?There is a light?, murmure à mi-parcours Tony Dekker, et la lumière fut : noire, aussi irradiante qu'apaisante. Bodies & Mind, le précédent album de ces Canadiens, avait été enregistré dans une église en bois, il en était ressorti avec un ton solennel, mais sans le moindre vœu de pauvreté. Car c'est dans le luxe, l'opulence de mille détails, avec des instruments ruraux étonnament endimanchés (banjo, violons, guitares en chêne ) que se joue ce folk éternel qui, né au Canada, pourrait bien être le bâtard sublime d'une veillée pas du tout funèbre entre Neil Young (la voix) et Leonard Cohen (la gravité). Le groupe s'appelle Great Lake Swimmers : ce n'est donc pas dans le bénitier où barbotent tant de groupes folk orthodoxes que nage, en planche sereine, Tony Dekker. Les majestueuses grandes étendues, qui dominent constamment ce folk spatial, sont l'invité d'honneur de ce troisième album, que ce soit dans les paroles incantatoires ou les mélopées contemplatives, humblement orchestrées par le grand Owen Pallett (Final Fantasy et Arcade Fire). Ongiara est, en iroquois, le nom originel de Niagara : ?tonnerre d'eau?. Comme quoi il faut se méfier de l'eau qui dort. (Inrocks)


Tony Dekker a beau avoir enregistré deux des albums folk les plus essentiels de la décennie en cours, sillonné les routes pour les défendre, souvent seul sur scène, Great Lake Swimmers reste le secret le mieux gardé de la scène canadienne. Sauf improbable déclic, le magnifique  Ongiara ne devrait pas changer la donne. On y retrouve le jeune homme au sommet de son art, un folk lumineux et doux en prise avec les grands espaces, qui tutoie le Neil Young d’After The Goldrush (1970). Mais la mélancolie semble atténuée par la sérénité étrange et forte qu’acquièrent les grands solitaires. Une photographie récente dévoile un Tony Dekker nouvellement barbu, les cheveux plus longs, légèrement bouclés, le regard d’un bleu pénétrant. C’est peu de dire qu’il se dégage du personnage comme de ses chansons un magnétisme stupéfiant. Portées par une rythmique sèche et discrète, elles font la part belle à la guitare acoustique et au banjo, épousant les formes familières et chaleureuses d’une country ancestrale (Your Rocky Spine) ou celles, légèrement plus sophistiquées, de ballades finement orchestrées (beaux arrangements de cordes de Where In The World Are You). Derrière la douceur de ses chansons acoustiques, perce une ferveur impressionnante : Changing Colours impressionne, quand le phrasé du jeune homme se fait à la fois enveloppant et tranchant, relayé par une guitare électrique et des chœurs frissonnants. Un tempo qui s’accélère légèrement et l’écriture de Dekker laisse apparaître une force mélodique irrésistible (I’m Part Of A Large Family, un tube dans notre pays rêvé). Comme ses grands frères enregistrés dans un ancien silo à grains et une église, Ongaria doit aussi beaucoup au cadre et aux paysages qui l’ont vu naître. Le son ample et boisé laisse respirer les instruments et la voix, magnifiquement captés dans une vieille salle mythique de Londres (Ontario), non loin des chutes du Niagara, dont le nom vient de l’amérindien Ongiara, littéralement “tonnerre des eaux”. Un beau titre pour un disque qui déploie autant d’énergie à retenir ses larmes. (Magic)
Avec l'été nous sommes régulièrement enclins à faire le ménage dans notre voiture, projetant d'emmener une amie en bord de mer, admirer un coucher de soleil voilé par un oiseau de bon augure. Et lors de ce grand nettoyage nous sommes toujours surpris de retrouver sous un siège une vieille cassette de Neil Young ou, pour les plus jeunes, de R.E.M. C'est un peu le même sentiment éprouvé à l'écoute d'"Ongiara". Avec ce troisième opus des Great Lake Swimmers, c'est un vieux souvenir qui émerge, quelque chose que l'on est persuadé d'avoir déjà entendu quelque part. Mais au fil des écoutes il est possible de se rendre compte que cette musique là hantait nos rêves les plus fous (mais aussi les plus calmes…) depuis longtemps.

Car ici, avec ses ballades folk et champêtres les trois canadiens (Tony Dekker, Erik Arnesen et Colin Huebert) effectuent un saut en arrière comme s'ils espéraient récupérer un vieux souvenir d'enfance enfoui. Ils ont fait demi-tour pour aller chercher ce que d'aucuns oublient trop souvent : la mélodie des mots et le minimalisme symphonique qui rendent le paysage (musical) plus beau. Ainsi "Ongiara" contient cette beauté intemporelle et non feinte qui touchera au plus près les amis qui, avec vous en voiture, feront un bout de chemin…(Popnews)

bisca
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le 27 mars 2022

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