Don Cherry – Organic Music Society (1973)


Magnifique pochette pour cet « Organic Music Society » de soixante-treize, album qui a marqué un tournant décisif dans la musique de Don Cherry, qui semble moins regarder vers le jazz que vers les musiques du monde. Don Cherry est alors installé en Suède où il vit de façon communautaire, son modèle de vie est tout de paix et de fraternité, mais aussi d’amour et de musique.


La première pièce de l’album est à cet égard très révélatrice, comparable à une litanie Indoue, telle qu’on pouvait l’entendre chez les « Hare Krishna» du Boul’mich à l’époque, ici c’est tout de même mieux, mais on entend ces voix qui font chœur, sur un rythme immuable et répétant un chant entêtant sur un tapis de percussions. Ça s’appelle « North Brazilian Ceremonial Hymn », Don Cherry est aux percus, Nana Vasconcelos au berimbau, Moki joue du tambura, et surtout tout le monde chante, mais ils sont encore beaucoup plus nombreux, sur cette pièce de juillet soixante-douze, ce soir-là, à Copenhague.


La seconde pièce, « Elixir » est enregistrée en studio, elle est signée Don Cherry et se partage entre psalmodie ethnique et emballement rapide au piano, une pièce assez jolie qui voit se succéder l’usage d’énormément d’instruments en provenance du monde entier… Un raga assez court termine la face en laissant une signature qui s’apparente à une prière.


Sur la face deux la « Relativity Suite » en deux parties accentue encore le trait, pour ceux qui connaissent l’autre version avec « The Jazz Composer's Orchestra » et Carlos Ward au sax alto et de Frank Lowe et Dewey Redman au sax ténor, ça n’a pas grand-chose à voir, Ici Don chante en faisant référence à l’africanité, des percussions en nombre, de multiples origines, bruissent en fond sonore, par-dessus viennent se greffer des paroles qui semblent improvisées.


La troisième face s’ouvre sur « Terry’s Tune », un des plus beaux thèmes de Don Cherry, écrit en hommage à Terry Riley, une autre version de ce thème est également présente sur la face quatre. C’est très beau avec un accompagnement au piano, de multiples flûtes et le chant de Don. « Hope » qui enchaîne est également un très beau thème, avec ce même accompagnement, cette face rare est extrêmement plaisante.


D’autant qu’elle se poursuit avec une reprise de « The Creator Has a Masterplan » de Pharoah Sanders et Leon Thomas, je n’irais pas jusqu’à affirmer qu’il y a un retour vers le jazz, bien que ça puisse être dit car il y a là une évidence, pourtant l’album conserve incontestablement la puissance de cette World Music qui en marque l’unité, comme une signature. La face se termine sur le très court « Sidhartha », à nouveau un beau thème de la part du très créatif Don.


La quatrième face s’ouvre avec le magnifique « Utopia & Visions », une nouvelle merveille signée Don, ça regorge de pépites par ici, pourtant l’album sera un peu boudé par la critique « jazz » et ses puristes, qui ne verront qu'errances et déstructurations. Ce n’est pas mon avis, j’ai même un très grand respect pour cet album en quête de simplicité et d’évidence, en même temps que d’une certaine universalité.

xeres
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le 12 mars 2023

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