Avec chacune une guitare et un micro, Carlotta Cosials et Ana Perrote forment un duo redoutable. Elles sont le poumon de Hinds, groupe madrilène qui comprend également une bassiste et une batteuse, et dont Leave Me Alone est le premier album. Vous ne manquerez pas de remarquer que ce groupe est entièrement féminin, ce qui est un choix assumé de ces nouvelles venues dans le monde de l’indie rock.
Leurs compositions sont calées, fraîches, entraînantes, avec une touche lo-fi des plus savoureuses. Leurs influences vont de Ty Segall aux Strokes en passant par les Vaccines. C'est donc un album bien de son époque, qui n’évoque que de manière indirecte le rock des années 1960. Elles maîtrisent leur style de façon irréprochable et produisent un son original et de qualité – selon les critères lo-fi, bien sûr.
Ces douze morceaux sont un peu les anti-héros de la perfection, et c'est ce qui les rend attachants. Elles ont la science de viser juste sans le laisser paraître et y prennent un plaisir qui est d'autant plus visible en live. L'équilibre entre dynamisme et apathie est dosé de telle manière que de petites touches d'agacement, de douceur ou d'introspection par-ci par-là confèrent à cette musique une véritable personnalité. Il n'y a pas deux rythmiques identiques. Au-delà de la voix, le duo de chanteuses a deux manières de chanter très différentes – plus tonitruante pour Carlotta – ce qui participe également de l'identité de Hinds.
Voilà un bon exemple de musique où simplicité va de pair avec richesse. Les morceaux n’ont objectivement rien d’exceptionnel en termes d’instruments, de structure, de durée ou même de paroles, mais ils transpirent d’humeurs uniques et offrent à l’auditeur un divertissement haut de gamme comme les Beatles savaient le produire. « Castigadas En El Granero », « Bamboo » ou encore « Warts » contiennent de ces lignes et grilles d’accord qu’il aurait fallu inventer si elles n’existaient pas.
Vivement la suite !