Eblouissant.
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«Nous sommes le Feu! Chatterton pour vous servir» : c’est avec cette formule solennelle et protocolaire que le groupe introduit son concert au Zénith de Paris, le 14 avril 2022. Arthur, Sébastien, Clément, Antoine et Raphaël prolongent cet instant en publiant un disque live à l’occasion de leur dixième anniversaire de carrière. «À l’origine, on est cinq copains qui ont commencé un peu plus haut sur le boulevard Jaurès. Se retrouver là ce soir c’est quelque chose !», lance le premier. Au programme, dix-neuf titres à l’énergie rock, déroulés sous les applaudissements nourris du public, qui nous plongent dans l’univers flamboyant de Feu! Chatterton. Les morceaux, dont certains datent de leur premier maxi sorti en 2014, sont loin des versions studio – en particulier une Malinche déconstruite dans une longue jam tribale de plus de onze minutes en guise de final. Capturées sur scène, les chansons sont forcément plus exaltées et/ou fantaisistes – sans compter les mises en abyme trippées du chanteur et les appels du pied à son auditoire tout au long du set. Une fresque tour à tour apaisée et angoissée pour des temps déconfinés. Fini l’oisiveté, le leader de Feu! Chatterton nous embarque sur l’infini des mers à bord d’un très grand bateau (Côte Concorde), propose à cette salle pleine à craquer d’avaler le soleil dans un ton énigmatique (L’homme qui vient), puis invite ses passagers d’un jour à se lever dans les travées pour danser (Boeing) ou faire l’amour dans une forêt de pins (La Mort dans la pinède) et enfin, les guide vers un monde que nous espérons tous (Monde nouveau). Autant d’invectives lancées à la foule et qui racontent une histoire. On ne sait pas si c’est l’orée ou le bout de ce monde nouveau qui les courtise, mais l’exaltation est palpable. À la scène, Arthur Teboul porte une théâtralité assumée, excessive et fondamentale – un goût qu’il cultive moins dans la vie, de son propre aveu. «Ça ne m’intéresse plus trop de le faire au quotidien, dit-il, parce que j’ai la chance d’avoir un espace sur scène pour entretenir très fort cette part de moi-même. Les gens qui me rencontrent aujourd’hui sont surpris généralement quand ils me voient sur scène, parce qu’ils ont vraiment l’impression d’un homme aux deux visages, presque en contradiction. Les comédiens qui n’ont pas l’occasion de jouer le font beaucoup dans la vie. Cela doit être un peu fatigant pour les autres. J’ai une chance très grande d’avoir l’occasion d’exprimer cette part de moi-même sur scène, et à la limite, je la lui réserve, même si je la cultive intérieurement, pour qu’elle s’exprime avec encore plus de précision.» En rappel (et c’est probablement ici que réside la plus grosse surprise) résonne un poème d’Aragon, qui s’inspire d’une lettre de Missak Manouchian à sa femme Mélinée, avant d’être fusillé au Mont-Valérien, en février 1944. Il lui donne la liberté de vivre quand il ne sera plus là. Il pense à sa vie à elle plutôt qu’à sa mort à lui. Autrefois mis en musique et chanté par Léo Ferré sous le titre L’Affiche rouge (en référence à la propagande de Vichy et de l’occupant allemand), en 1959, le poème dans sa version Feu! Chatterton, que les fans connaissent déjà – car le groupe l’a interprété plusieurs fois en live –, apparaît pour la première fois sur disque. Soixante-dix-huit ans après, la montée des extrêmes droites en Europe lui donne une triste résonance. Le groupe montre son acuité autant dans l’intime que le politique. Si Feu! Chatterton passe cent jours sur la route chaque année, le concert au Zénith n’en est qu’un exemple. Ce disque leur permettra peut-être de décrocher cette Victoire tant désirée (album live de l’année) pour transformer la petite histoire en grande histoire. (magic)
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Créée
le 19 janv. 2023
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