Charles Gayle Trio - Homeless (1989)
Il ne saurait être question de parcourir le free-jazz sans marquer une étape à la station de métro Charles Gayle. Celui-ci les a parcourues les lignes de l’underground et sans doute y a-t-il dormi aussi, quêtant pour subvenir aux besoins essentiels.
Né en 1939 dans une famille très pieuse il a pas mal ramé, il aime le free et joue free, quoiqu’il arrive, c’est son truc, il ne lâchera rien, les concessions c’est pour les autres ! Le succès, ou plutôt une certaine reconnaissance arrive sur le tard, à peu près dans les années quatre-vingt-cinq/quatre-vingt-dix, en même temps que David S.Ware ou Frank Lowe ou encore Arthur Doyle.
Rien de mirifique, mais il a pu enregistrer sur le label suédois « Silkheart » deux totems, « Spirits Before » et celui-ci « Homeless », le titre est à prendre au sens propre.
Je vous ai déjà parlé deux fois de Charles Gayle pour l’album « Look Up » et j’avais écrit ça : « Ce qui est plus ennuyeux chez Charles c’est qu’il émet des déclarations contre l’avortement et l’homosexualité (in the Name of the Father), c’est parfois désarmant de penser que l’amour de Dieu s’accommode de la souffrance et de l’exclusion… »
Bon, il faut considérer que ses opinions sont dictées par une éducation stricte dans la religion et, comme il ne renonce à rien, les croyances perdurent et s’ancrent solidement. Il lui viendra même à l’idée de devenir boxeur à un moment de sa vie. L’autre album qui fait parfois référence, c’est « Touching on Trane » avec William Parker et Rashied Ali, . Une petite merveille.
Tout ceci n’empêche pas le musicien d’être considérable et tout à fait exceptionnel, une pierre brute, un musicien doué d’une grande foi en son art, à la façon de l’Albert Ayler des premiers albums. Humilité, foi et sincérité le caractérisent, lui et sa musique, parfaitement bien. Entouré par Sirone à la basse et Dave Pleasant à la batterie, malgré que le free jazz ne soit plus trop dans l’air du temps, il se donne en entier dans son expression musicale, ne chasse pas le cri s’il semble nécessaire, la plainte si elle s’impose, l’emphase si elle lui va, et la terreur ou la violence si leurs expressions sont exigées.
C’est un mystique, un messager qui, tel un prêcheur, s’en va délivrer sa propre vérité, par l’expression du jazz, libre enfin et pour toujours !
La réédition Cd est augmentée de deux pistes, soit un peu plus de dix-huit minutes pour ce choix FJMt°