"Et sans hésiter elle nous dessine le petit chose et les deux orphelines"
Ces vacances furent, pour moi, l'occasion de faire un grand retour en arrière. Revenir vers mon enfance et ma prime adolescence, à l'époque où j'étais encore jeune, beau, insouciant et optimiste. Dans ce grand moment de fuite des réalités, j'ai donc relu des livres de la Bibliothèque Verte (Les six Compagnons, en éditon d'époque, merci aux diverses brocantes des environs) ou mes premiers Stephen King.
Et puis, j'ai enfin commencé ma collection intégrale de Pierre Perret.
Et Pierre Perret a le Zizi incontournable.
Mes parents avaient ce 33 tours qui a bercé mon enfance. C'est grâce à lui que j'ai découvert Pierre Perret. C'est dans les méandres de ce Zizi que j'ai façonné mon amour de la langue argotique que le monsieur utilise à merveille. Peut-être même est-ce dans ce Zizi que j'ai trouvé l'intérêt pour la chanson française en général (bien avant Brassens et Gainsbourg).
Cet album est un concentré des qualités et talents de Pierre Perret (à part les chansons politiques, qui ne sont pas représentées ici). Depuis la chanson joyeusement (et gentiment) paillarde jusqu'au tendre portrait de Julia ou Emilia. Depuis la parodie de mode d'emploi incompréhensible (La Photo) jusqu'à la très belle mise en musique d'un sublime poème d'Apollinaire (Marie). En passant, bien sûr, par les sages conseils du chanteur pour réduire en miettes le service hérité de grand-maman (Vaisselle Cassée).
Pour moi, Pierre Perret, ce sont d'abord des paroles. J'adore son utilisation de l'argot et les images qu'il emploie :
"Sous son pull-over
Ses petits ballons fiers
Sautaient comme des pommes en friteuse;
Des combles au sous-sol
ça criait "Au viol !"
C'était beau comme une image pieuse !"
ou encore :
"On était triste, affamés tristement
Onze lardons, quel naufrage !
Ma mère chialait dans le potage.
Y'a que le grand-père qui se poilait tout le temps
Il planquait des pétards sous le pétrousquin de la mère-grand"
Mais même quand c'est la tendresse qui parle, les mots de Pierre Perret roulent tout seuls, ils coulent avec beauté :
"Dès qu'elle m'a trompé,
ça la fait pleurer
Et elle fait rotir un cierge pour se faire pardonner
Et elle ment, elle sourit,
Elle menace, elle caresse
Et elle pleure,
Mademoiselle
L'Infidèle,
Elle a des taches de rousseur
Qu'elle efface avec douceur
De ces larmes qui font déborder son coeur".
Ma découverte, en écoutant à nouveau cet album, c'est la qualité de la musique. Elle colle magnifiquement aux paroles, joyeuse quand il le faut, ou subtile, voire mélancolique (pour Marie, sur le poème d'Apollinaire).
En bref, un fort bel album, d'un artiste que j'aime beaucoup et que je redécouvre avec bonheur.