Ornette Coleman – Body Meta (1978)
Il fallait nécessairement un album d’Ornette Coleman dans la sélection FJMt°, l’évident « Free Jazz » tendait les bras, raison suffisante pour regarder ailleurs, vers « Body Meta », un album enregistré en décembre 1976 et sorti en 1978, qui est une sorte d’aboutissement pour ce qui concerne l’harmolodie, concept inventé par Ornette que l’on peut apprécier ici.
« Ornette invente le Free Funk ! » constate Philippe Robert en un raccourci imparable. L’altiste est à la tête de son petit groupe avec l’étonnant Jamaaladeen Tacuma à la guitare basse électrique, les surprenants Bern Nix et Charlie Ellerbe aux guitares électriques, et l’incroyable batteur Ronald Shannon Jackson. Tous obéissent aux lois de « l’harmolodie », un jeu de mot et concept qui indique l’union de l’harmonie et de la mélodie.
A l’écoute il est vrai que cette musique est nouvelle, elle est free, il y a comme une indépendance entre le jeu des instruments, mais également une complémentarité, elle semble verticale, dressée vers le haut, mais très solide avec une rythmique de feu pulsée par le solide Ronald Shannon Jackson et l’élastique et fantasque virtuose, Jamaaladeen Tacuma. Les guitares sont également complémentaires l’une plutôt rythmique et sa consœur plus mélodique, l’alto est au sommet de la pyramide il joue droit, mais avec lyrisme. Tout cela fonctionne très bien, c’en est même surprenant, l’effet d’un décrassage musical à l’œuvre, si j’ose.
L’œuvre d’Ornette est immense et je me pose cette question, qu’aurais-je choisi s’il m’avait fallu sélectionner un seul album dans cette discographie pantagruélique mais que je connais assez bien ? Je glisse sur « The Shape Of Jazz To Come » trop facile avec ce « Lonely Woman » toujours cité, non, mon premier arrêt serait certainement sur « Ornette On Ténor » qui, déjà, est parfait et dont l’originalité est dite dès le titre, l’étape suivante tiendrait peut-être la corde avec le sublime « Chappaqua Suite », double LP indémodable et fantastique.
Pour plus d’originalité encore je m’arrêterai également sur « Science-Fiction » aux climats changeants avec cette longue suite de grands musiciens qui se succèdent, mais je lui préfèrerai peut-être « Skies Of America » avec le « London Symphony Orchestra » un grand orchestre au service de l’harmolodie et un quartet jazz de tout premier plan, et, en remontant ainsi le temps j’arriverai à ce « Body Meta », et pourquoi pas ?