Après un premier EP exaltant dans lequel le quintet déployait déjà un impressionnant arsenal de qualités (textes ciselés auxquels une voix et un phrasé habités donnent littéralement corps, instrumentation percutante sachant aussi bien se faire discrète, s'effacer ou remplir tout l'espace), Feu! Chatterton sort enfin son premier album en partie révélé sur scène avant sa sortie.
La première écoute a été pour moi quelque peu déstabilisante : la faute sans doute à ce qui fait, une fois l'album assimilé, sa plus grande qualité : son impressionnante diversité tant dans les genres visités par le groupe que dans le nombre admirable de thèmes musicaux développés au sein d'un même morceau.
Car oui, quel boulot ! Que d'arrangements, que de variations musicales, que de paysages visités ! Et hormis "Boeing" (un peu forcé à mon goût), tout semble couler, fluide, naturel. Si bien que pour des raisons différentes, tous les morceaux procurent au final un même plaisir jouissif : celui d'un voyage littéraire et musical brut et sincère, sans concession ni artifice.
Il se dégage de l'album une unité, une identité presque miraculeuse quand on fait le compte de la diversité des thèmes musicaux proposés. une identité musicale si forte qu'elle en rebutera naturellement plus d'un(e).
Qu'importe, peu de groupes sont capables d'une telle synthèse.
Feu Chatterton ! est un grand groupe. Qu'il me parle des premières amours, des problèmes qu'on croit fuir en partant à l'autre bout de la planète ou des fausses idoles qui n'ont pas la puissance des vrais baisers, qu'il me parle groove, électro ou rock, je vibre au rythme de leurs pérégrinations et de cette langue française qui sonne comme rarement.
En une quinzaine de titres (si on rajoute "A l'aube" et "L'heure dense" présentes sur l'EP), Feu! Chatterton s'impose comme une petite pépite à suivre et à écouter sans modération.