La tournée POP du plus grand groupe de rock en stade clamant l'avenir d'une jeunesse bousillée

Autant le point d'orgue de ZOO TV fût le continent asiatique et océanique, autant concernant la tournée popmart , ce fùt l'amérique du sud et notamment Mexico City! La tournée dès lors devient plus sexy, plus efficace (rien à voir avec le concert au parc des princes où U2 convoque le soir même un véritable conseil de guerre). Les stades sont pleins, l'ambiance est survoltée. Toute la tension a tourné autour de la set-list. Garder l'ambition initial de l'album POP , ou rassurer les fans (et le groupe!) en y injectant massivement les hits plus anciens au risque de livrer une tournée best off.? Rajoutez-y les problèmes de voix de Bono (user par les cigarellos et l'acool) et le fait que cette tournée a commencée en même temps que la sortie de l'abum POP et du single DISCOTHEQUE ( chose que U2 ne fera plus), La catastrophe d'un crash pointait objectivement à l''horizon. Adieu DO YOU FEEL LOVED, MIAMI, IF GOD WILL SEND HIS ANGELS., la partie karaoké. STARING AT THE SUN a éte épuré par un retour accoustique. La set-liste ne bouge plus; Bono retrouve la forme et la magie opère! Retrospectivement, le show est l'un des meilleur de U2 et retranscris parfaitement l'énergie du groupe en décembre 1997. L'ouverture du show sur POP MUZIK de Robin Scott sur les 4 paddies qui arrivent coté foule est juste excellente , Bono en rockeur irlandais fait le show et ses premiers mots annoncent :"Mexico MOFO" et c'est l'acid rock au rythme du tellurique jeu de guitare de The Edge qui enveloppe tout le stade dans un délire Warholien , I WILL FOLLOW et surtout GONE met tout le monde d'accord : U2 est en grande forme et ça fait plaisirs à voir! BRITPOP + PUNK=GONE. Parti pour rester la meilleure composition de POP et faire pleurer tous ces groupes de Brit-pop qui n'existent plus. C'est peut-être la chanson la plus sincère de Bono des 90's.Ce show gigantesque est mené tambour battant , j'ai toujours trouvé dommage que l'album zooropa soit le grand oublié de cette tournée.
Avec U2, tout n'est peut-être, finalement, qu'une histoire de


citron. Planté sur la droite du décor, ce fruit géant focalise depuis le début de la tournée Pop Mart les remarques acerbes. Trop grand, trop inutile, trop quoi?: le parfait symbole de la démesure. Sur scène, le groupe irlandais n'a pas mégoté: une énorme arche à la McDonald's domine une esplanade quasi olympique, d'où s'élève, fichée dans un cure-dent de Gargantua, une olive-ovni. A côté, le fameux citron. L'ère du gigantisme, U2 l'enfonce aussi à coups de record: pour chaque concert, le stade est réservé cinq jours. Trois pour installer le show, deux pour le démonter. L'infrastructure suit: 250 personnes, 75 camions, un avion, des kilomètres de câbles. Et un écran géant, à cristaux liquides, le plus grand au monde paraît-il, révolutionnaire: 35 millions de francs.


Pour comprendre comment ils en sont arrivés là, il faut remonter au début des années 90. Délaissant le rock engagé, simpliste et charismatique qui les a fait connaître dans les années 80, Bono Vox, The Edge, Adam Clayton et Larry Mullen Jr. découvrent un autre univers. La techno, la vidéo. Et Wim Wenders, William Burroughs, Allen Ginsberg. Ça les fait réfléchir. En 1993, la tournée ZOO TV est un coup d'éclat. Déjà mastodonte, elle prouve, à coup de technologie, qu'on peut marier rock et second degré, musique et détournement d'images. Dans l'industrie du disque, on parie sur les prochains concerts: forcément intimistes, après ça" «Ils croyaient tous savoir ce que nous ferions, dit Paul McGuiness, manager et officieux cinquième membre du groupe depuis les débuts. Mais la musique d'U2 est ample, bâtie pour les stades. Nous serions à l'étroit dans des clubs.» Alors, va pour le gigantisme. Et la rentabilité: sur le ZOO TV tour, U2 alternait les grands espaces et les «petites» salles comme Bercy (15 000 personnes). Résultat: trop de concerts, trop de dépenses ­ l'équilibre financier fut tout juste atteint. Cette fois-ci, le groupe vise haut: ne jouer que dans des stades (minimum 35 000 personnes, on annonce même un concert en Italie avec près de 200 000 spectateurs), mais proposer quoi? McGuiness: «On ne peut pas attirer des gens uniquement pour la musique. Il doit y avoir autre chose.» Dès janvier 1996, l'équipe y réfléchit. Aux commandes, Peter «Willie» Williams, le directeur artistique. A l'époque, U2 entre en studio, sillonne Dublin, tourne en rond. Les chansons sont à peine ébauchées que le décor prend forme. «J'allais les voir souvent, leur soumettais mes idées. On a fait plusieurs maquettes, des simulations par ordinateur», dit Williams. Une fois le groupe fixé, les calculs commencent: une fortune. Aucune compagnie ne veut s'engager sur un tel pari. Aujourd'hui, McGuiness nuance: «Nous ne voulions pas de sponsors. Le rock véhicule une image d'indépendance, le public ne comprendrait pas"» Hormis quelques partenariats (avec Microsoft, notamment, pour les logiciels), U2 finance seul l'entreprise. Que le groupe joue ou ne joue pas, chaque jour de la tournée coûte 250 000 dollars (environ 1,5 million de francs) en maintenance.


Mais qu'ont-ils en tête? En fait, U2 manie le second degré. La réflexion, commencée avec le ZOO TV tour, les conduit vers l'art et la société de consommation. Leur album s'appelle Pop, la tournée Pop Mart: références au pop art, mais aussi à la chaîne de supermarchés américains K Mart ­ c'est d'ailleurs dans un de ces Prisunic new-yorkais qu'ils ont tenu, en février, une conférence de presse, rayon lingerie. Leur credo? «Nous croyons au kitsch.» U2 se pique de jouer avec les icônes, de juxtaposer Warhol et un Caddie. Héritiers indirects de l'Independent Group, une réunion d'artistes anglais des années 60 qui réfléchirent les premiers sur les nouvelles idoles de leur temps, les objets de consommation, U2 veut tout mélanger.


Warhol et Keith Haring. A New York, Bono charge une Irlandaise, Catherine Owens, bien introduite dans le milieu artistique, de leur servir d'intermédiaire. Grâce à elle, le groupe obtient de Roy Lichtenstein l'autorisation d'utiliser, en animation vidéo, certains de ses tableaux. «Il voulait être impliqué, il est venu nous voir jouer à New York, enthousiaste», dit Willie Williams. Mais le groupe veut encore plus: des images de Warhol et de Keith Haring, peintre-graffiteur des années 80 ­ morts tous les deux. Owens négocie dur avec les ayants droit. «Elle a encore fait des miracles. Nous voulions la Marilyn de Warhol, mais aussi la possibilité de manipuler ses oeuvres, ce qu'ils refusent d'habitude. Sauf là"» Paul McGuiness, lui, s'y attendait: «Les artistes comprennent ce que nous faisons. Bien sûr, il y a de la technologie, du spectaculaire, mais U2, c'est du high-tech et du high-art.» Le groupe s'oriente aussi vers les nouveaux créateurs. Owens, toujours elle, goupille l'affaire. «Elle a écumé les écoles d'art britanniques, dit Willie Williams. Visionné des dizaines d'heures d'animation et retenu douze artistes. Quasiment tous Londoniens.» Leur trait est souvent simple, coloré, à la Beavis and Butt-Head: les contraintes techniques de l'écran ­ basse résolution et bonne définition de couleurs ­ l'imposaient. Quant aux thèmes, ils reflètent l'époque cheap: courses dans un supermarché, signalétique, vacances au soleil" Tout semble prêt.


Quand, avec plusieurs mois de retard, U2 sort Pop en début d'année, la tournée démarre presque. C'est déjà la course. Le groupe peine à trouver l'équilibre, et les premiers concerts, aux Etats-Unis, sont sèchement critiqués. Mick Jagger, pourtant «fan de U2», l'expliquait récemment dans Rolling Stone: «Ils ne jouent pas autant dans la démesure que je l'aurais cru. Vous devez transcender la scène. Ecoutez: c'est du théâtre, de l'entertainment. Peut-être ne sont-ils pas faits pour les stades. Ils semblent toujours s'excuser d'être là.»


Comme s'ils n'allaient pas jusqu'au bout de leur pari. Un citron géant-stroboscope? D'accord. Mais pourquoi ne l'utiliser que sur deux chansons? Ont-ils peur du kitsch qu'ils revendiquent? Comme si, à force de distanciation, ils omettaient l'essentiel: la charge émotionnelle. «Ce show est moins malin que le ZOO TV, plus accessible», dit pourtant Williams. Alors, définitivement, U2 manie mieux l'intelligence que la simplicité et l'ironie. Car le concert achoppe aussi sur son objectif initial: comment critiquer la société de consommation quand on joue dans un stade, devant des milliers de personnes? Du malaise, le public s'en est fait l'écho: aux Etats-Unis, un show aurait été annulé, faute de locations. McGuiness livre une autre version: «Ce soir-là, ils ont préféré donner un concert de soutien au peuple tibétain"» Frais colossaux. Dans l'industrie du disque, on suit l'affaire de près: les méventes confirmeraient la crise du marché, l'embellie signifierait une reprise. Pour l'instant, d'après McGuiness, U2 rentre dans ses fonds, et devrait rassembler 5 à 6 millions de spectateurs d'ici à la fin de la tournée, en avril au Caire. Pourtant, chez Island, la maison de disques d'U2, ça tourne au vinaigre. Selon Rolling Stone (1), seize personnes viennent d'être licenciées, la semaine même où Pop a chuté à la 89e place des hit-parades américains. Raisons probables: les ventes plus faibles que par le passé ne suffiraient pas à absorber les frais colossaux engagés par le label, en marketing (6,5 millions de francs) et en royalties reversées au groupe. Island, bien sûr, se refuse à tout commentaire.


Y aurait-il, finalement, un grain de sable dans le rouage U2? Paul McGuiness sourit: «Bien sûr, nous avons constamment des problèmes. A Oslo, le fameux agrume [qui s'ouvre au milieu du show, laissant apparaître les membres du groupe] a bougé de quelques centimètres. Et plus rien. Bloqué. Le ratage total.» Sacré citron.

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le 2 janv. 2021

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