John Zorn – Nove Cantici Per Francesco D’Assisi (2019)
Alors que j’écoutais les « Gnostics Preludes », je pensais immédiatement à cet album, dont l’esprit me semblait très proche, et qui m’avait véritablement emporté lors de sa découverte, dans des circonstances assez particulières, mais j’y reviendrai.
Bien qu’une analogie importante se manifestât dans l’instant, je balayais cette proposition car elle ne pouvait correspondre à la demande énoncée, la sortie ne correspondant pas du tout à la date estimée. Cependant, je me dis que même si ça ne vaut pas un souvenir solidement ancré avec son pesant d’émotion, il pourrait peut-être plaire et devenir quelque part l’ombre de l’album-fantôme et s’en approcher.
Les circonstances qui me virent en possession de ce vinyle doivent plus à Zorn lui-même qu’à un choix personnel, ou à une recherche particulière, en voici le récit raconté de façon brève. Tout commence avec la parution du coffret de onze Cd « Book Beri’ah » dont je m’étais porté acquéreur. Zorn avait tourné le dos à Tzadik pour travailler avec « Pledge Music » qui offrait probablement de meilleures perspectives. L’affaire se déroula normalement, les coffrets furent enregistrés et expédiés, mais les ennuis arrivèrent rapidement, « Pledge Music » mis la clef sous la porte et Zorn se retrouva avec un déficit estimé à environ 200 000 $.
Piégé, il lui fallait faire face et récupérer de la trésorerie, c’est ainsi que je reçus dans ma boîte mail, en même temps que tous les autres acheteurs du « Book Beri’ah », une offre pour acheter quatre albums vinyles en édition limitée et en achat groupé. Je décidais de participer au sauvetage et c’est ainsi que je reçus ce précieux volume, l’un des quatre envoyés. C’est donc Zorn lui-même qui décida du choix des albums, et je dois dire qu’ils sont tous les quatre d’une grande beauté.
Il y avait « Alhambra Love Songs » avec Rob Burger, Greg Cohen et Ben Perowsky, « The Last Jugement » avec Mike Patton, John Medeski, Trevor Dunn et Joey Baron, Masada avec « The Best of Sahnedrin » et donc celui-ci « Nove Cantici Per Francesco d’Assisi » avec Bill Frisell, Julian Lage et Gyan Riley, un exquis trio de guitaristes.
L’album est inspiré par la vie et la pensée de Saint François d'Assise, il se découpe en dix pièces qui s’enchaînent comme une véritable suite, elle fut jouée lors d'une résidence au Frick Museum de New York. Un tel album ne s’inscrit pas vraiment dans un genre, bien qu’on le classe invariablement dans le « jazz », il embrasse à la fois la musique de chambre, la musique improvisée et peut-être même le folk et la musique flamenco, bien qu’on ne puisse à aucun moment écarter ce qui en fait sa véritable identité : la musique spirituelle.
Un album où coulent des perles de beautés, évoquant tantôt la nostalgie, les souvenirs anciens, les sentiments voluptueux et, lors du dernier thème, la méditation que l’on situe dans le désert, en compagnie de Saint François…