J’ignorais totalement l’existence de Giant Drag avant de tomber, par hasard, sur Hearts & Unicorns en fouillant dans les bacs de la médiathèque. La pochette m’a tout de suite interpellé, va savoir pourquoi. Bon, la charmante demoiselle a bien aidé à me convaincre, et je précise que ce n’est pas parce qu’elle écarte les jambes, car le code barre de la médiathèque est collé juste à l’endroit stratégique, non, c’est tout simplement pour la jolie frimousse de la demoiselle qui n’est autre qu’Annie Hardy, la charmante chanteuse de Giant Drag.
En tout cas j’ai fait une bonne pioche car Hearts & Unicorns s’avère être une bonne surprise. En fait, je m’attendais à tomber sur ce genre de musique au vu du package du disque très indie, et ça n’a pas loupé : Giant Drag joue une pop rock dans la plus grande tradition indie. Leur musique est d’ailleurs étonnamment rétrograde car elle évoque davantage le rock indie issu des années 90 que la mouvance des années 2000.
En écoutant Hearts & Unicorns on a l’impression de se retrouver vingt ans en arrière, et il faut avouer que c’est vraiment réjouissant. Les influences du groupe (enfin plutôt du duo car Giant Drag est composé d'Annie Hardy au chant et à la guitare, et de Micah Calabrese qui joue surtout de la batterie et des claviers, le reste étant assuré par des musiciens de passage), bref les influences de Giant Drag sont immédiatement identifiables, et ce dès le premier titre, Kevin Is Gay dont les vagues de saturation évoquent sans conteste My Bloody Valentine (d’ailleurs, le Kevin en question ce ne serait pas Kevin Shields quand même ?!).
La plupart des chansons, pour ne pas dire toutes, sont ainsi parcourues de grosses guitares distordues au son tonitruant. Le charme de la musique de Giant Drag est de coller à ce mur sonore de véritables mélodies pop efficaces qui parfois s’envolent dans des contrées stratosphériques. Le contraste entre la puissance sonore des guitares et la finesse mélodique du chant d’Annie Hardy est excellent. C’est une formule bien connue qui a fait les beaux jours du rock indie.
On pense notamment aux Breeders, le groupe de Kim Deal qui semble avoir autant inspiré Giant Drag que My Bloody Valentine. La simplicité et l’efficacité des chansons de Giant Drag à peine dissimulées par la puissance dégagée et le souci de la mélodie sont très proches de l’esprit des Breeders, Annie Hardy étant d’ailleurs parfaite dans le rôle d'une Kim Deal érigée en nouvelle reine du rock indie. Son chant désinvolte fait des merveilles et incarne idéalement le rock branleur sur les bords et destroy de Giant Drag. Malgré l’aspect légèrement old school du disque qui est un des trucs les moins révolutionnaires qui puisse exister, les chansons finissent par prendre leur envol une fois que l’on a réussi à dépasser les couches sonores qui paraissent pesantes au premier abord.
Car la véritable richesse de Giant Drag c’est bel et bien la qualité des mélodies totalement ébouriffantes. L’album contient ainsi quantité de chansons percutantes, à l’image de Kevin Is Gay, Yflmd (très Breeders avec son riff plombé et son refrain), High Friends In Places, le planant Everything's Worse et le terrifiant My Dick Sucks durant laquelle Annie Hardy s’époumone sur une avalanche de guitares ravageuses. Ce morceau a en plus le bon goût de précéder une autre superbe chanson dans un registre totalement opposé, Smashing étant une perle d’un calme zénifiant avec ses quelques notes de claviers hypnotiques et son chant rêveur. Dans le même genre, Cordial Invitation est tout aussi bonne avec une mélodie magnifique.
Si Hearts & Unicorns était sorti durant les années 90 on aurait sans doute crié au chef-d’œuvre et certaines de ses chansons seraient devenues cultes, car elles ont tout des plus grands classiques du rock indie foutraque. En gros, Kevin Is Gay, My Cordial Invitation, Everythings Worse, My Dick Sucks et Smashing auraient fait office de fantastiques hymnes si une tripotée d’autres titres emblématiques du genre n’avaient pas vu le jour bien avant eux.
Ce qui est bien finalement, c’est que l’on peut considérer Hearts & Unicorns comme une sorte de trésor perdu que tous les fans de rock indie 90’s se doivent d’écouter. Le seul petit défaut de l’album c’est la reprise de Wicked Games, pas mauvaise mais très dispensable (et gavante à la longue) ainsi qu’un long et complètement nul morceau caché qui dure neuf minutes pour trente secondes de bruit de fanfare dissonant naze. Je ne comprends pas le principe du truc si ce n’est faire le mariole genre « pouet pouet ha ha on est des rigolos et on sait s’amuser en faisant n’importe quoi ». Enfin on peut arrêter le disque avant cela, heureusement.