Avec le précédent album, Sounds Of The Universe, je me demandais si Depeche Mode n'était pas en train de toucher du doigt "l'album de trop". Eh bien, on ne peut pas dire que ce Delta Machine (dont il faudra m'expliquer le titre) me fera mentir.
La première chose qui frappe c'est la mollesse générale du disque. Ça décolle rarement. Si j'étais méchant je dirais qu'il faut attendre "soothe my soul" pour que ça bouge un peu. Tout ça a de mauvais relents d'Exciter, album mollasson et sirupeux s'il en est. Mais en 2001 l'idée était de sortir de la folie des années 90. Là ils n'ont aucune excuse. Rarement les compos n'ont été aussi fainéantes que sur Delta Machine. Seuls leurs premiers albums dans les années 80 et Exciter (encore lui) sont au même niveau. "Soft touch/raw nerve" en est le parfait exemple. Martin y joue la même note de synthé tout du long. Depeche Mode s'autoréférence beaucoup. On reconnait ici ou là des gimmicks d'époques lointaines. Comme la guitare de "dream on" sur "goodbye" ou l'intro de "the child inside" qui rappelle...à peu près toutes les intros des dernières chansons chantées par Gore. Le tout saupoudré de beats electros légers, d'effets de craquements et j'en passe. Enfin tout ce que peut proposer un bon logiciel de samples. Au niveau des thématiques abordées on a bien sûr les sempiternelles lamentations amoureuses qui doivent couvrir la moitié de la tracklist. Les quatre premiers titres c'est du love, rien que du love. Mais, il y a quand même un thème nouveau : l'isolement, le repli sur soi. Comme "my little universe" ou "broken". En fait tout le disque pue un peu la déprime quand on y pense. Un disque de crise. Je crois pouvoir également dire que les paroles sont certainement les plus mal écrites depuis bien longtemps. Encore une fois on retrouve des automatismes très modiens (genre des mots clés). Martin Gore, qui a pourtant par le passé fait preuve d'une poésie et d'une subtilité à toute épreuve, s'embourbe dans la facilité. L'exemple le plus flagrant : "soothe my soul". Je cite :
"I’m taking my place
By your side
I’m not leaving
Until I’m satisfied
There’s only one way to soothe my soul (there’s only one way to soothe my soul)
There’s only one way to soothe my soul (only one way to soothe my soul)
Only one way (Only one way)
Only one way (Only one way)
Only one way (Only one way)
Only one way (Only one way)"
Ce qui veut grosso modo dire : je vais te prendre toute la nuit, y a que comme ça que je peux me soulager (bis). Subtile, vous avez dit subtile? Je caricature un chouilla mais toutes les chansons d'amour du disque sont écrites à la truelle.
Point d'hymne à l'horizon sur ce Delta Machine. Même Sounds Of The Universe avait réussi à nous pondre un énorme titre avec "wrong". Ici on a quelques bons titres. Enfin, bons, je vais peut être un peu vite. Mais j'aime bien "secret to the end" ou "goodbye" même si clairement je les aurai oublié dans deux ans. C'est ça le truc de cet album : on l'aura tous oublié dans quelques années. Il n'a rien de marquant. Même Exciter, encore lui, a marqué par son côté sexy et son virage à 180 degrés après Ultra.
Delta Machine n'a pas grand chose pour lui. Nom inutilement cryptique, pochette moche, tracklist trop longue, compos peu inspirées, paroles de fond de tiroir et pas d'hymne. Heureusement que quelques titres passent plutôt bien et que Dave Gahan assure encore un minium au chant. Mais Dieu que le groupe a fait mieux. Tellement mieux.