Vous voulez plonger dans un des groupes les plus fascinants, manger des fraises succulentes, voici le pique-nique tout indiqué.
En décembre 68 Strawbs entre pour la première fois dans la vénérable BBC, qui, à l'époque , n'est pas une radio sur l'acide ! Plus straight que ça tu meurs.... Mais les choses commencent à bouger depuis un an...Et voici un groupe qui promet...et l'ingénieur du son est le mythique Tony Visconti!
Le menu s'ouvre avec The Battle, un titre mythique des Strawbs . Le trio de musiciens: Cousins évidemment à la guitare Chesterman à la double basse et Tony Hooper à la guitare. À eux 3, ils arrivent à un son magique... La contrebasse est jouée avec archet et il y a un orgue aussi mais personne n'est créditée... Un superbe titre.
Poor Jimmy Wilson est interrompu dans son ouverture par l'annonceur de la BBC. C'est un titre joli, légèrement folk, très efficace qui trouvera de meilleures interprétations sur la version studio avec du clavecin.
That with Was Once Mine, violoncelle, flûte et harmonies vocales. Et surtout cette voix de Cousins si magnifique, si sous-estimée dans le prog-rock. Le titre est encore un peu folk mais on sent tout le progressif qui se pointe. Avec une touche de médiéval, c'est une superbe chanson , très touchante. La finale flûte, guitare nia rien à envier à Jethro Tull, c'est d'une maîtrise absolue, mais ici, sans notes superflues....
Another Day ouvre la session d'août 69, on y voit des intonations qu'on retrouvera sur Bursting At The Seams. Une chanson entraînante et joyeuse avec violoncelle de Clare Deniz (?). We'll meet Again Sometime est dans la même veine. Ce sont les deux titres les plus susceptibles d'accrocher un public en cet été 69. Très marqué, ils annoncent la fin d'une période, celle du violoncelle et d'une rythmique folk.
La session d'octobre 70 avec Rick Wakeman, le duo Hudson-John Ford fait sa première apparition ici,Tony Hooper est encore là, et Cousins évidemment. On sent l'influence des Beatles avec la sitar, flûte et traitement des voix. Joli titre. Mais la perle de cette session est tirée de From The Witchwood c'est la magnifique : Song For A Sad Little Girl. Une des petites compositions dont Cousins a le secret et où Wakeman fait chanter son piano , avec une précision magistrale. Des cascades qui s'évanouissent, tout au service de la chanson, ici pas d'exhibition, que du talent pur.
Et cela enchaîne avec l'orgue rapide de la session de juin 71. Wakeman va délivrer avec The Hangman and The Papist , une des ses plus grandes prestations avec les Strawbs. La chanson est vertigineuse , il faut entendre cette orgue qui va et vient, ses drums militaires et la voix crucifiée de Cousins.
Witchwood est magnifique, c'est un titre culte, un des derniers légèrement folk, l'instrumentation est délicate. Cousins y joue du Dulcimer et sa voix ici devient douce, Wakeman y est à peine audible , sinon par la flute jouée aux claviers.... La mélodie vous hantera longtemps...
5 mois plus tard le 30 novembre 71 voici le début du Strawbs totalement progressif....exit Wakeman parti joué les virtuoses chez Yes... Et cela a tellement fait rager Cousins qu'il a composé : New World avec son célèbre : “May you rot in your brave new world” ....mais avant on a droit au superbe Benedictus, qui comme son titre l'indique est une prière classique. La guitare électrique de Hooper se fait entendre et le clavier du nouvel arrivé: Blue Weaver est fort joli aussi. Un grand titre de Strawbs qui sera joué à presque tous les concerts. Un hymne hippie inspiré du catholicisme mais ici rendu avec superbe . New World est introduit par l'animateur de la BBC dans la plus pure tradition radiophonique. New World , si elle a été composée par la frustration de Cousins devant ledit départ de Wakeman, transcende vite cette petitesse thématique pour atteindre une ampleur universelle. L'orgue de Blue Weaver est superbe mais le titre souffre de la compression radio et obtiendra de plus grandes versions live. Toutefois la voix de Cousins est ici proche de son apogée.
La session d'avril 72 s'ouvre sur la magnifique guitare électrique de Hooper et l'orgue en feu de Weaver et Cousins martèle le texte avec une voix rageuse... Le titre est un des plus puissants de ce volume 1 . En feu ! Et quand la tristesse s'installe , on découvre à quel point , ce band est capable dans une même chanson de se promener d'une émotion à l'autre .... La finale est magnifique et retourne à son brasier électrique.... Du très grand Strawbs...ici on est pas loin de King Crimson ...Bon on se calme un peu avec Is It Today Lord , et ce son de sitare et ses harmonies si propres à Strawbs. Un très joli titre, très Beatlesque. Heavy Disguise continue dans la même veine, avec une rythmique à la guitare entraînante. La voix s'approche un peu de celle de Lennon ! Et ce titre aurait pu être sur l'album blanc des Beatles après Blackbird.
Et nous voici avec une nouvelle version de New World (la deuxième de ce BBC) . Le son est plus fort, la chanson est plus rodée, le band plus tight et ça paraît. L'orgue de Weaver est encore plus majestueux, la guitare acoustique est superbe et la basse a pris du muscle. Et Cousins délivre ici une autre immense prestation vocale. Mais ce qui différencie cette version ce sont les guitares acoustiques si claires et si prenantes. Et le band complètement soudé.
Here It Comes est un titre amusant, qui déparaille un peu l'enchaînement. Les tablas sont omniprésents et Cousins chante avec un sourire dans la voix. le titre reste un peu faible.
Janvier 73 , de retour à la BBC et voici l'entrée de Dave Lambert qui marquera fortement le groupe de sa guitare électrique. Lady Fuchsia ouvre la session , une chanson de Hudson-Ford qu'on retrouve sur Bursting At The Seams. Avec Part Of The Union qui fui suit, et qui fut un gros hit en Angleterre, nous avons la dernière marque du duo qui ira voler ensemble sur des albums studio. ce duo a un aspect plus commercial et fait disparaitre les compositions de Cousins. D'ailleurs il en a aucune dans cette session. On sent la rupture qui s'annonce avant que Cousins reprenne le contrôle du groupe. Avec raison. Part Of The Union est un très bon titre à l'air qui s'insinue et sa thématique sur les syndicats au début des années 70 a eu une grande résonance en Angleterre. Un très bon hit!
La session se termine par The Winter And The Summer est un très beau titre doux avec flutes. On pense un peu au Genesis de Trespass. Une jolie finale toute en douceur avec finalement un peu de mordant par Cousins qui chante.
Cet album montre la richesse du groupe, de ses débuts très folk à ce son qui mènera au triomphe de Wakeman avec le groupe et à l'incendière New World ! Il annonce le tome 2 beaucoup plus brûlant avec cette orgue , encore en feu, qui finit l'album. Ledit tome 2 qui est entièrement faits de concerts intégraux pour la BBC alors que celui-ci est fait de sessions courtes pour La BBC.
Mais commencer donc en dégustant celui-ci avec une coupe de champagne et des fraises des champs! Vous amènerez le magnum pour le volume 2 !