James Brandon Lewis Quartet - Molecular Systematic Music (2022)
Voici le retour du formidable James brandon Lewis Quartet, cette fois-ci pour un double Cd live à la « Rote Fabrik » de Zurich, le quinze mai deux mille vingt et un. L’album est paru il y a peu, pas encore répertorié sur Discogs, près d’une heure trente de musique torride avec de nombreuses parties improvisées.
On se croirait parfois revenu au temps de John Coltrane, quand il jouait une pièce et la faisait exploser dans la durée, c’était d’ailleurs là une de ses marques qui interpelait à l’époque et lui valait même des critiques parfois. Lorsqu’il fouillait les thèmes et les faisait exploser, pour mieux en faire le tour et en exploiter les moindres subtilités, jusqu’à les décortiquer à l’os.
Ici c’est un peu la même chose, tous les morceaux joués proviennent du même album, le somptueux « Molecular » paru en octobre deux mille vingt. Il contenait onze pièce, James Brandon en choisit neuf et exclut « Per 1 » et « Per 2 », c’est dire s’il joue quasi l’entièreté de l’album, excepté les deux pièces les plus courtes, quatre minutes à elles deux.
Ensuite ça dissèque grave, toutes les durées sont au minimum doublées, l’improvisation est la règle éminente ici, donner du poids, de la masse à ces compos pour en extraire le suc et plus encore. On retrouve le quatuor au complet, les quatre merveilleux, Aruán Ortiz au piano, Brad Jones à la basse et Chad Taylor à la batterie avec, bien entendu, James Brandon Lewis au saxophone ténor, il est également l’auteur des toutes les compositions.
La musique de James Brandon Lewis bénéficie aux States d’une reconnaissance avisée de la part d’un très nombreux public, ce n’est pas tout à fait un hasard si j’ai évoqué Coltrane au-dessus, car on retrouve une même curiosité musicale, une même énergie et ce désir de toujours vouloir creuser, décortiquer, une volonté d'aller toujours plus loin qui renvoie plus de cinquante années en arrière, comme si tout n’avait pas été dit et qu’il fallait encore retrouver cette identité-là.
On ne retrouve cependant pas cette plongée éperdue dans le free jazz qui termina la quête Coltranienne, bien qu’il y ait des éléments free dans la musique de James Brandon et assez souvent lors des impros, il prend garde à ne pas dépasser les limites apparues lors d’un « Love Supreme », ce qui lui donne un aspect plutôt rassurant.
Sa musique est moderne et n’a rien de revivaliste, il aime les mélodies et les jolis thèmes, en se campant souvent aux limites du déséquilibre, sans toutefois se laisser aspirer, funambule habile, il préfère une attitude optimiste et sereine. Sa quête est sans doute spirituelle également, bien que je n’en sache rien, on le ressent à l’écoute de sa musique, les mystiques des temps passés semblaient partager ce même chemin…
Toutes les sorties de James Brandon sont exceptionnelles, mais j’ai l’impression qu’ici il franchit encore un cap.