Notre conscience
Depuis plus de 30 ans, Manset est notre conscience (du monde qui bruit, de notre vie qui fuit) et notre souffrance (de la société qui détruit, de notre incapacité à agir), mais c'est aussi celui...
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le 8 août 2014
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On ne l'attendait pas et il est apparu, douzième album d'un chanteur discret, mais finalement prolixe, qui trace sa route dans l'ascétisme médiatique. Disque surprise, donc, mais pas surprenant, et dont il émane un parfum assez fascinant. C'est Manset tel qu'en lui-même, les mélodies minimales et répétitives, le chant plaintif et lancinant. Débarrassé des tentations rock qui l'avaient alourdi ces derniers temps, renouant avec les chansons hypnotiques de six ou huit minutes, où la voix, poussée parfois au bord de la rupture, nous pousse à notre tour dans son tourbillon de mots raffinés et enivrants. Manset dit, chante, demande dans des suppliques entêtantes : « Mais c'est où ? Mais c'est où ? » Et on le suit, parfois malgré nous, fâché avec un monde qui l'effraie, nostalgique d'un ailleurs perdu ou fantasmé. Rêve d'Amazonie mais cauchemar angoissé des villes mécaniques : l'album s'ouvre sur une chanson écrite pour Bashung (Comme un Lego), et la version qu'en donne Manset est encore plus tendue, puissante quoique fragile - puissante puisque fragile. A 63 ans, celui qui fut longtemps distant avec son chant glacé se fait soudain très proche. Etonnamment émouvant. (Télérama)
Un nouveau Manset qui débute comme le "Knocking on Heaven's Door" de Dylan, avec des chœurs bouche fermée, c'est plutôt un bon présage. Ce "Comme un Lego" qui ouvre le disque, on l'a déjà entendu chez Bashung, qui l'a fait sien de belle manière sur "Bleu Pétrole" ; mais son auteur se le réapproprie de façon magistrale après quelques coups de gomme et de crayon : si Bashung l'avait habillé, Manset se plaît à le dépouiller. Et force est de constater que la chanson, accompagnée de piano, d'orgue Hammond et – audace suprême – de chœurs gospels, renforce encore son incroyable magnétisme. Le dépouillement, ou en tous cas une certaine austérité, c'est le ton qui prédomine sur ce "Manitoba ne répond plus", un ton qui tranche avec les derniers albums et qui rappelle les premiers disques du solitaire : Manset sème en effet dans ce disque, comme autant de pierres, les indices du passé : comment ne pas penser à l'album blanc ou à "Lumières" à l'écoute de ces longs titres accompagnés de piano ? Comment ne pas reconnaître un Manset intemporel à l'écoute de cette réverb excessive qui accompagne la voix ou de ces arrangements de cordes omniprésents ?
Et puis il y a la voix de Gérard Manset, inimitable bien sûr, mais sur laquelle on sent désormais peser le poids des années ; Manset ne fait rien pour en dissimuler les faiblesses, les limites, ce qui rend son chant d'autant plus émouvant sur des titres aux mélodies fines comme "Dans un jardin que je sais" ou "Dans mon berceau j'entends". Car, dans l'ensemble, les morceaux sont au rendez-vous, de l'assez rock "Pays de la liberté" au folk très sombre de "Genre humain", en passant par le presque bucolique "Ô Amazonie" ; des titres toujours à mi-chemin entre la chanson et le rock, qui ressassent les mêmes thèmes de paradis oubliés et de monde dont on ne peut rien sauver. Mais la force de cet album, c'est cette unité de ton qui, même si elle regarde en arrière, en fait un disque que l'on écoute d'un trait, comme ces disques qui ont forgé le mythe Manset.(Popnews)
Plutôt que disserter sur le statut de Manset et l'exception que constitue le fait de jouir d'une telle notoriété depuis des années sans jamais avoir renoncé à la discrétion, force est de reconnaître que lorsqu'on a aimé un de ses albums, on ne le quitte plus. On peut ne pas le suivre dans une des nombreuses directions qu'il a explorées, mais on garde une oreille à l'affût, sûr qu'on va replonger un jour. Cette année, Manset a déjà fait l'actualité : il a participé à l'écriture du dernier Bashung. Comme pour tisser un fil avec cet album, "Manitoba ne répond plus" s'ouvre sur Comme un légo, présent sur "Bleu pétrole". Sans être musicologue, comparer les deux interprétations se révèle passionnant. Chanté avec puissance et gravité chez Bashung, le morceau est abordé avec plus de distance par Manset, mais son interprétation laisse parler la limpidité du propos et de l'écriture. Sur la forme, "Manitoba ne répond plus" appartient à la ligne claire de Manset. C'est dans ce format chanson qu'il a façonné qu'il imprime le mieux sa patte. De prime abord, les morceaux semblent écrits pour porter les textes, chantés d'une voix toujours égale, sans altérations et cependant inimitable. S'y expriment les mêmes doutes sur le monde (Le pays de la liberté), la condition humaine (Comme un légo), les mêmes envies d'ailleurs (Ô Amazonie) que dans l'ensemble de son oeuvre. Mais plutôt que de passer pour un misanthrope reclus, Manset se révèle souvent proche de son auditeur, il laisse fréquemment se briser l'armure et exprime ce qu'il est vraiment : un homme qui se débat avec les mêmes interrogations que tout un chacun à travers un sens hors-pair de l'écriture de textes et de musiques. Car c'est lorsque l'on rentre complètement dans l'album et qu'on prend toute la mesure des mélodies qu'on est le plus bouleversés. Manset a le génie des attaques de morceaux, aspect d'une chanson auquel on prête finalement peu attention. Et pourtant, en quelques notes de piano (Ô Amazonie) ou de basse (Aux fontaines j'ai bu), on prend déjà la dimension de ce que l'on écoute et de ce qui est à venir. Arrangements soignés et sobres, structures qui défient souvent les lois du traditionnel couplet/refrain sans tomber dans l'expérimentation pompeuse complètent le tableau. En conclusion s'impose une évidence : dans sa singularité, Manset a le pouvoir de s'adresser à tous, toutes générations confondues, toutes chapelles musicales abolies. C'est facile de comprendre que c'est la formule de la longévité, c'est autre chose de savoir lui donner corps. (indiepoprock)
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Créée
le 26 févr. 2022
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