Kahil El'Zabar's Ritual Trio Featuring Pharoah Sanders – Africa N'da Blues (2000)
Damn ! Voilà un album qu’il est bon ! Le Ritual Trio est bien là au complet, avec Kahil El’Zabar à la batterie et aux percussions, Ari Brown au piano, au sax ténor et au soprano, et Malachi Favors à la basse. L’invité est exceptionnel, c’est Pharoah Sanders évidemment, avec son sax ténor.
C’est un album Delmark, il rassemble donc des grands noms du jazz et du free, jusqu’ici tout est normal, même la rencontre est normale et évidente, Kahil et Pharoah se fréquentent depuis le milieu des années soixante-dix et il arrive assez souvent à Kahil d’aller faire le bœuf avec Pharoah quand ce dernier a besoin d’un percussionniste, il faut dire qu’alors, au temps d’avant, Kahil jouait aux côtés de Rahsaan Roland Kirk et que Pharoah adorait le multi instrumentiste, c’est comme ça que les liens se tissent et s’entretiennent…
Le Ritual Trio, on le sait, joue en fait rarement en trio, il y a souvent un invité, un éminent musicien de passage, de ceux que l’on aime et qui passe dans le coin, alors on parle et on décide de faire un album. L’invité, quel qu’il soit, est tout de suite à son aise, il fait déjà partie de l’aventure, sa place est faite, il n’y a plus qu’à s’installer et jouer.
Ici Kahil a écrit deux titres pour Pharoah, « Africa N'da Blues » car, pour Kahil, Pharoah porte sur ses épaules la musique de l’Afrique Noire, de ses rythmes et de ses traditions, il a également écrit « Pharoah’s Song », c’est un prince, il sait recevoir. Pour être complet il faut citer également une invitée, Susana Sandoval qui porte le Spoken Word sur le magnifique « Africanos/Latinos », qui est une petite merveille, peut-être le sommet ici, balance doucement dans le groove tissé par Kahil…
La troisième pièce est une reprise de « Miles’ Mode » de Coltrane, ici bien enlevée, avec la rythmique démultipliée de Kahil et l’architechture be-bop de la pièce. Le solo de Pharoah est tout en énergie déployée fait place bientôt à celui d’Ari Brown au sax, Malachi Favors est un immense contrebassiste, il a pas mal bourlingué avant de se poser au sein du trio, il nous tricote ici un petit solo des familles, puis arrive l’heure du standard de chez nous « Autumn Leaves » et c’est Ari Brown, au piano, qui ravit.
« Africa N'da Blues », le morceau titre plonge dans la musique des années Coltranienne, allant de soixante à soixante-quatre, ce qui convient à Pharoah qui s’y trouve également bien, ne retrouvant le cri que lors de quelques rares scories qui font, le plus souvent, le plaisir de son public. « Pharoah’s Song » se déploie sur un groove malin, souple et continu, on y chante et le ténor s’y déploie gentiment, déployant un thème répétitif répondant à la voix. Puis vogue la musique sur les rythmes doux…
L’album se termine sur la première prise de « Ka Real » de Joseph Bowie, la seconde étant placée à l’ouverture de l’album, un peu comme un miroir. Un bien bel album qui fait honneur aux participants et qui leur donnera l’envie de se revoir, ce qui sera fait à l’occasion d’un live qui sortira en 2008.