Blood Money! Je pourrais en parler des heures... Ce disque est unique, il ne ressemble à aucun autre, il forme une trilogie avec les albums Alice et The Black Rider, tout deux à un niveau déjà beaucoup trop haut, même trop. Cette trilogie peut être dangereuse, comme elle peut être bénéfique et changer une vie. Tom Waits c'est Louis Ferdinand Céline du Rock, avec des relents de Bukowski, William Burroughs (qui apparaît sur l'album Black rider et qui participe directement au projet) ou de William Faulkner.
Je pense, encore aujourd'hui, que Tom Waits est le créateur d'une bible sonore, littéraire et cinématographique unique, singulière, totalement déglinguée, en se basant sur des valeurs saines, que son œuvre entière a été construite comme ça. Je pense même que Tom Waits ne sera probablement jamais reconnu comme un génie immense de son époque... Un nouveau John Milton qui passera inaperçu...
Céline avait son "style", Tom Waits l'a, mais il a aussi son style "musical" et "cinématographique", il est le prolongement des génies anticonformiste et maître de leurs arts. Avec Tom, j'ai pratiquement tout appris, lui et son cousin Céline sont des types avec les pieds sur terre.
Mais revenons en à "Blood Money", qui est (et j'en mets ma tête au feu) le plus grand disque du siècle, et peut être l'un des plus grands de tout les temps.. L'album s'ouvre sur "Misery is The River Of The world", et ses paroles terrifiantes, et des sonorités venues d'outre-tombe, comme l'épouvantail d'il y a plusieurs siècles revenus de parmis les morts, en chantant un "hymne" pour faire revenir les vivants sur terre.
Puis l'album continue dans ce thème là, et l'accumulation de chefs d'œuvres... "God's Away on Buiseness" et son clip ou Tom évolue dans une maison à l'abandon paumée, tout en ayant un parapluie, des canards et des oies comme compagnon avec des lignes de textes que n'aurais pas renié le clown "Ça" ou le pingouin de Batman... Puis on continue avec "All World is green", magnifique ballade foraine, douce, reposante et qui fait mal aux tripes en même temps... Puis l'instrumentale "Knife Chase" qui me terrifie à chaque écoute, les larmes, le froid dans le dos, les frissons.. Parce que oui ce disque fait immensément peur, et aussi froid dans le dos, il brise le cœur, il donne des frissons à chaque écoute... On a l'impression que personne ne peut aller aussi loin dans la radicalite et la beauté... Que le niveau est tellement haut, que tout le monde ne peut atteindre sa rotule...
Cette trilogie de fin du monde, des émotions par milliers, représente à mon avis , le sommet du rock, mais aussi du jazz, comme de la littérature contemporaine.. Même la trilogie berlinoise de Bowie c'est petit à côté (et pourtant c'est déjà immense ).
Puis "Starving in the belly of a whale" et ses cloches démoniaques et la voix de Tom qui n'a jamais été aussi angoissé et animé par l'émotion, cette chanson doit être beaucoup pour lui, il a rarement eu si peur dans son chant...
L'album se termine par une reprise d'une chanson de Springsteen, "a good man is a hard to find", qui me fout en larmes dès les premières notes... Une reprise supérieure à l'originale, comme Nick cave et sa reprise de "Death is not the end" de Dylan.
Black Rider, Alice et Blood Money sont le sommet de la discographie du vieux Tom le forain, la discographie folle de Tom ne commence qu'à partir de Swordfishtrombones, et à partir de Bone Machine il est roi du rock !
Blood money revient toujours dans ma vie, et à chaque fois le froid dans le dos, l'explosion en larmes, ou les poils qui se dressent, tout est comme à la première écoute, intact. Puis à chaque fois Tom a raison, et je pleure en écoutant ses textes, je regrette de ne pas avoir pu l'écouter un peu plus, alors que je connais sa discographie par cœur avec une centaine d'écoute.. Mais c'est jamais assez, la preuve je le réécoute en ce moment même