d’autre de l’Atlantique la recette du jour se compose d’un retour de l’esthétique shoegazing, on ne va pousser des cris d’orfraie à chaque nouvelle formation prête à tout pour envoyer sa pop dans l’espace. Duo londonien qui a fait parler de lui après quelques concerts qui l’ont vu passer le mur du son, The Big Pink jouit tout d’abord de la caution 4AD (Bauhaus, Cocteau Twins, Pixies) et de son graphiste attitré Vaughan Oliver pour devenir, cela semble inévitable, ce que les Anglo-Saxons appellent commercialement “the next big thing”. On passera rapidement sur l’image stéréotypée du rocker, yeux cernés et profil bas, qui nous détournerait des vertus premières de A Brief History Of Love, à savoir une facilité déconcertante à transformer une posture nostalgique en réel coup de tonnerre. Il faut quand même un talent certain mais aussi une innocence non feinte pour s’approprier sans vergogne les décharges soniques de The Jesus And Mary Chain et la morgue flambloyante de The Verve. Ayant fait appel à Rich Costey (Muse, Rage Against The Machine, New Order) pour le mixage, Milo Cordel et Robbie Furze jouent avec le feu d’un son electro rock emphatique (le côté “big”), en prenant garde de ne pas franchir la limite du pompiérisme par la grâce d’une sensibilité à fleur de peau (le côté “pink”). Future machine de guerre ou pas, peu importe le destin de The Big Pink, car face à cet enchaînement/déchaînement d’hymnes en puissance (Crystal Visions, Velvet, Frisk…), toute résistance semble inutile. (magic)
On le sait, les plus courtes sont les meilleures : et la “Brève histoire de l’amour” que nous raconte The Big Pink, duo londonien formé par Robbie Furze et Milo Cordell (le découvreur des Klaxons et des Teenagers sur son label Merok Records), sur son premier album est tout simplement excellente. On s’en rend compte dès les premières notes : les deux amis, même s’ils sont un peu jeunes, auraient rêvé de vivre la grande aventure shoegazing. Mais si, le shoegazing, vous savez, des laves de guitares jouées, à la fin des années 80 et au début des années 90, par des garçons tristes, longilignes et à la mèche grasse : c’est Ride, c’est My Bloody Valentine, Slowdive, Spiritualized aussi. Ces groupes, les deux Big Pink les ont certainement écoutés des heures durant, même si pour nous faire suer ils diront le contraire en interview. Dès le morceau d’ouverture, Crystal Visions, on s’attache aux montées sourdes et mélancoliques de ces deux Londoniens, au bourdonnement romantique de leurs chansons écrites à la plume de paon. Sur Velvet, l’un des plus jolies choses qu’il nous ait été donné d’écouter depuis le début de l’année, on se prend même à rêver d’un destin mondial pour le duo Cordell/Furze : à bien y réfléchir, leurs power-songs mélancoliques pourraient presque se jouer dans les stades (Dominos, At War with the Sun). Mais ce penchant pour la grandiloquence aimable, ce goût pour la superproduction saturée (plusieurs morceaux de The Big Pink pourraient conclure un film américain un peu émouvant, juste après que le héros a mis sa langue dans la bouche de l’héroïne), le groupe parvient à le brider très justement, grâce à des titres résolument sombres, rentrés et chelous (Love in Vain, A Brief History of Love, Too Young to Love : en gros, toutes les chansons avec “love” dedans, allez comprendre). L’ensemble est impressionnant d’énergie et de justesse, et le groupe à découvrir de toute urgence : il sera, le 6 novembre, invité au Festival Les Inrocks tck tck tck. (inrocks)