Paranormal
6.3
Paranormal

Album de Alice Cooper (2017)

La dernière fois qu'on s'est vus, Alice Cooper était en pleine nostalgie et nous proposait un retour à son cauchemar, très sympathique mais qui, s'il ne s'était pas présenté comme une suite à un album mythique, n'aurait pas souffert de la comparaison forcément à son désavantage. Il a par la suite lancé les Hollywood Vampires, en belle compagnie pour un album et une tournée d'ampleur.
Aujourd'hui, c'est Paranormal qui vient ajouter une pochette moche aux côtés de Constrictor et de l'abominable Raise Your Fist and Yell. Cette fois ci, pas de concept, mais plutôt une collection de chansons en formes de fables pas toujours très gentilles, comme il était de mise dans les albums des années 2000 qu'étaient Dirty Diamonds et The Eyes of Alice Cooper.
Pas de concept, mais des invités de marque ! On retrouve le vénérable Bob Ezrin à la production (et même à l'orgue ponctuellement), mais aussi Billy Gibbons des ZZ Top, Roger Glover, Larry Mullen Jr de U2 et surtout, tout les membres originels et survivants du Alice Cooper band ! Ainsi Michael Bruce, Dennis Dunaway et Neal Smith sont de la partie ça et là. Que des bonnes nouvelles en soi !


Donc, on commence avec une implacable logique et le titre Paranormal qui s'égraine entre arpèges mystérieux et grosse fanfare électrique. Le thème est assez proche de la jolie chanson This House is Haunted sur The Eyes of Alice Cooper sauf que cette fois ci c'est le narrateur qui tient lieu de présence, eh bien, paranormale. On note un léger autotunage volontairement audible et fantomatique ainsi qu'un riff particulièrement bien senti avant le dernier quart du morceau.
Dead Flies et son intro typique des morceaux des années 2000 du Coop (Along Came a Spider)nous garde en terrain connu avec un rock très professionnel avec tout ce qu'il faut de solo, de batterie entraînante et de voix hargneuse. Pas mémorable plus que ça.
Mais on attend Fireball au tournant puisque ce titre marque le retour de Dennis Dunaway (et aussi de Bob Ezrin à l'orgue Hammond) . Cette ironique fable apocalyptique est l'oeuvre du bassiste historique d'Alice Cooper et c'est plutôt réussi, on voit la chute venir mais ça fonctionne. En interview, Alice Cooper décrit Dennis Dunaway comme le monsieur science-fiction de la bande et ce titre comme typique de son imaginaire. Ce qui m'aurait fait plaisir, c'est que le morceau ne finisse pas en fade-out, mon combat est donc sans fin !
L'amusant Paranoiac Personality ne surprend pas vraiment mais on se plaît à y trouver à la fois des airs de This Maniac's in Love With You période Trash et de Make That Money sur Zipper Catches Skin. Psychose s'invite au passage et la dyslexie feinte de Personaiac Paranolity est quand même assez drôle et typique de cette maladresse qu'Alice Cooper colle parfois avec bonheur à son personnage.


Vous connaissez ces pubs américaines où une vieille dame active un collier alarme lorsqu'elle fait une chute seule chez elle ? Elle crie dans son appareil, gisante auprès d'un déambulateur ayant failli à sa mission avec une détresse évidente tandis qu'un opérateur en uniforme et à la chaude voix rassurante l'informe de l'arrivée imminente des secours ? "I've fallen and I can't get up !" crie-t-elle.
Et bien, la chanson suivante est née de cette publicité. Sauf que là notre Papy (Alice Cooper 69 ans en 2017) est tombé...amoureux ! Et pour l'aider à se relever c'est un autre Papy (Billy Gibbons 67 ans en 2017) qui accourt. Le ZZ Top s'occupe des parties de guitares et ça s'entend, on est pile au milieu des deux univers avec des paroles vraiment très drôles, des solos typiques du barbu et la fin en fade-out n'entache presque rien.
J'ai toujours trouve que l'air à la fois méchant et piteux d'Alice Cooper avait quelque chose en commun avec le personnage de Will Coyote. Ce n'est pas Dynamite Road qui me fera changer d'avis. Avec son rythme effréné et sa fin explosive, on ne poursuit pas Bip Bip mais on fait la course avec le diable dans une fable qui ressemble pas mal, dans son thème mais aussi musicalement, à celle de The Devil's Went Down to Georgia. Une des plus belles réussites de cet album pour le coup, avec en prime un gros clin d'oeil à Steven et son Welcome to my Nightmare en forme de pont.
Je ne pense pas pouvoir en dire autant de Private Public Breakdown qui semble pour le coup sortie de Eyes of Alice Cooper, d'avantage dans son côté daté et formaté que dans ses qualités. Malgré des paroles amusantes, on ne peut pas dire que grand chose en ressorte.
Holy Water met la sale sorcière dans la peau d'un télévangéliste et, avec ce ton qui caractérise ses derniers albums, parvient à jouer sur les deux tableaux, de l'ironie et de la foi chrétienne en même temps. Alice Cooper délivre une nouvelle fois cette espèce de morale chrétienne lucide mais toujours teintée d'humour, un cas vraiment particulier et finalement assez bien présenté. Le morceau en soi est emprunt de music-hall, de rock optimiste et comporte de chouettes cuivres pour que la fanfare soit complète.
Rats n'a rien à voir avec Ghost, on dirait un rock'n'roll passé au prisme du Alice Cooper des années 80 plutôt rigolo et avec un joli solo et un moins joli fade-out, juste pour que je râle.


Mais je ne vais pas râler longtemps car arrive avec The Sound of A une des plus belles chansons d'Alice Cooper tout court. On quitte toute joie et toute forme d'humour avec ce morceau issu d'une session de 1967 selon les dires d'Alice Cooper, écarté et oublié depuis lors. L'ambiance glaçante, inspirée de Pink Floyd soutient une histoire dystopique où un gouvernement maintient le peuple dans la docilité grâce à un son (of A) émit continuellement mais qui pourrait, en changeant de note, rendre la population folle à lier. Dennis Dunaway est de retour, Alice Cooper raconte dans les interviews qu'il pensait que ce morceau était la création du bassiste, Monsieur Science Fiction, mais que celui-ci l'avait détrompé en lui affirmant que c'était bien le Coop qui l'avait composée.Les souvenirs lui sont depuis revenus, ce qui ne gâche rien à l'atmosphère de mystère qui plane autour de ce morceau fantomatique revenu du fond des âges.


Normalement c'est tout !
Mais on a droit, en plus de 6 morceaux live, à deux morceaux inédits par le groupe d'origine, ce sur l'édition 2CD de l'album.
La première est Genuine American Girl une merveille d'humour et de rock qui décrit avec fierté un personnage transgenre qui rappelle un peu l'homme parfait de Man of the Year, encore sur The Eyes of.... Les paroles sont hardies, s'accordent parfaitement au rythme et se permettent même une référence aux 50 Nuances de Grey et à Musclor !
You and All of Your Friends peine un peu plus à convaincre, rien n'est particulièrement mauvais dans cette fin du monde du point de vue de l'Ange de la Mort, l'humanité est fustigée pour ce qu'elle a fait du monde, le détruisant bien plus efficacement que ne l'aurait fait cet agent de l'apocalypse. Cette fois-ci hélas, rien ne dépasse et on est loin des hauts faits d'armes du groupe. Bah !


Alice Cooper en 2017 ce n'est plus l'explosion permanente que c'était en 1973 ou même en 1989, mais c'est devenu un personnage sympathique qui, même s'il ne publie pas forcément des morceaux inoubliables, fait plaisir à entendre avec cette voix unique quoi qu'il arrive. Très pro et toujours spectaculaire en concert, Alice Cooper n'a de toutes façons plus grand chose à prouver depuis longtemps, il fait partie de la famille. Et si de temps à autre, un morceau comme The Sound of A se matérialise de nulle-part, alors il vaut mieux se tenir sur ses gardes.


PS : Je termine ceci 3 ans après avoir commencé la rédaction, mieux vaut tard hein !

I-Reverend
6
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Alice Cooper, presque tout !, Les meilleurs albums d'Alice Cooper et Alice Cooper, une chanson par album, celle que je préfère tant qu'à faire.

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le 4 mai 2020

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I-Reverend

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