Critique de Le Chemin par oyoyo
Je sais, c'est facile de leur taper dessus. Mais c'est eux qui ont commencé.
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le 20 déc. 2011
14 j'aime
3
Il est de ces groupes que l'on a écouté ado et que l'on écoute encore ado (j'ai 24 ans je suis pas vieux hein), au détour de la lecture aléatoire de son mp3. Ces groupes là, on les rééecoute en y prêtant plus attention avec du recul. Kyo en fait partie. Ce fut quand même un des grands groupes de rock jeune des années 2000, qu'on le veuille ou non. Le Chemin est sorti en 2003.
Parfois c'est lucide, parfois c'est cul-cul, parfois on y croit
Soyons honnêtes, ça s'écoute bien. Des mélodies simples mais catchy, trois riffs qui se battent en duel mais qui structurent l'ensemble. Surtout une force qui transpire à chaque instant, celle de la jeunesse. Kyo avait compris ce qu'on vit à l'adolescence. Du haut de nos 15 ans, on avait l'impression d'avoir déjà vécu une vie. Ce qui est le cas, en un sens ! Le groupe pose son regard sur le monde d'un ado ou post-ado. L'ensemble oscille entre naïveté et candeur. Je vais juste donner ma définition des deux termes pour que ce soit clair. La candeur est poser un regard vierge sur ce qui nous entoure et opposer son idéal à la réalité de sa vie. Un regard d'enfant sur le monde si on se la joue nietzschéen. La naïveté, par contre, c'est croire que le caprice suffira pour s'en sortir, ne pas tirer d'enseignement de cette opposition.
Exemple : dans la chanson-titre, Le chemin "On a parcouru des chemins, on a tenu la distance et je te hais de tout mon corps mais je t'adore". A 24 ans, une relation d'une telle force, cette idée que l'on a vu le début et la fin de l'histoire, ce n'est pas vraiment crédible. Mais ça fonctionne ! Kyo est ici candide, dit que l'on a déjà tout vécu à 25 ans. Pour quelqu'un de mon âge, voire plus jeune, ça a du sens. Car on ne veut pas attendre de vivre ! De l'autre coté du spectre, des chansons comme Je saigne encore défient le bon sens. "Ce qui ne me tue pas me rend plus fort mais moi mais moi je suis déjà mort". NON NON NON. On a tout vécu oui mais on n'a pas eu le temps de mourir non plus. D'autres sont juste cul-cul, comme Dernière Danse, même si le "Merci d'avoir enchanté ma vie" après la rupture est étonnamment lucide.
Kyo pourrait n'être cependant qu'un groupe emo, qui chouine tout le temps (même si le terme est anachronique a quelques années près) mais il défend aussi une vision d'espoir. La chanson Je cours est ma préférée pour cette raison-là. Au constat de lucidité "Je dois tenir et construire mon futur, sûr que c'est pas gagné" et au laïus classique "Juste un peu de place pour ne pas qu'on m'efface, je n'ai pas trop d'amis" est opposé un message d'espoir : "Mais j'assure mes arrières pour connaître l'amour et le monde". A 20 ans, on a certes beaucoup vécu et/ou la vie n'est pas rose mais on y croit, on a la niaque putain!
Ah merde il faut devenir adulte
Et les deux albums suivants? Là, Kyo nous offre une leçon de vie. Une leçon très lucide. Trop. Déprimante. L'album sorti en 2004, 300 Lésions, ne contient que peu de messages d'espoirs. Ne regardons que les singles... A part Contact qui fait office d'hymne avec clip de skateurs en bonus, on trouve Sarah où le mec se demande pourquoi il mérite la fille (je suis passé par là et je me trouvais très con alors imaginez un mec qui le met en chanson) et Qui je suis, l'exemple de la mégalomanie égocentrique mélancolique adolescente ("Je suis perdu à jamais dans une autre vie". SERIEUX)
Après quasiment dix ans de pause sort L'Equilibre. La leçon à retenir est simple : à 20 ans, on est le roi du monde, plein d'espoir (Le Chemin) et d'égocentrisme (300 Lésions). A 35 vient la désillusion. L'album est déprimant au possible. Tout a chuté, les espoirs et les fantasmes. On y croyait mais rien ne nous sauvera. Encore 10 ans avant d'être mort à l'intérieur. Merci Kyo.
Un truc générationnel tu vouas
Revenons sur Le Chemin. Kyo a été comme je l'ai dit plus haut LE groupe de rock jeune des années 2000. A ce titre-là, on peut le comparer à Téléphone dans les années 1980 : un groupe représentatif de cette époque avec des chansons festives (Ca C'est Vraiment Toi) et certaines plus politiques (La Bombe Humaine, Je rêvais d'un Autre Monde). L'ambiance au passage du XXIe siècle alourdit l'ensemble. Kyo fait déjà peu de festif mais quand il fait de la politique, c'est pour la rejeter (dans Tout Envoyer en l'Air, "Je veux seulement des visages et des corps en ébullition"). Notre génération ne veut plus changer le monde. En tout cas, elle ne veut plus espérer, comme a pu le faire Téléphone. Juste se faire plaisir. Kyo devient le symbole d'une génération dépolitisée.
Pour conclure après cette extrapolation assez violente, je finirai juste sur une remarque. J'ai vu plusieurs fois que les "bonnes" notes attribuées à cet album sur ce site était associées à la remarque "Oui mais j'étais jeune". Sérieusement les gars, vous aviez pas aimé Kyo parce que vous étiez jeune mais parce que vous aimiez, simplement. Assumez votre jeunesse. Il y a tellement plus de choses à regretter dans sa vie que d'avoir écouté Kyo à 14 ans. Ou à 25.
Créée
le 23 sept. 2015
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