Répression sournoise
[...] Bref, Obscene Repressed, c'est un peu de concessions certes mais pour servir un propos d'autant plus généreux, plus à même de s'inscrire dans le temps qu'une énième forme d'agression gratuite...
Par
le 9 avr. 2020
1 j'aime
Benighted est de retour pour un neuvième opus pour le moins marquant. Dès les premiers sons, nous sommes happés par une vague de violence musicale inouïe qui nous plonge dans une atmosphère horrifique glaçante dont-il est difficile de sortir. Mais la baignade est-elle agréable ?
L'album repose sur la proposition originale d'appréhender l'histoire et la sensibilité d'un protagoniste anti-héroïque, victime à la fois d'une malformation physique et d'une maladie mentale. On comprends au fil des morceaux le caractère violent de son quotidien qui contribue à alimenter chez lui une rage exponentielle. La fureur se transcrit musicalement par les rythmes effrénés de la batterie à tout rompre, qui résonnent dans notre esprit comme les battements du cœur accélérés par les fortes émotions que ressens le personnage. Cette connexion entre l'auditeur et le personnage s'étend sur tout l'album, si bien que l'on en vient à mener notre propre introspection à partir du sentiment d'empathie qui est crée. Le choix judicieux de faire intervenir directement le personnage par des phrases parlées, en plus du chant vient renforcer cette proximité. L'album entier est d'ailleurs imprégné de l'expérience personnelle de Julien en tant que soignant en milieu psychiatrique, ce qui se ressent beaucoup notamment à travers la justesse et la précision des paroles de chansons. L'alternance entre le chant guttural et le chant clair en plus d'apporter une virtuosité, approfondi le champs des émotions abordées, également illustrées avec des bruitages effrayants tels que des écoulements de sang. Les thématiques abordées et les pistes de réflexions qui les accompagnent sont multiples : les effets de la solitude et du rejet social, le rapport oedipien aux parents, l'émancipation de soi, la lutte contre ses pulsions violentes, ce sont tant de sujets qui peuvent nous toucher et qui sont en réalité bien plus universels que le seuil de la folie seul, ce qui constitue une réelle force de l'album.
Nous sommes donc face à un opus finement travaillé, que ce soit en terme de composition, d'inspiration, mais aussi de propositions musicales et techniques. Benighted sait se renouveller, et si l'on reste sur un solide death metal, au fur et à mesure de l'écoute, on se rend compte que le groupe joue à merveille avec les codes de celui-ci et n'hésite aucunement à nous livrer une interprétation totalement personnalisée et hybride nourrie d'influences multiples. L'écoute de l'album devient une baignade aux méfaits attrayants, parsemée d'agréables surprises pour les oreilles. En effet, que ce soit par des solos de guitare qui viennent adoucir l'ensemble, des passages grindcore groovy, ou des passages aux consonances jazz, nous sommes loin de voguer sur un long fleuve tranquille. Nous sommes plutôt confrontés à l’innommable, placés en immersion au seuil de notre inconscient. Il s'agit d'une écoute dont on ne sort pas indemne, et dont il subsiste à la fin l'envie profonde de renouveler l'expérience psychique et sonore qu'elle procure.
Créée
le 30 avr. 2020
Critique lue 57 fois
2 j'aime
1 commentaire
D'autres avis sur Obscene Repressed
[...] Bref, Obscene Repressed, c'est un peu de concessions certes mais pour servir un propos d'autant plus généreux, plus à même de s'inscrire dans le temps qu'une énième forme d'agression gratuite...
Par
le 9 avr. 2020
1 j'aime
Du même critique
Envoûtant. C'est le premier mot qui me vient à l'esprit après écoute de l'album. Celui-ci commence fort avec un morceau très énergique, qui retient rapidement notre attention. On plonge ensuite...
le 12 avr. 2020
1 j'aime