Ils étaient pourtant là avant tout le monde : bien avant les Franz Ferdinand, les Kaiser Chiefs, les Bravery Seul Interpol naissait en même temps, de l'autre côté des grands lacs, pour mener parallèlement la croisade internationale du revival rock tendance new-wave. Formés en 1999, les Canadiens de Hot Hot Heat se sont fait connaître avec Make Up the Breakdown, publié en octobre 2002, aux fortes influences pop début eighties : son froid, clavier furax, voix Robert Smith, affolement XTC' Petit succès, alors que le rat pack new-new-wave commençait à bruisser derrière. Puis, sans entendre que ça s'agitait sévère, que des hordes de jeunes gens aux petits costumes bien coupés reprenaient le flambeau du riff glaçant et du clavier dingo, Hot Hot Heat s'est terré en studio et a pris son temps pour écrire et enregistrer Elevator. Et pendant que Franz Ferdinand et consorts conquéraient le monde, Hot Hot Heat est sorti du mouvement et, dans son coin, imperméable à l'air du temps, a changé de cap, s'est recentré sur la pop, a oublié la froideur des rythmes et l'agressivité de son clavier pour aller vers une légèreté mélodique, des guitares fluides, une voix plus gracieuse ? un peu moins de mécanique, un peu plus d'humanité. A l'image de la touffe frisée qu'arbore le chanteur Steve Bays ? alors que tout le monde a LA coupe bien structurée d'inspiration Human League, avec petite raie sur le côté ?, la musique de Hot Hot Heat est devenue sympathiquement anachronique. Et Elevator est un album attachant et joyeux ? impardonnable, pour les austères fans new-wave de la première heure (d'où quelques critiques méprisantes outre-Atlantique). Elevator, c'est un peu Cure virant Just Like Heaven, un peu Blur période Modern Life Is Rubbish, voire un peu power-pop (Pickin' It Up). Des chansons chaleureuses, gaies, un premier single sautillant et primesautier (Goodnight Goodnight), des hits en puissance (le dansant You Owe Me an IOU), des refrains avec des lalala (Ladies and Gentleman). Un chouette disque hors des sentiers (re)battus en ce moment.(Inrocks)
Il faudrait leur dire. À tous, le hurler. On ne peut pas aujourd'hui réussir un album de treize titres. Ni même plus de onze titres. Pourquoi ? Parce que ça ne se fait pas, c'est tout. D'abord, treize, c'est moche, ou alors il faudrait être sûr de son coup, avoir un plan bien ficelé comme Lawrence de Felt, spécialiste des albums symétriques. Et ensuite parce qu'à moins d'être les putains de Beatles ou Beach Boys en 1966, personne n'est aujourd'hui fichu de proposer un disque aussi long sans se vautrer, compris ? Tant d'évidence n'a pas été rendue chez ces nigauds d'Hot Hot Heat, trop empêtrés dans leur propre succès pour avoir un quelconque recul sur eux-mêmes. Après le départ de leur guitariste Dante DeCaro, les Canadiens ont affronté une crise artistique pénible, et cela s'entend distinctement. Métamorphose, pas métamorphose ? Spé, pas spé ? Finalement ils ont opté pour le changement dans la continuité. Cela aurait pu être une bonne nouvelle de punk soul vitaminé sous influence Dexys si, en guise d'évolution, on n'avait pas hérité d'une surprod sans relief assurée par un spécialiste du genre, Dave Sardy (Jet, The Thrills). Tous les particularismes qui faisaient le charme du groupe ont été gommés : finis les refrains débiloïdes, les claviers accroche-coeurs, les guitares crâneuses. Place à un album léché et de toute façon peu inspiré. Certains morceaux s'en tirent toujours, comme la mignonette comptine Goodnight Goodnight, les arabesques subtiles de Shame On You ou l'hymne superglu Jingle Jangle. Ailleurs, l'étincelle semble presque éteinte. En attendant l'allumette qui rallumera la mèche graisseuse de Steve Bays, filons plutôt déclarer notre flamme à Hard-Fi.(Magic)