Quand on suit la discographie d'Amon Tobin, on se rend compte à quel point l'univers de l'artiste est riche et éclectique. D'abord très jazzy dans son approche (Cujo), le brésilien à vite flirté avec des influences drum'n'bass et ambient, ce qui marquera le début de sa notoriété avec notamment l'excellent album "Bricolage" ou le très travaillé "Out From Out Where".
On sent déjà le côté expérimental du bonhomme, même si celui-ci atteint son apogée avec ISAM.
Entre temps on notera le très bon "Foley Room", avant dernier album qui introduit la technique de sampling réutilisée sur ISAM.
Bon mais alors ISAM, qu'est-ce que c'est ? Dur à dire en faite. Il m'a fallu 3 ou 4 écoutes pour comprendre le propos de l'album et en retirer toute la complexité. Car c'est de loin l'album le plus inaccessible de l'artiste.Plutôt sceptique au début, l'album a gagné en qualité au fur et à mesure des écoutes.
(Je ne sais pas pour vous mais en général quand ça me fait ça, c'est que l'album va me marquer durablement, à l'inverse d'une écoute où le plaisir est immédiat mais dont je me lasse plus vite.)
Les breaks jazzy/d'n'b laisse place à de l'expérimentation, un empilement de boucles savamment orchestrées pour donner une consistance a un objet sonore non-identifié. Les morceaux sont tous assez différents, le seul point commun est la façon de travaillé avec des boucles assez courtes mais toujours agrémentées, modifiées, distordues afin de donner corps à cette mélasse.
Il a en faite poussé la technique de sampling (des prises sonores de bruits, voix, instruments trafiqués) de Foley Room, en privilégiant le côté bruitiste. Un parti pris intéressant et risqué, qui n'a d'ailleurs pas fait l'unanimité chez les fans. Mais malgré un côté très fouillé et une technique poussée, l'album ne délaisse pas l'émotion, avec des nappes et autres voix angéliques qui apportent une dose de légèreté essentielle.
Au delà des compositions, on ne peut que s'incliner devant la beauté de la production, car là-dessus Mr Tobin ne rigole pas. L'écoute au casque est un vrai régal, j'ai rarement entendu une production et un sound-design de ce niveau.
Globalement, l'évolution et la prise de risque de l'artiste sont pour moi sacrément couillues et mérite le respect. Car au-delà de l'album, il est impensable de ne pas parler du projet visuel qui l'accompagne. Amon Tobin s'entoure d'une équipe de mapping canadienne pour éclairer l'album d'un show visuel impressionnant, basé sur une structure en cube sur laquelle est projetée des vidéos.
Ce mapping est un des plus beau qu'il m'ait été donner de voir, et il apporte une dimension supplémentaire à l'album qui devient une œuvre audiovisuel à part entière. De plus, Amon Tobin a très bien joué son coup puisque qu'il diversifie son public et rend l’œuvre plus accessible grâce à l'aspect visuel (j’emmènerais bien mes parents voir le spectacle alors que je ne leur proposerais jamais d'écouter l'album).
Même si vous n'êtes pas fan de l'artiste, je vous invite à découvrir ce projet vidéo assez incroyable.
En bref, Amon Tobin a su encore une fois se renouveler avec justesse et originalité, et prouve qu'il fait parties des grands artistes de musique électronique.