Sa majesté des mouches

On en sort avec un mal de crâne fou, tout droit sortis d’un monde parallèle étrange, effrayant, fascinant. Un bad trip en ne prenant absolument rien, ou l’on va d’enchantement à délicieuse horreur sans temps morts. Le tout observé par ces masques effrayants de mouches planants au-dessus de cette planète ignorée, peut-être même crainte par les raisons les plus rigides de notre bas monde. La scène est orgasmique, elle l'est encore plus pour tout amoureux de l’absurde. L'orgasme lui même prend corps sur “Heaven”, morceaux d’or parmi les flots sinueux de sons. Il reste même de la place pour un rêve humide mis en musique, c’est cadeau, c’est le “Daydream in blue”. Notre réalité est déformée, atrophiée par les mouches, soumise à l’étrange prisme onirique, sexuel, détraqué des milles facettes de leurs yeux globuleux, “You’re not going down” était répétée sur l’entêtante “Hey Mrs", et cette planète restera après l’écoute insidieusement jouée par notre inconscient, peut être même que Freud était lui aussi une mouche. Alors nous prenons place, témoins, d’un univers dont nous ne sommes plus les maîtres, d’un univers ou la contradiction est enfin assumée, ou tout est perverti, les vices libérés de leur carcans. Sur cet album on jouit, on se fait peur, on rêve, on fantasme. La confusion des sentiments approche la perfection sur “Who Is She”, angoissément attirant. Bien sûr un tel album ne pouvait s’achever qu’avec un dialogue fou avec le diable sur “Lucifer”. Bien heureux celui qui parle de logique, d’ordre, de genre bien défini sur un disque pareil tant ce dernier multiplie ses ambiances. Ca tombe bien il ne pouvait peut être pas mieux dans la beauté de son excentricité …
Sur cet album on s’amuse, nous les monstres. Je n'ai jamais autant aimé les mouches de ma vie après celui-ci.